Le Parlement européen s’apprête à débattre de la situation en Algérie et éventuellement adopter une résolution. L’annonce a été faitejeudi passé par le député Raphael Glucksmann et elle a aussitôt fait réagir en Algérie.
Les candidats à la présidentielle du 12 décembre ont été unanimes à dénoncer une velléité d’ingérence étrangère et d’internationalisation de la crise algérienne.
« Le peuple algérien est libre et n’acceptera aucune ingérence dans les affaires intérieures par des parties extérieures, y compris les tentatives de l’Union européenne », a réagi Abdelmadjid Tebboune.
Ali Benflis a indiqué que « la conjoncture actuelle exige la mobilisation et la solidarité de tous » et exhorté « les Algériens à faire preuve d’unité pour défendre le pays ».
Pour Azzedine Mihoubi, « le choix de cette date, la veille de la tenue du scrutin en dit long sur leurs intentions malveillantes ».
Abdelaziz Belaid a lui aussi qualifié la décision du Parlement européen d’ingérence flagrante dans « nos affaires internes », affirmant que « le peuple algérien décidera seul de son destin » et « exprimera, le 12 décembre prochain, sa position en vue de faire sortir le pays de ce tunnel sombre ».
Abdelkader Bengrina a parlé de « laquais au service de leurs maîtres qui ne souhaitent pas voir l’Algérie debout ».
« Lorsque notre pays est en péril, toutes les rancœurs internes doivent se dissiper pour nous dresser, tel un seul homme, face aux ennemis de notre patrie », a-t-il indiqué, appelant lui aussi le peuple à « la mobilisation pour préserver la patrie et refuser que les affaires internes soient débattues au niveau du Parlement européen avec la complicité de leurs suppôts à l’intérieur ».
Ces réactions ne sont pas sans rappeler celles qui avaient suivi le message de soutien au hirak algérien posté fin septembre par un autre député européen, la Belge Marie Arena.
Sur les réseaux sociaux, et même lors des marches populaires, les partisans du hirak ne divergent pas foncièrement avec les candidats et les organisations proches du pouvoir sur le rejet de toute ingérence étrangères.
C’est tout juste si certains prennent la défense des deux députés européens en mettant leurs propos dans la case de la solidarité et non de l’ingérence.
Mais il est reproché, notamment aux cinq postulants à la présidence, leur indignation sélective puisque, dans le message de Raphael Glucksmann, il est fait allusion à une autre ingérence, beaucoup plus grave qu’un débat ou même une résolution de parlementaires : un supposé lobbying de majors pétroliers mondiaux en faveur du pouvoir algérien.
Les noms du Français Total et de l’Italien Eni sont cités. Soit précisément deux multinationales qui se sont invitées dans l’actualité algérienne ces derniers mois.
La première a acquis les parts d’Anadarko pour mettre la main sur près de la moitié de la production algérienne de pétrole. Les intérêts du groupe italien dans le secteur énergétique algérien sont aussi substantiels. L’ENI est l’un des importants acheteurs du gaz algérien.
Les candidats à la présidence auraient gagné en crédibilité en évoquant au moins le sujet ou en interpellant le gouvernement sur les décisions très lourdes qu’il prend à la place de celui d’entre eux qui sortira des urnes. Une indignation sélective qui a du mal à passer.