C’est une annonce qui a fait l’effet d’une douche froide pour les syndicats des travailleurs. Lundi, le président de la Commission des finances et du budget de l’Assemblée nationale (APN), Toufik Bekhouche, a pris tout le monde de court en annonçant que la mesure portant sur le relèvement du point indiciaire dans la Fonction publique ne figurait pas dans le projet de la loi de finances PLF 2022.
Intervenant sur la Radio algérienne, le parlementaire a expliqué : « Tout simplement parce qu’il (le point indiciaire) ne représente pas un élément important dans le budget de l’État. Son augmentation est une décision souveraine du président de la République qui peut trancher par le biais d’un décret présidentiel ». Selon le parlementaire, les « effets de la décision pourraient se manifester dans le projet de la loi de finances complémentaire ».
Des propos qui ont provoqué la polémique et ont fait bondir le président du Syndicat des praticiens de santé publique (SNPSP), le Dr Lyes Merabet.
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« L’augmentation du point indiciaire est une décision souveraine qui fait partie des prérogatives du président de la République ? Des concepts utilisés hors contexte et le plus dangereux c’est qu’ils sont prononcés par des parlementaires censés parler au nom du peuple », a protesté le Dr Merabet sur compte Facebook.
Le président du SNPSP, joint ce jeudi par TSA, ne cache pas sa colère à la suite des propos tenus par le président de la Commission des finances et du budget de l’APN.
« Il nous explique qu’il n’y a pas eu de proposition pour la revalorisation du point indiciaire dans le PLF 2022 en nous renvoyant à une décision de souveraineté nationale et que c’est au président de trancher. Ce n’est pas normal », a critiqué Lyes Merabet.
L’annonce est d’autant plus incompréhensible pour le syndicaliste, le 3 octobre dernier à l’issue du Conseil des ministres, le président de la République a ordonné « la réduction de l’impôt sur le revenu global (IRG) », et « l’augmentation du point indiciaire dans la Fonction publique ». Deux mesures phares destinées à amortir la baisse du pouvoir d’achat des Algériens.
Situation socio-économique « désastreuse » des travailleurs
Le lendemain, le Premier ministre Aimene Benabderrahmane, annonçait depuis Oran que les mesures prises la veille lors du Conseil des ministres, comme le relèvement du point indiciaire dans la fonction publique et la baisse de l’IRG allaient permettre une augmentation des salaires et une amélioration du pouvoir d’achat des citoyens.
« Cela prouve qu’au niveau du principe la question a été tranchée et que des orientations ont été données par le président de la République au gouvernement », a indiqué le Dr Merabet pour relever la contradiction dans les propos du parlementaire.
Le président du SNPSP rappelle la sensibilité que revêt la question au vu de la situation socio-économique « désastreuse » des travailleurs algériens.
Le président du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), Meziane Meriane, se dit aussi surpris par l’absence de la question de la revalorisation du point indiciaire dans le PLF2022.
« C’est la loi de finance qui doit réguler les dépenses. Comment voulez-vous dépenser ce qui n’est pas prévu dans la Loi de finances ? », se demande le syndicaliste, avant de répondre au président de la commission des finances de l’APN.
« Le président de la République peut décider par un décret exécutif et légiférer par ordonnance, la loi le lui permet. Mais pour les dépenses, on doit se référer à des articles dans la Loi de finances », a-t-il expliqué. « Nous ne comprenons pas », a ajouté M. Meriane.
Pour le syndicaliste, les questions qui se sont posées après les annonces du Conseil des ministres du 3 octobre dernier, portaient sur la valeur à donner au point indiciaire et surtout au budget qui devait être consacré à cet effet.
« Le président de la République a fait une annonce politique mais sur le plan comptable on ne peut pas augmenter les salaires et notamment dans la Fonction publique, sans passer par la loi de finances », a estimé le SG du Syndicat des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef), Boualem Amoura. « Sinon où va-t-on piocher l’argent ? », s’est-il interrogé.
En outre, le Dr Lyes Merabet déplore l’exclusion des syndicats des discussions autour de la question du point indiciaire. « En tant que partenaires sociaux, nous n’avons pas encore une fois été associés et l’on continue dans la négation de notre droit à être concertés », s’est-il insurgé.
« Une commission technique a été installée depuis un certain temps afin de discuter des propositions par rapport à la valeur à donner au point indiciaire. Jusqu’à présent ladite commission n’a toujours pas rendu public ses propositions et n’a pas soumis de dossier sur cette question ni au gouvernement ni au Parlement ».