Après la morosité qui a suivi le forum du dialogue organisé par une partie de l’opposition le 6 juillet, ça bouge de nouveau sur la scène politique. Ce n’est pas encore la sortie de crise mais l’espoir de voir amorcé un dialogue sérieux est de nouveau permis.
L’événement phare de cette fin de semaine qui précède le 21e vendredi c’est la divulgation de la composante du panel proposé par le Forum civil pour le changement, une des dynamiques de la société civile, pour mener une médiation dans le cadre du dialogue annoncé.
A la lecture de la liste de treize personnalités, on ne peut s’empêcher de noter que ceux qui se sont échinés à l’établir ne pouvaient pas faire mieux, puisque ce sont les noms qui reviennent le plus depuis le début des manifestations.
Dix ont donné leur accord de principe et trois autres ont été juste proposées. Il s’agit de Djamila Bouhired, Mouloud Hamrouche et Ahmed Taleb Ibrahimi. Certes, la première nommée a décliné la proposition, estimant qu’on ne peut pas dialoguer dans un climat d’atteinte flagrante aux libertés, et les deux autres ne se sont pas encore exprimé, mais il reste que la liste a toutes les chances de mettre tout le monde d’accord avec la présence de Mustapha Bouchachi, défenseur des droits de l’Homme et proche du hirak, Fatiha Benabou, constitutionnaliste, Smaïl Lalmas, économiste, Lyes Merabet, syndicaliste ou encore Karim Younès, ancien président de l’APN… Ce dernier est d’ailleurs pressenti pour présider l’instance.
Avoir un prolongement dans le hirak, être accepté par la population et le pouvoir, ne pas être impliqué dans des affaires de corruption, ne pas être lié au régime de Bouteflika et n’avoir aucune ambition politique sont les critères fixés par les concepteurs de l’initiative. Le panel qui en est sorti a logiquement toutes les chances de contenter et le pouvoir et une partie des manifestants.
Le chef de l’Etat par intérim a affirmé mardi 16 juillet que les noms des personnalités qui chapeauteront le dialogue annoncé le 3 juillet seront dévoilés incessamment. On ne sait encore rien des dessous de cette coïncidence pas plus qu’on est édifié sur ce que sera la réponse du pouvoir et surtout de Hamrouche et de Ahmed Taleb.
L’initiative est encore au stade de la proposition mais le fait est que c’est la première fois, depuis le début des manifestations il y a cinq mois, que des personnalités d’horizons divers et qui mettent presque tout le monde d’accord, acceptent de s’impliquer directement dans un processus de règlement de la crise.
On voit mal le pouvoir ignorer cette main tendue au moment où tous ses appels au dialogue ont été déclinés. Surtout, dans une conjoncture de blocage quasi-total qui ne laisse que peu de chances à l’aboutissement de la solution constitutionnelle et l’organisation d’une élection présidentielle.
La liste que le chef de l’Etat a promis de dévoiler devrait au moins contenir certains des noms proposés par la société civile, sinon tout le panel puisque les personnalités citées ne peuvent être récusées pour des raisons recevables. Le plus sage est néanmoins d’attendre le choix que fera le pouvoir pour percer ses intentions. Une éventuelle acceptation de la proposition serait sans nul doute le début de quelque chose qui rapprochera le pays de la fin de la crise.
Il ne resterait plus alors qu’à mettre en œuvre les mesures d’apaisement exigées comme préalables par toute la classe politique et réitérées par le forum civil. A contrario, l’initiative aura eu le mérite de mettre le pouvoir face à ses contradictions en lui ôtant l’argument de l’absence d’interlocuteurs et de propositions sérieuses.