Un journaliste d’Echorouk a été placé sous mandat de dépôt jeudi 8 septembre après la publication d’un article sur l’exportation de dattes, mercredi 7 septembre.
Dans son article, Belkacem Houam a rapporté que le ministère du Commerce a décidé d’interdire l’exportation de dattes après le retrait de lots de ce fruit en France, notamment à cause d’un pesticide interdit en Europe. Le département de Kamel Rezig a aussitôt réagi en apportant un démenti formel et en annonçant des poursuites judiciaires contre l’auteur de l’article et le journal Echorouk.
L’incarcération de Belkacem Houam a suscité une vague d’indignation et de condamnations parmi les journalistes et les hommes politiques. Pour Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la Communication, la liberté d’expression en Algérie est « menacée par la persistance du harcèlement politique et judiciaire ».
« Je suis choqué »
« Je suis choqué d’apprendre l’arrestation et l’emprisonnement du journaliste d’Echorouk Belkacem Houam pour avoir publié une information que le gouvernement était en droit de démentir dans les formes en usage dans tous les médias du monde moderne », a dénoncé Abdelaziz Rahabi dans une déclaration adressée à TSA.
L’ex-ambassadeur d’Algérie à Madrid estime que « la privation de liberté suite à la publication d’une information de pure nature commerciale est la preuve de la persistance de l’instrumentalisation politique de la justice et relève de pratiques d’un autre âge que l’on pensait révolu. »
Pour Rahabi, cette incarcération « ne constitue pas un acte isolé dans la mesure où elle fait suite à l’emprisonnement de deux journalistes de Liberté pour des motifs qui relèvent du harcèlement politique contre un quotidien contraint à la disparition. »
Il ajoute que le quotidien El Watan « subit les mêmes pressions et pourrait à son tour disparaître d’un champ médiatique réduit à sa plus simple expression de porte-parole de la voix officielle sans impact réel sur une opinion publique avertie et plus mondialisée que ses dirigeants. »
Abdelaziz Rahabi termine sa réaction en faisant remarquer que le « pays se construit dans la pluralité, la justice et la liberté d’expression, garants de la dignité humaine ».
« Notre gouvernement doit apprendre à accepter que la société lui exige de rendre des comptes au lieu d’exhiber un autoritarisme expérimenté sans succès par les pouvoirs qui l’ont précédé », a-t-il dit.
« Indicateur inquiétant »
Par la voix de son président Abderrazak Makri, le MSP a condamné le « recours abusif à la détention provisoire, avant l’achèvement des procédures relatives à un procès équitable ».
« Ce qui a été annoncé comme motif d’arrestation du journaliste touche à la liberté d’opinion et d’expression, et qu’il suffit que la partie lésée use du droit de réponse, et non de recourir à la justice pour le faire », a estimé le MSP.
Le premier parti d’opposition au Parlement ajoute que le « journaliste a le droit de traiter toute question qui intéresse l’opinion publique nationale, et il a le droit de ne pas divulguer la source de ses informations, comme le garantit la constitution, qui interdit la privation de liberté du journaliste ».
Pour le MSP, la « répétition de telles pratiques confirme la « détérioration constatée » dans le domaine des droits de l’homme en Algérie, et le recul des acquis dans le domaine de la liberté d’opinion, d’expression et de la presse, ce qui viole les textes constitutionnels, remis en cause les engagements pris par les autorités, et nuit à l’image de l’Algérie ».
Le député Abdelouahab Yagoubi a jugé « inacceptable » l’arrestation du journaliste Belkacem Houam pour avoir « écrit un article sur le refoulement des dattes après un précédent refus d’importantes quantités de pommes de terre exportées, pour non-respect des normes sanitaires ».
« Ces pratiques d’intimidation, cette fermeture de la presse, cette restriction des libertés, la politique de la peur doivent cesser », a-t-il dit, en appelant à la libération immédiate du journaliste incarcéré.
« Ce qui est arrivé au journaliste Belkacem Houam est un indicateur inquiétant de la situation de la liberté de la presse en Algérie », a-t-il dit.