Depuis quelques semaines, la tendance constatée lors des marches populaires du vendredi ou celles des étudiants le mardi, est à la reprise progressive de la mobilisation populaire.
Ce 30 août, vingt-huitième vendredi de contestation, le hirak a peut-être retrouvé son niveau de mobilisation d’avant le ramadhan, même s’il reste encore loin des tsunamis de février-mars qui avaient poussé Bouteflika vers la sortie.
A Alger, les principales artères du centre-ville étaient noires de monde. Des marées humaines ont de nouveau convergé vers la place Audin et la Grande Poste, de la rue Didouche, du boulevard Hassiba et de la rue Asselah-Hocine d’où déferlent les citoyens de la Casbah et de Bab el Oued.
Partout ailleurs, c’est le même constat du retour progressif du hirak. Et ce n’est pas encore la rentrée ni la fin effective des grosses chaleurs.
Ce regain de la contestation ne constitue pas, à vrai dire, une surprise quand on sait qu’en plein ramadhan et sous le soleil brûlant de l’été, en dépit du blocage des accès à la capitale, des arrestations et autres intimidations, des dizaines de milliers d’Algériens ont continué à sortir chaque vendredi dans les rues d’Alger et des autres villes.
Par ailleurs, depuis quelques semaines, les citoyens se sont remis, comme aux premières semaines du mouvement, à chahuter les sorties sur le terrain de ministres et autres responsables.
Ceux qui avaient mis le recul de la mobilisation sur le compte de la conjoncture estivale se trouvent confortés et prédisent que les rues d’Alger connaîtront d’autres tsunamis humains dès les prochaines semaines d’autant que, sur les principales revendications, le pouvoir n’a encore rien cédé de sérieux.
En attendant, les animateurs du mouvement peuvent déjà se targuer d’avoir su entretenir la flamme, préserver le caractère pacifique de la contestation et maintenir la cohésion des manifestants autour des même mots d’ordre.
L’esprit du hirak est intact
La détermination des Algériens à imposer une transition démocratique véritable est aussi vive qu’au premier jour et l’esprit du hirak est intact, c’est le principal message que livre ce regain de mobilisation. En continuant à sortir en masse, les manifestants font aussi la preuve de la portée limitée des arrestations et des intimidations et que seul un processus politique sérieux pourra mettre fin au statu quo.
Sur ce plan, ce second souffle du hirak démontre que le pouvoir n’a pas choisi les meilleures options dans sa gestion de la crise, que ce soit dans sa vision globale ou dans sa manière de procéder. Du moins, il n’a pas su se montrer suffisamment convainquant. Le message était bien lisible sur les pancartes des manifestants qui rejettent l’idée d’aller vers les urnes avec les institutions et le dispositif réglementaire hérités du président déchu.
Ayant tout misé sur la fin de la contestation, les autorités politiques n’ont pas su mettre à profit « la période de grâce » qu’a constitué le creux de la mobilisation durant l’été pour proposer un projet acceptable et se sont obstiné à aller « dans les meilleurs délais » vers une élection présidentielle, par le biais d’un dialogue boycotté par quasiment toute l’opposition, et sans décréter la moindre mesure susceptible d’apaiser le climat.
Certes, rien ne permet encore de conclure à la tombée à l’eau du projet de présidentielle et du dialogue en cours, mais la mission risque de s’avérer plus compliquée si le retour des grandes manifestations se confirme et se conjugue à l’ébullition qui s’annonce sur le front social.