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Immunité après Omicron, séquelles covid long : entretien avec le Pr Djenouhat

Immunité après Omicron, séquelles covid long : entretien avec le Pr Djenouhat

Le Pr. Kamel Djenouhat, président de la Société algérienne d’immunologie et chef de service du laboratoire central EPH Rouïba, revient dans cet entretien sur la baisse du nombre de contaminations au Covid-19 en Algérie, sur les séquelles d’un « Covid long », l’immunité après l’infection à l’Omicron, la décision de fermer les écoles, la vaccination…

Les contaminations au Covid-19 en Algérie sont en baisse depuis le pic atteint mardi 25 janvier. La décrue de la quatrième vague est-elle amorcée?

Nous sommes en pleine décrue. Cela fait une semaine que nous avons atteint le pic. C’était mardi 25 janvier avec plus de 2500 nouveaux cas en 24 heures.

Depuis, nous voyons très bien que le chiffre des contaminations est en train de baisser jour après jour. Mais il y a toujours un décalage entre la courbe des nouveaux cas et la courbe des décès et des cas un peu compliqués. Nous aurons ces jours-ci une augmentation des décès et une augmentation des cas qui nécessitent une réanimation.

Le « petit frère » d’Omicron BA.2 a été identifié en Algérie, a annoncé l’Institut Pasteur d’Algérie dimanche 30 janvier. Les tests classiques de dépistage du Covid-19 permettent-ils de détecter ce nouveau sous-variant ?

Les tests antigéniques et PCR peuvent détecter le BA.2. Par contre, au niveau des laboratoires qui font le criblage pour typer le virus et savoir s’il s’agit du Delta ou de l’Omicron, et en sachant que le sous variant BA.2 ressemble beaucoup plus au Delta qu’à l’Omicron, parfois, le BA.2 est confondu avec le Delta alors qu’il s’agit d’un Omicron.

Ce qui est rassurant est que les tests antigéniques et la PCR classique peuvent détecter tous les variants.

Le BA.2 est-il plus contagieux que l’Omicron ?

Le BA.2 ne dérive pas de l’Omicron classique (BA.1). Ce sont deux variants qui sont apparus en même temps, à dix jours de décalage, dans des endroits différents. Le BA.1 en Afrique du Sud et le BA.2 au Danemark.

C’est un pays qui séquence toutes les PCR positives. 100% des PCR positives sont séquencées là-bas. C’est le premier pays classé dans le monde par rapport à la cadence de séquençage.

Mais les experts suspectent beaucoup plus une origine aux Philippines et en Inde. Les deux apparaissent en même temps, les deux ont la même symptomatologie et les deux ont des formes moins graves que le Delta et les souches précédentes. Mais le BA.2 est 1,5 fois plus contagieux que le BA.1. Par rapport à l’Omicron classique BA.1, la transmission est de 150%.

Les autotests Covid-19 sont  désormais disponibles dans les pharmacies algériennes. Ces tests vendus en officine sont-ils fiables ?

Ce qui est rassurant est que les tests qui sont disponibles sur le marché sont fiables. C’est une fiabilité un peu variable, mais ils restent  fiables. La plupart des tests ont une sensibilité de plus de 80%.

Le problème est qu’il y a un certain nombre de tests qui prennent un peu de temps pour se positiver, parfois cinq jours après le début de la symptomatologie. Nous n’étions pas habitués à ce genre de cas.

Généralement, c’est du premier au cinquième jour de la symptomatologie. Omicron a changé la donne, y compris en rapport avec la persistance de la positivité. Ces tests peuvent rester positifs jusqu’à dix jours.

La PCR est beaucoup plus sensible. Parfois, les deux premiers jours, on peut avoir une PCR positive alors que le test antigénique est négatif.

Qu’en est-il du personnel soignant ? Il semble avoir été particulièrement touché par cette nouvelle vague de contamination ?

Cette semaine est marquée par la reprise de presque la moitié du personnel qui était atteint. Ils ont repris leurs postes. Il est vrai qu’il y a toujours cette fatigue. Ce qui est tout à fait normal.

Mais nous n’avions pas le choix. En ce qui concerne les séquelles, que ce soit Omicron ou les autres variants, le Covid « long » sera là et les séquelles seront là.

Quelles sont les séquelles d’un « Covid long » ? 

Plus de 10% des malades qui font le Covid ont des séquelles neurologiques, psychiatriques, cardiaques, rénales, un diabète persistant, une fatigue qui persiste pendant plusieurs jours, un essoufflement… Après la pandémie, nous aurons une autre pandémie de Covid long.

Il y a actuellement des tensions sur certains médicaments. L’automédication et les prescriptions médicales sont pointées du doigt…

On est habitués à prescrire des photocopies d’ordonnances (en Algérie). L’Omicron n’est pas très dangereux par rapport aux variants précédents. Dans les pays développés, on ne donne rien.

En cas de contamination à l’Omicron, c’est le repos pendant quelques jours, et en cas de fièvre, prendre du Paracétamol. Chez nous, nous sommes en train d’assister à cet abus de prescription de corticoïdes, d’anticoagulants, d’antibiotiques et parfois cela va même jusqu’à l’automédication.

Dans notre unité de microbiologie à Rouïba, nous sommes déjà en train de vivre les conséquences de cela. Déjà, après la deuxième vague, nous avions constaté une augmentation de la résistance aux antibiotiques par rapport à ce que nous avions avant.

Ces prescriptions abusives sont-elles à l’origine des tensions sur les médicaments?

Exactement. Ce sont les conséquences du nombre de prescriptions. Il faut arrêter cela. Il y a aussi les conséquences sur le plan du budget de l’Etat…

Est-on immunisé après une infection au covid-19 ?

On l’est mais le problème qui se pose est en rapport avec la durée de l’immunité. Les dernières études ont montré que l’infection naturelle immunise très bien. On souhaite que d’ici quelques semaines on dépassera probablement les 90% de personnes infectées. Ce sera une infection naturelle obligatoire. On espère voir les retombées positives de cette vague.

Pour freiner la vague Omicron en Algérie, il a été décidé de fermer les écoles du 20 janvier au 5 février. Que pensez-vous de cette mesure ?

C’est un avis personnel, et de l’avis de la plupart des experts dans le monde, ils regrettent d’avoir fermé les écoles et disent que si c’était à refaire, ils ne toucheraient jamais à l’éducation.

C’est vrai que l’on ne connaissait pas bien le virus au début. L’Unicef vient d’émettre un rapport au sujet des conséquences néfastes sur la santé mentale et sur le comportement des enfants.

Les enfants peuvent être touchés par le Covid. Ils ne font que rarement des formes graves et il y a exceptionnellement des décès. Je pense qu’on doit retourner le plus vite à une vie normale.

Cette notion de déclarer une classe ou une école cluster, nous n’avons plus le droit d’aller vers cela. On va probablement s’aligner avec les adultes. Si l’élève ou l’enseignant est malade, il doit se reposer pendant quelques jours. C’est mon avis personnel. Les décisions d’arrêter l’école sont politiques.

Les Algériens peuvent-ils espérer un retour à une vie normale ?

Je suis optimiste. Je pense qu’il y aura transformation de la situation pandémique à une situation endémique. Nous devons vivre avec ce virus.

Nous n’avons pas le choix. C’est un virus qui sera certainement moins transmissible, moins dangereux. Nous aurons moins de vagues. Il va probablement s’allier avec les autres coronavirus avec lesquels on vit depuis des décennies.

Faut-il continuer à se faire vacciner ou bien doit-on miser sur l’immunité collective?

Il y a la voie Omicron et l’après Omicron. En ce qui concerne Omicron, j’ai toujours été de ceux qui défendent la vaccination. Pour l’après Omicron, on voit que des firmes telles que Pfizer ou Moderna, vont changer leurs vaccins parce qu’ils savent que leur efficacité a beaucoup diminué par rapport à l’Omicron.

Ils préparent actuellement la version Omicron du vaccin. Je pense que la pandémie va se transformer en endémie et que probablement seules les personnes vulnérables et ciblées devront continuer à se faire vacciner. Cela reste un avis personnel uniquement.

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