Économie

Huile d’olive en Algérie : les prix devraient atteindre 1.500 DA le litre

Le programme de production d’un million de plants d’oliviers lancé par l’Algérie devrait être achevé d’ici à fin 2024, a indiqué mercredi un responsable au ministère de l’Agriculture du Développement rural.

Une annonce faite à l’occasion d’une rencontre avec la presse organisée par l’Association nationale des commerçants et artisans (ANCA) à l’occasion de l’ouverture de la campagne de récolte des olives.

C’est sous le titre « Le marché de l’huile d’olive entre satisfaction de la demande et perspectives d’exportation » que différentes interventions rapportées par l’agence APS ont permis de faire le point sur les progrès réalisés par la filière oléicole.

À cette occasion, Radouane Messaoudi, sous-directeur chargé de l’arboriculture du ministère, a tracé un bilan des actions menées au niveau de la filière algérienne de l’huile d’olive.

Selon le classement du Conseil oléicole international (COIL), l’Algérie occupe le quatrième rang mondial concernant la production d’olives de table et au septième rang concernant les superficies pour la production d’huile d’olive.

Avec une superficie de près de 443.000 hectares répartis sur plusieurs régions du pays, l’olivier représente aujourd’hui 45 % des superficies arboricoles en Algérie.

Avec seulement 160.000 hectares plantés avant 2000, le but affiché par le ministère est d’arriver à la plantation d’un million d’hectares à l’horizon 2030.

Actuellement la production annuelle d’huile d’olive de l’Algérie est estimée à 100 millions de litres, a indiqué Redouane Messaoudi.

Une production obtenue à partir de 48 millions d’oliviers, bien que le nombre total soit de 65 millions d’arbres. Cependant, une partie des oliviers n’est pas entrée en production ou ne produisent qu’une année sur deux du fait du mécanisme de l’alternance.

Sur un total de plus de 9 millions de quintaux d’oliviers, 3 millions concernent les olives de table et plus de 6 millions celles destinées à l’obtention d’huile d’olives.

Autre aspect relevé par Radouane Messaoud : « L’Algérie dispose à ce jour de plus de 48 variétés d’oliviers inscrites au catalogue officiel », un atout pour s’adapter à la sécheresse.

Huile d’olive au Maghreb : les pays en ordre dispersé

En Algérie, le prix de l’huile d’olive devrait être élevé cette saison. Une situation identique dans les pays voisins. Au Maroc, la sécheresse a entraîné le dépérissement de certaines oliveraies. Quant à la Tunisie, le pays donne la priorité à l’exécution de ses contrats d’exportations vers l’Europe au détriment du marché intérieur.

Selon l’expert Ahmed Malha qui a eu l’occasion d’intervenir mercredi, « cette année, l‘huile d’olive sera chère et on n’en trouvera pas. Elle sera plus chère que l’an passé ».

Il a pronostiqué un prix de 1.500 DA le litre, ce qui a fait réagir la salle. En réponse, ce spécialiste a rappelé que le prix de revient, sans compter toutes les charges des agriculteurs, atteint 1.500 DA par litre et que du fait de l’effet négatif des hautes températures du printemps, la récolte de l’huile de cette année devrait être faible en Algérie.

Ce que confirme cet agriculteur sur les réseaux sociaux, sur ses 300 oliviers, seuls une dizaine ont eu une fructification satisfaisante. En cause le sirocco survenu lors de la floraison et du dessèchement des fleurs qui s’en est suivi.

« Vu la chute de la production qui est de 30 % environ, oui on peut s’attendre à une augmentation des tarifs partout dans le monde », complète Hakim Alileche, investisseur et propriétaire de la marque premium d’huile d’olive Dahbia qui a été primée plusieurs fois à l’international.

En plus de la baisse de la production en raison de la sécheresse, Hakim Alileche anticipe une baisse des rendements à la trituration des olives. « Les olives coûtent chère cette année, les rendements vont baisser », explique-t-il à TSA.

L’année passée, l’huile d’olive ordinaire se vendait au prix moyen de 1.000 dinars le kilo. Un petit producteur de la région de Béjaia anticipe une hausse des prix de 20 % cette année, en raison de la baisse de la production.

« Dans mes champs, les oliviers sont rares cette année. C’est lié à l’alternance de la production, mais aussi à la sécheresse qui a sévi au printemps dernier », explique-t-il.

Ahmed Malha a rappelé qu’en Tunisie la demande en huile et en olives est si élevée que l’année passée, les consommateurs tunisiens n’ont pas hésité à venir s’approvisionner en Algérie en achetant de l’huile à 25 dinars tunisiens le litre soit 1.000 DA au taux officiel.

Il a ajouté que, face au manque d’olives, « cette année, dans les régions frontalières, des moulins tunisiens achètent des olives car ce pays est engagé dans des opérations d’exportation ».

Aussi a-t-il préconisé l’augmentation des surfaces et notamment les plantations en super-intensif tel que cela se pratique à l’étranger. Une pratique gourmande en eau. Il a par ailleurs préconisé pour les zones de montagne le greffage des oléastres (oliviers sauvages) avec des variétés d’oliviers productifs.

Une situation difficile également confirmée lors d’une réunion de la Commission tunisienne d’organisation et de suivi de la campagne oléicole 2024-2025.

À cette occasion, le ministre tunisien de l’Agriculture, Ezzedine Ben Cheikh, a indiqué que la production devrait être de 340.000 tonnes d’huile d’olive en 2024.

Il a insisté sur l’importance du marché local concurrencé par l’exportation, une activité qui « aide à soulager le déficit de la balance commerciale et assure des rentrées importantes de devises » à la Tunisie, note la presse locale. Cependant, l’huile d’olive flambe sur le marché intérieur tunisien.

Au Maroc, « l’agonie des oliveraies »

Au Maroc, la situation des oliveraies est grave. Fin août, le média Le360 n’hésitait pas à parler « d’agonie des oliveraies ».

En cause des « productions en baisse et une sécheresse persistante », en conséquence « la filière vacille » selon la même source qui donne la parole à Rachid Benali, le président de la Fédération interprofessionnelle marocaine de l’olive (Interolive).

Celui-ci annonce une année qui va être « très difficile ». Il témoigne du spectacle de désolation qu’offrent les oliveraies en différents points du Maroc : « Les arbres, qui croulaient sous les olives, se tiennent maintenant, dépouillés et squelettiques, sur une terre fissurée. Des feuilles mortes jonchent le sol, emportées par un vent chaud et sec qui ne fait qu’aggraver la scène de dévastation ».

Face au manque de pluies, les conditions d’irrigation se sont dégradées, les agriculteurs ont dû irriguer pendant 8 mois contre 4 à 5 habituellement : « Ceux qui pompaient de l’eau à 100 mètres de profondeur doivent maintenant la puiser à 200 mètres, ce qui a triplé les coûts énergétiques », confie le professionnel.

Toujours au Maroc, la faible production de cette année a fait exploser les coûts de la main d’œuvre : « Alors qu’on payait entre 1,2 et 1,5 dirham le kilo récolté, ce coût est désormais monté à plus de 3 dirhams le kilo, car les ouvriers sont confrontés à une récolte beaucoup plus difficile », détaille Rachid Benali.

Résultat, des prix qui montent en flèche pour atteindre le 150 dirhams le litre, soit 15 euros (2200 dinars algériens au taux officiel de l’euro qui est de 146 dinars l’unité) et ce professionnel évoque la possibilité de devoir importer de l’huile d’olive pour répondre à la demande du marché local.

Près de Marrakech, Omar Benchekroun possède 30 hectares d’oliviers et poursuit la plantation en hyper intensif d’une quinzaine d’autres hectares. Il bénéficie pour cela d’un forage et a construit un bassin de la taille d’un terrain de football. L’irrigation est localisée et utilise la technique du goutte à goutte.

Par contre à Loudaya, près de Marrakech, Mustapha Elghazouni et Saïd Elmaoumouri n’ont pas cette chance. Ces petits agriculteurs n’ont plus accès à l’eau et leurs oliviers menés de façon traditionnelle sont entièrement desséchés.

Après les céréales, les oliviers subissent les effets de la sécheresse. Celle-ci réduit le calibre des olives, mais plus grave, quelques jours de sirocco au printemps et les fleurs se dessèchent puis avortent. Une situation qui interpelle la filière oléicole dans l’ensemble des pays du Maghreb.

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