L’essayiste Hakim El Karoui a présenté lundi son projet d’Association musulmane pour l’islam de France (Amif), destinée notamment à réguler les secteurs du pèlerinage et du halal et à financer un “conseil théologique” indépendant chargé entre autres de lutter contre la radicalisation.
Cette structure propose de réunir “toutes les compétences possibles et nécessaires” de l’islam en France, au moment où le gouvernement entame une révision de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État pour mieux encadrer le culte musulman et le rendre plus transparent.
La future organisation entend devenir “un tiers de confiance” pour “la régulation, le travail théologique, le travail de diffusion des idées” et “faire face aux multiples enjeux qui concernent l’islam aujourd’hui”, a résumé M. El Karoui lors d’une conférence de presse.
L’auteur avait publié en septembre avec l’Institut Montaigne un rapport proposant de réformer le culte musulman, pour mieux lutter contre le discours salafiste, détaillant ses projets. Ce texte avait été critiqué par plusieurs représentants du culte musulman du Conseil français du culte musulman (CFCM), qui le jugeait, entre autres, trop alarmiste sur la radicalisation.
Parmi les personnalités travaillant sur l’Amif avec Hakim El Karoui figurent Tarek Oubrou, recteur de la mosquée de Bordeaux, connu pour ses prises de position en faveur d’un islam libéral, ou encore Mohamed Bajrafil, jeune imam d’Ivry-sur-Seine.
Les statuts de cette structure, qui serait notamment composée de deux associations (une association cultuelle de type 1905 et une association culturelle de type loi 1901), seront déposés d’ici à “quelques jours”.
L’Amif entend, dans un premier temps, devenir un acteur du marché du pèlerinage.
Faisant le constat que la chaîne actuelle d’organisation du voyage, pour les quelque 23.000 à 25.000 pèlerins français allant chaque année à La Mecque, manque de transparence et coûte cher, les porteurs du projet travaillent à une structure garantissant transparence et meilleur qualité de service, via une accréditation des agences de voyage (avec un référentiel et un système d’audit financier des agences). Pour cela, ils espèrent une discussion fructueuse avec les autorités saoudiennes, qui aujourd’hui agréent les agences et remettent les visas. L’Amif serait rémunérée pour ce service d’accréditation.
Une fois ce service mis en place, les auteurs du projet veulent faire de même sur le marché du halal, connu pour son “manque de transparence”, en devenant le “certificateur des certificateurs”, moyennant une redevance.
Dernier volet, l’Amif pourrait collecter les dons des fidèles et leur redistribution “en toute transparence” à travers une plateforme internet.
Les marges financières dégagées par ces services permettront ensuite de financer les projets d’un “conseil théologique”, indépendant et “pluriel”, composé d’imams élus ayant adhéré à une “charte commune”, qui aura vocation, entre autres, à travailler sur le “statut” des imams et leur formation.
“Épine dorsale d’un islam apaisé”, ce conseil devra notamment “veiller à la conformité du discours religieux”, a déclaré le théologien Tarik Abou Nour, assurant que ce discours ne pourra qu”‘encourager à la paix, à l’intégration”.
Enfin l’Amif, qui entend “améliorer l’insertion paisible de l’islam dans la République”, pourra financer des projets valorisant l’image de l’islam en France (études, campagnes de sensibilisation, notamment sur les réseaux sociaux), luttant contre les discriminations et contre la radicalisation.
Dans ce projet, les représentants actuels du CFCM seraient bienvenus, en tant que “représentants des mosquées”. Le CFCM a déposé l’été dernier les statuts d’une association qui entend elle aussi aider à réguler les collectes de dons et les secteurs du pèlerinage et du halal.