L’immigration est-elle bonne ou mauvaise pour la France ? Un projet de loi Immigration est en cours d’élaboration et a pour premier objectif de faire un grand ménage dans l’immigration.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et le ministre du Travail Olivier Dussopt ont présenté la semaine dernière les grandes lignes d’une loi « Immigration » pour la France.
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Les deux ministres se sont réunis pour redéfinir l’immigration dont le pays a réellement besoin. Puisque désormais c’est ce dont la France parle, l’immigration choisie, avec des profils précis qui pourront rejoindre temporairement le territoire français.
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L’immigration sera liée au travail, c’est en substance la principale mesure que défendent ces deux ministères majeurs du gouvernement français.
Ce projet de loi sera soumis à l’Assemblée nationale début 2023 afin d’être adopté dès les premiers mois de l’année. Mais avant d’être soumis au vote, des débats avec les groupes politiques et les acteurs impliqués dans le projet de loi vont avoir lieu à partir du 21 novembre prochain.
Cette immigration que la France rejette en bloc
Une grande loi autour de l’immigration. Il s’agissait d’un projet que l’on sentait arriver. Grand thème de débat aussi bien lors de la dernière présidentielle comme lors des législatives, l’immigration et l’asile des réfugiés sont, depuis le début de l’année 2022, sur les lèvres de tous les groupes politiques. Mais c’est surtout une actualité pressante, dont un terrible fait divers, le meurtre de Lola, qui a pressé l’agenda du gouvernement français.
L’implication de Dahbia, une Algérienne présumée coupable du meurtre de la jeune fille, a souligné le problème des errances de certains immigrés en situation irrégulière.
Notamment ceux ayant reçu une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) comme ce fut le cas pour Dahbia. C’est dans ce même contexte, qu’Emmanuel Macron a expliqué fin octobre, que “la moitié” des actes de délinquance à Paris est attribuable à des étrangers.
La loi Immigration a donc pour premier objectif de faire un grand ménage dans l’immigration. Gérald Darmanin évoquait dans une grande interview accordée au Monde une notion “d’équilibre”.
Il était allé jusqu’à simplifier sa politique : “Je dirais qu’on doit désormais être méchants avec les méchants et gentils avec les gentils”. Laissant penser que les étrangers se divisent en deux camps : ceux que l’on doit chasser car ils sont potentiellement dangereux et ceux qui méritent leur place sous conditions.
En somme, ce que le ministre de l’Intérieur explique c’est qu’il ne fera aucune concession avec l’immigration clandestine. Les personnes faisant l’objet d’une OQTF seront placées sur le fichier des personnes recherchées alors qu’auparavant elles pouvaient disparaître dans la nature.
Ces mêmes personnes seront aussi privées de prestations sociales. Les OQTF, en général, seront d’ailleurs facilitées et accélérées car aujourd’hui elles peuvent être bloquées par une série de recours.
Rendre l’immigration utile au marché du travail français
À l’inverse, le projet de loi proposé veut favoriser un autre type d’immigration : professionnelle pour répondre aux secteurs en tension en France. Un titre de séjour “métier en tension” a d’ailleurs été évoqué.
Le ministre du Travail Olivier Dussopt évoque des secteurs “comme ceux du bâtiment”, où “le travailleur immigré en situation irrégulière puisse solliciter la possibilité de rester sur le territoire sans passer par l’employeur”.
Cette famille de métier a souvent recours à des employés en situation irrégulière, qui sont employés à des salaires faibles et dans des conditions de travail dangereuses.
Mais il ne s’agit pas du seul secteur en pénurie de travailleurs en France. Même si les deux ministres ne l’ont pas évoqué, on peut citer le monde médical, la France dispose d’un nombre conséquent de déserts médicaux, où aucun médecin ou spécialiste n’est disponible.
L’informatique et ses nouveaux métiers sont également en perpétuelle tension. Mais il faut aussi compter sur les métiers de l’enseignement, l’agriculture, le service aux personnes, la mécanique automobile, l’artisanat, etc.
Plus symboliquement, certains métiers ne sont pas en pénurie mais apportent un atout majeur à la France. On pense aux sports avec des sportifs de haut niveau issus de l’immigration. À quelques semaines de la Coupe du Monde où jouera une équipe de France sous le signe de la diversité et après l’attribution du ballon d’or à Karim Benzema, fils d’immigrés algériens, on peut se poser la question. Est-ce une immigration utile ? Tous ces secteurs n’ont pas été évoqués par les deux ministres.
Une autre interrogation se pose. Il s’agit d’un titre de séjour dont on connaît la durée. Que se passera-t-il au moment de renouveler ce document, si le secteur professionnel du demandeur n’est plus en pénurie ? À la fin d’un contrat de travail ? Un demandeur de titre de séjour peut-il être expulsé après avoir accompli sa mission ?
Une vision de l’immigration rejetée par l’extrême-droite comme l’extrême-gauche
La volonté d’utiliser les immigrés et demandeurs d’asile comme seul compromis à l’immigration semblait pourtant être un moyen de rallier la droite au gouvernement.
Mais l’annonce de ce projet n’a pas eu l’effet escompté. Au contraire, l’ensemble de la droite a largement critiqué ces propositions. Côté Les Républicains (LR), on dénonce une régularisation de sans-papiers à tout va.
“C’est une forme de supercherie pour aller, une nouvelle fois, vers une régularisation“, estime le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti.
L’extrême-droite n’est pas plus convaincue. “Derrière le ‘titre de séjour métiers en tension’ de Gérald Darmanin, il y a en réalité un droit à la régularisation, véritable appel d’air pour des milliers de migrants. La solution viable pour les métiers en tension, c’est la revalorisation des salaires, pas l’immigration massive“, a expliqué Jordan Bardella, le nouveau président du Rassemblement national sur Twitter.
Le parti d’extrême-droite veut tout simplement l’arrêt de l’immigration extra-européenne. L’extrême-droite appelle surtout à revaloriser les salaires afin d’embaucher des Français avant tout.
Pour Fabien Roussel, le leader du Parti Communiste, la régularisation dans ce cadre et l’immigration professionnelle sont aussi discutables mais pour d’autres raisons. Puisque les métiers en tension désignés, sont, selon lui, souvent difficiles et mal payés. Une manière honteuse d’offrir à des secteurs sinistrés et des métiers précaires des humains à leur merci, pour ne pas donner des salaires décents et des conditions de travail correctes.
Difficile de réunir une majorité pour ce projet de loi, quand le cœur du projet est décrié de tous les côtés. Puisque finalement, la droite et l’extrême-droite ne semblent vouloir conserver que la partie expulsion. La gauche rejette l’ensemble des dispositions.
Au sein même de la société civile, on décrie une gestion de l’immigration plus que contestable. Cette politique de mise à l’écart est également dénoncée par 26 associations et ONG.
Parmi elles, Amnesty International, la Ligue des Droits de l’Homme ou Médecins du Monde, critiquent le positionnement du gouvernement français et évoquent une “stigmatisation” des immigrés et demandeurs d’asile. Ce positionnement politique mettrait l’ensemble des étrangers dans le sac des délinquants, estiment-elles.
Les débats autour du projet de loi Immigration risquent d’être houleux. Difficile d’imaginer que la France accouchera en quelques semaines d’une réglementation qui fera l’unanimité.