ENTRETIEN. Me Mohamed Sai est le président de l’Union nationale des ordres des avocats d’Algérie.
Le général Ahmed Gaïd Salah s’est exprimé une nouvelle fois sur la situation politique. Comment avez-vous trouvé son discours ?
Il dit qu’il reste dans le cadre de la Constitution mais que d’autres voies sont possibles. C’est-à-dire qu’il accepte une solution politique à la crise. C’est une avancée considérable puisque la voie constitutionnelle à elle seule ne peut pas résoudre la crise. Gaïd Salah va dans le sens d’associer les partenaires politiques surtout ceux du mouvement populaire pour trouver un agenda crédible accepté par la population.
Gaïd Salah s’est engagé au nom de l’armée à protéger les manifestants lors des marches pacifiques. Qui a donné l’ordre de réprimer les manifestants ?
Nous saluons cette déclaration à propos de la répression qui n’est pas acceptée. Il faut que cette atteinte grave au droit de manifester cesse. Il faut situer la responsabilité entre les exécutants et l’ordonnateur de cette répression. Si vraiment des ordres sont venus d’en haut pour réprimer les manifestants, il faut que des mesures soient prises.
Gaïd Salah a demandé à la justice d’aller dans la lutte contre la corruption. Est-ce que c’est une bonne chose ?
A mon avis, la justice doit travailler dans la sérénité. S’il y a des pressions qui s’exercent sur elle, la justice ne fera pas son travail comme il se doit. La justice ne doit jamais travailler sous la pression ou sous des injonctions d’où qu’elles viennent, elle doit travailler en toute indépendance.
Allez-vous participer aux élections présidentielles prévues le 4 juillet prochain ?
L’union des avocats que je représente a rendu public un communiqué pour dire que nous n’acceptons pas les élections dans les conditions actuelles. Il faut tout d’abord réunir les conditions nécessaires c’est-à-dire le départ du gouvernement pour organiser des élections crédibles et transparentes. Et quand les conditions idoines seront réunies les avocats comme l’ensemble des citoyens pourront y prendre part.
Tayeb Belaïz a démissionné, qui doit suivre ?
C’était une démission attendue en réponse à l’exigence de la rue concernant les 3B. C’est une démission que je salue. On demande aussi que les autres tenants du pouvoir partent pour que la transition se fasse avec d’autres figures. Les démissions attendues pour l’apaisement de la situation sont celles entre autres du gouvernement et de Bensalah.
Me Mustapha Bouchachi a pris part aujourd’hui à une rencontre de l’opposition au cours de laquelle il a proposé la mise sur pied d’une instance présidentielle. Partagez-vous cette proposition ?
Je suis parfaitement d’accord. Il faut trouver une instance collégiale pour diriger la transition et ce avec des hommes que la rue va accepter. Une fois installée, cette instance doit désigner un gouvernement crédible avec des prérogatives larges, réviser la loi électorale et désigner une commission de supervision des élections. C’est ainsi que nous pourrions rassurer la population sur la transparence des élections.
Des militantes affirment avoir été dénudées dans un commissariat à Alger. Quelle est votre réaction ?
On appelle à l’ouverture d’une enquête crédible pour situer les responsabilités et sanctionner les auteurs de ce délit. C’est une situation qu’il convient de condamner de façon énergique en ce sens qu’elle constitue une grave atteinte à l’intégrité physique de nos concitoyennes et aussi une atteinte aux droits de l’Homme.