Les contours de la politique du nouveau président de la République devraient se dessiner avec un peu plus de clarté dès ce jeudi 19 décembre. Abdelmadjid Tebboune prêtera serment aujourd’hui et son discours d’investiture est très attendu.
Vendredi, soit le jour même de la proclamation des résultats de l’élection qu’il a remportée dès le premier tour, Tebboune avait tenu un point de presse au cours duquel il avait laissé entrevoir de bonnes intentions notamment vis-à-vis du hirak populaire qu’il a appelé au dialogue. Il avait globalement tenu un discours rassurant, apaisé, sans trop de langue de bois et tranchant avec les menaces auxquelles a eu jusque-là droit le mouvement populaire.
Mais ses propos, relève-t-on, il les avait tenus dans l’euphorie de la victoire et beaucoup de ses réponses concernant la situation politique ou d’autres questions, pouvaient être improvisées.
C’est donc à travers son discours d’investiture, élaboré à tête reposée et qui sera prononcé avec beaucoup de solennité, que l’on pourra cerner la nature de ses chantiers et les décisions qu’il compte prendre dans l’immédiat.
On sait déjà, à travers sa campagne électorale, que ses trois priorités seront la révision de la Constitution, l’adoption d’une nouvelle loi électorale et la réparation des injustices de « l’ancien système ».
Mais le nouveau chef de l’État sera attendu particulièrement sur un autre point qui est plus qu’une priorité, une urgence : régler la crise politique en cours et convaincre les manifestants de mettre fin aux marches hebdomadaires.
Lui et les autres candidats s’étaient engagés à satisfaire les « revendications légitimes du hirak » et même les autorités de la transition avaient laissé entendre qu’il appartiendra au futur président de la République de continuer la concrétisation des aspirations de la rue.
Sans doute, et pour rester cohérent avec ses premières déclarations après son élection, Abdelmadjid Tebboune le réitérera à l’occasion de son premier discours de président, de même qu’il relancera son appel au dialogue avec peut-être plus de clarté, maintenant qu’il dispose d’éléments supplémentaires grâce aux réactions suscitées par sa première conférence de presse.
La teneur de ce premier discours et les termes qu’emploiera le nouveau chef de l’État seront plus qu’importants pour la suite des événements. Dans la semaine, les réactions, que ce soit à son élection ou à son appel au dialogue, ont convenu que Tebboune doit envoyer des messages forts.
La gravité de la situation et la manière avec laquelle il a été élu l’exigent. Le nouveau président sait déjà que l’élection présidentielle, présentée comme la solution miracle à la crise, n’a rien réglé.
Les premiers vendredi et mardi qui ont suivi sa tenue n’ont rien différé des précédents, sinon par la nouveauté des slogans, inspirés de l’élection contestée de Abdelmadjid Tebboune. Plus clairement, le hirak ne compte pas s’arrêter.
À moins donc de massages forts et surtout de gestes concrets allant dans le sens de la mise en œuvre véritable de ses aspirations, à commencer par la libération de tous les détenus d’opinion, l’arrêt du harcèlement des activistes et des manifestants, l’ouverture du champ politique et médiatique…
Il est attendu du nouveau président, dès son discours d’investiture, un engagement ferme dans ce sens, sans quoi beaucoup continueront à voir dans son appel au dialogue une énième manœuvre destinée à diviser et à gagner du temps.
Abdelmadjid Tebboune devrait aussi s’attarder sur ce que sera sa politique économique dans une conjoncture qui ne s’annonce pas rose. Là aussi, des mesures concrètes et une orientation claires sont souhaitées pour rassurer et les investisseurs et les franges de la société de plus en plus nombreuses à s’inquiéter de l’impact de la crise qui risque de s’aggraver dangereusement.
Cela dit, le premier véritable test pour Tebboune n’interviendra que dans quelques jours, avec ses premières actions, car les Algériens veulent des actes et ne croient plus aux promesses, et éventuellement avec l’annonce du nom du nouveau Premier ministre et de la composante de son gouvernement. On saura alors vers quoi se dirige réellement l’Algérie.