Le Groupement des concessionnaires automobiles (GCA) a saisi le 31 janvier dernier le médiateur de la République, à propos du retard pris pour la libération du cahier des charges relatif à l’importation de véhicules neufs.
Le ministre de l’Industrie, Ahmed Zeghdar, avait promis, début décembre dernier, qu’il allait être fin prêt pour le mois de janvier.
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Le GCA a, dans sa doléance, fait état de pertes subies par ses adhérents évaluées à 1.000 milliards de dinars. Les deux sorties publiques récentes du ministre de l’Industrie au Parlement et ensuite sur les ondes de la Radio algérienne n’ont pas rassuré les concessionnaires.
Pire, le GCA s’inquiète même que les déclarations du ministre ne soient en fait le signal d’un abandon pur et simple de l’importation de véhicules neufs. Récapitulons.
Le 9 décembre, le président de la République a ordonné une nouvelle révision du cahier des charges et l’accélération du processus d’octroi des agréments aux concessionnaires automobiles.
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Le ministre de l’Industrie a, dans un entretien à la Télévision algérienne, affirmé que le cahier des charges allait être fin prêt en janvier 2022 et que la remise des agréments aura lieu aussitôt. Le directeur des ressources humaines du ministère de l’Industrie a, au lendemain de l’annonce de son ministre, repoussé l’échéance au mois de mars, avant que le ministre ne le recadre en maintenant le calendrier initial.
Devant une échéance sans cesse repoussée, le Groupement des concessionnaires algériens a adressé, le 11 février, un courrier au ministre de l’Industrie.
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Dans leur requête, les adhérents du GCA se disent « surpris et consternés » par les déclarations d’Ahmed Zeghdar, faites jeudi dernier devant les sénateurs et quelques jours auparavant à la Radio algérienne.
Des déclarations, souligne le GCA, qui suggèrent que « l’importation de véhicules neufs ne sera de sitôt », ajoutant que les déclarations du ministre sont en « porte-à-faux » avec les instructions du président de la République, en décembre dernier.
« Pourquoi retarder la libération des importations des voitures neuves ? Qui bénéficie de l’interdiction de laisser des véhicules entrer sur le marché national ? Et comment se fait-il que le traitement des dossiers et la commission de recours prennent autant de temps dans l’examen de 73 dossiers et 46 recours ? », égrène le GCA dans sa lettre. Le groupement estime qu’il est inconcevable qu’aucun dossier parmi les 73 déposés n’aie satisfait aux exigences du cahier de charges.
Le Groupement des concessionnaires a exprimé au ministre la colère de ses adhérents quant au retard pris pour la libération des licences d’importations de véhicules neufs.
Une mesure « gelée depuis 2020 sans raison claire », s’offusquent les membres du GCA qui déplore que la commission technique interministérielle, chargée d’examiner les dossiers, ait dépassé le délai réglementaire « de 20 jours au maximum ».
Les concessionnaires interpellent le ministre de l’Industrie au sujet du sort des 8 dossiers sur lesquels des réserves ont été émises, au mois de décembre dernier.
La situation de statu quo qui caractérise le marché de l’automobile a engendré un manque chronique en offres en voitures, de pièces de rechange et perturbé les prestations d’après-vente, le GCA s’inquiétant de l’ampleur prise par le marché informel de la pièce de rechange contrefaite.
« Il ne faut pas induire en erreur la population »
Répondant au ministre, le GCA pointe l’ « absence d’une véritable volonté de votre ministère » en vue de délivrer les agréments pour l’importation de véhicules neufs.
En conséquence de quoi, le GCA et ses 80 adhérents ont décidé de geler leurs activités et de remercier leurs salariés, en sus de geler le paiement des impôts, taxes et l’IRG (impôt sur le revenu global).
Le GCA annonce que chaque concessionnaire dépense plus de cinq millions de dinars mensuellement, comprenant le paiement de la location du foncier, les salaires et l’acquittement des différentes taxes et impôts. Cela sans pour autant se voir attribuer d’agrément. Un fait que les concessionnaires vivent comme une injustice au vu des efforts fournis pour maintenir l’activité.
Le GCA a rebondi sur l’annonce d’Ahmed Zeghdar selon laquelle le citoyen peut importer lui-même son véhicule, en affirmant que l’acquéreur potentiel ne manquera pas de se heurter à une multitude d’écueils bureaucratiques. Et de mentionner le recours inéluctable au marché noir de la devise au mépris des orientations du gouvernement relatives à la transparence des transactions financières.
Le Groupement des concessionnaires interpelle le ministre de l’Industrie sur les raisons derrière les révisions successives du cahier de charges, ajoutant que les concessionnaires peuvent satisfaire aux dispositions de l’actuel cahier. Et de regretter que les réserves soulevées n’ont aucune existence.
« Un temps on invoque le terrain à vocation agricole, un autre les caméras de surveillance…Pour enfin faire revenir le dossier au point zéro et son remplacement par un autre cahier de charges », peut-on lire dans la lettre du GCA au ministre de l’Industrie.
Sur les ambitions du ministre de relancer une industrie automobile, le GCA se montre sceptique. « L’industrie automobile est un processus au souffle long. La fabrication de la première voiture algérienne ne se fera pas avant 2026 », avance le GCA décrivant un processus long et complexe.
« Il ne faut pas induire en erreur la population : atteindre un taux d’intégration de 40 % en un laps de temps court est impossible », lance le GCA qui redoute un remake de la première expérience qui a été un flop total.