Société

Hirak : des appels à respecter le protocole sanitaire anti-Covid

Des milliers de manifestants ont marché lundi 22 février à Alger ainsi que dans de nombreuses autres villes du pays à l’occasion du deuxième anniversaire du déclenchement du Hirak.

Comme lors de la première année du Hirak où des marches avaient été organisées pendant plus de cinquante week-ends consécutifs, les manifestations marquant l’an II du mouvement se sont caractérisées par une forte mobilisation et se sont déroulées dans le calme.

Les observateurs ont néanmoins relevé un manquement de certains manifestants au protocole sanitaire de lutte contre le virus de Covid-19. Le port du masque n’était pas systématique.

Au printemps dernier, c’est dans le souci de préserver la santé publique au moment où montait inexorablement la courbe des contaminations, que des figures connues du mouvement avaient appelé à suspendre momentanément les manifestations de rue.

Un mot d’ordre suivi sans difficulté par la population. Les manifestants avaient compris qu’un tel geste s’inscrivait dans le sillage de la silmia, le pacifisme qui a accompagné et fait la réputation du mouvement dès son début, le 22  février 2019.

Et c’est la même raison qui a fait que les appels sporadiques à reprendre les marches pendant cette année de « trêve » n’ont pas été suivis, les principaux acteurs du Hirak ayant pris les devants pour appeler à la temporisation et à la vigilance.

C’est pourquoi beaucoup ont été surpris par ce qu’ils ont constaté lundi dernier dans les rues, notamment d’Alger, où les mesures de protection et de distanciation sociale n’ont pas été observées par tous.

Il est vrai qu’un relâchement est constaté depuis quelques semaines partout à travers le pays et dans divers espaces ; dans les rues, les marchés, les stations de transport, les magasins et tous les lieux publics.

Le port du masque est de moins en moins systématique et la distance d’un mètre n’est pas toujours observée. La raison est bien simple : les chiffres des nouvelles contaminations se stabilisent à des niveaux loin d’être inquiétants et la perspective de vacciner 70% de la population, comme le promettent les autorités, incite plus à la confiance qu’à la vigilance excessive.

« Le Hirak est conscient »

Même ce variant britannique qu’on dit plus contagieux et contre lequel certains vaccins ne peuvent pas grand-chose ne semble pas inquiéter outre mesure. Il est vrai que la situation sanitaire est stable, les spécialistes le confirment unanimement et les officiels s’en félicitent, mais il reste que le virus est toujours là et il ne faut pas perdre de vue que la pandémie, qui a touché maintenant plus de 100 000 algériens et en a emporté près de 3 000, a commencé avec quelques cas importés il y a une année.

Ceux qui suivent de près la situation rappellent aussi que la deuxième vague de l’automne avait été imputée en partie aux meetings de campagne pour le référendum sur la révision constitutionnelle du 1er novembre dernier, organisées dans des salles exiguës et fermées.

Il est vrai que les manifestations du Hirak se déroulent en plein air, mais il y a des situations très dangereuses en matière de risque sanitaire, comme lorsque des dizaines de manifestants tentent de passer à la fois par les passages très étroits que laisse la police sur les trottoirs.

Ou encore lorsque la foule tente de forcer les cordons de CRS. En cas de très forte affluence, il faut jouer des coudes pour se déplacer ou simplement marcher.

À l’impossibilité d’observer la distance d’un mètre, s’ajoute donc comme facteur aggravant le non-port du masque. Des appels ayant été lancés pour marcher de nouveau ce vendredi 26 février à Alger et ailleurs, et des étudiants et de jeunes activistes du Hirak ont pris les devants pour inciter à la vigilance à travers un hashtag déjà largement partagé : «Le Hirak est conscient. Je suis une citoyenne algérienne consciente, je porterai un masque pendant les marches. Je suis un citoyen algérien conscient, je porterai un masque pendant les marches. »

Hier mercredi, le Pr Mohamed Belhocine, éminent épidémiologiste et membre du comité scientifique chargé du suivi de la pandémie de coronavirus, a mis en garde contre la « super-propagation » du Covid-19 en Algérie. Il a lancé un appel « fraternel » aux citoyens à respecter strictement le port du masque lors des manifestations.

« Honnêtement, ça crée toutes les conditions de super-propagation »

« J’ai vu des rassemblements dans différentes villes ces derniers jours et j’ai surtout vu très peu de gens porter le masque lors de ces rassemblements », a-t-il constaté.

« Honnêtement, ça crée toutes les conditions de super-propagation, un évènement où beaucoup de gens sont rassemblés sans être protégés tout en parlant et criant fort, car il faut se rappeler que c’est un virus qui est d’abord à transmission aérienne », a souligné le professeur Belhocine dans un entretien à TSA.

« Je souhaite vivement que nous ne payions pas ces comportements par une flambée épidémique importante dans les jours ou semaines qui viennent. J’en appelle véritablement à la vigilance et à l’observation par nos citoyens du port du masque et à un minimum de respect de la distanciation physique. C’est très important », plaide le professeur Mohamed Belhocine.

Sur les réseaux sociaux, les réactions sont positives et le message semble bien reçu par tous. Le pacifisme du Hirak c’est aussi se protéger et protéger les autres, manifestants ou policiers.

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