Il faut sans doute remonter aux années 1990, qu’on appelle communément « décennie noire », pour assister à une vague d’arrestations d’une telle ampleur.
Pas moins de 140 personnes ont été arrêtées depuis le 21 juin dernier et sont détenues, selon un bilan non exhaustif publié ce dimanche 24 novembre par le Comité de libération des détenus (CNLD).
Établi sur la base des informations obtenues auprès des avocats, ce bilan fait état de treize détenus libérés. Mais il ne prend pas en considération les arrestations temporaires qui peuvent se chiffrer par dizaines.
Principaux chefs d’accusations retenus contre les prévenus : « port de l’emblème amazigh », « atteinte à l’unité nationale », « atteinte au moral de l’armée », pour les cas notamment des détenus les plus connus, à l’image de Karim Tabbou et Lakhdar Bouregâa, ou encore « appel à attroupement » ou encore tentative d’empêcher l’élection présidentielle.
Le nombre d’arrestations a augmenté de façon vertigineuse depuis le début de la campagne électorale, dimanche 17 novembre, marquée par les mouvements de protestation contre l’élection présidentielle et contre les meetings des candidats.
Il ne se passe plus désormais un jour sans que les médias ne fassent état d’arrestations. Que ce soit durant les manifestations anti-candidats ou, fait nouveau, durant les marches nocturnes contre la présidentielle.
C’est ainsi qu’on a enregistré des arrestations dans plusieurs willayas du pays, comme à Tlemcen, Alger, Oran, Sétif, Ouargla, El Oued, Sidi Bel Abbes, Chlef et Skikda.
Et le sort des personnes diffère d’une ville à une autre, entre ceux qui sont relâchés, placés en liberté provisoire ou incarcérés. Mais globalement, pour l’heure, seul le tribunal de Sidi M’Hamed a fait exception, notamment pour les porteurs de l’emblème amazigh, en décidant de condamner les prévenus à la prison ferme.
Faute de communication des autorités, il est difficile d’avancer un chiffre précis et un bilan exhaustif sur le nombre de personnes arrêtées et/ou condamnées depuis le début de la campagne.
Mais, il pourrait facilement dépasser la centaine. Face à cette escalade que rien ne semble arrêter et ce qui a fait dire aux manifestants durant la marche de vendredi dernier qu’il s’agit « d’une campagne d’arrestations et non une campagne électorale », le CNLD a lancé un appel à une grève générale le 28 novembre prochain.
Le CNLD, « fidèle à ses engagements et missions, réuni samedi 23 novembre à Alger pour évaluation de la situation, appelle l’ensemble des Algériennes et Algériens, toutes les forces vives du pays, à une grève générale, dans tous les secteurs à travers le territoire national, pour la journée du jeudi 28 novembre », écrit ce comité dans un communiqué publié sur Facebook.
Il appelle la société civile à « rejoindre massivement » le rassemblement des mamans et des familles de détenus, le même jour du jeudi 28 novembre à 14 heures, à la place Maurice Audin (Alger) pour « exiger la libération de tous les détenus de la révolution et l’arrêt immédiat de cette répression judiciaire », note le texte.
Les syndicats sont également conviés à observer un mouvement de grève. «A cet effet et pour la réussite de cette grève générale, le CNLD appelle l’ensemble des syndicats autonomes au niveau national à adhérer massivement à cette action en soutien aux détenus politiques et d’opinion ainsi que leurs familles, en attendant d’autres actions communes à engager début mois décembre ».