L’investissement en Algérie, tant national qu’étranger, stagne. Beaucoup a été dit sur la faible attractivité du climat des affaires et il est unanimement admis que les investisseurs ne se bousculent pas au portillon depuis quelques années.
Mais les récents chiffres révélés par le Premier ministre laissent penser que cela n’est pas tout à fait vrai. C’est-à-dire que des porteurs de projets structurants importants, et en grand nombre, n’attendent que le feu vert de l’administration.
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Devant le Conseil de la nation, Aïmene Benabderrahmane a indiqué lundi 22 novembre que 2500 projets sont en attente de l’aval du Conseil national de l’investissement (CNI).
Le chiffre peut à première vue sembler banal, mais il devient astronomique quand on sait que les projets soumis à l’aval du CNI sont ceux d’un montant dépassant 5 milliards de dinars.
Un simple calcul permet d’obtenir le montant total des investissements qui n’attendent que le feu vert des autorités pour voir le jour : au moins 12.500 milliards de dinars, soit près de 90 milliards de dollars.
C’est presque le montant total des investissements (CNI et hors CNI) réalisés en vingt ans. Dans l’exposé des motifs de la nouvelle loi sur l’investissement qui devrait être présentée prochainement, il est indiqué qu’entre 2002 et septembre 2021, sous l’égide des lois de 2001 et de 2016, il a été enregistré un nombre total de 60.777 projets d’investissement pour 15.411 milliards de dinars.
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Ce chiffre de 90 milliards de dollars ne concerne que les projets soumis à l’approbation du CNI et n’inclut donc pas ceux dont l’investissement est inférieur à 5 milliards de dinars qui, non plus, ne sont pas épargnés par les lenteurs administratives à différents échelons.
Le Premier ministre n’a rien précisé de la nature des projets bloqués où depuis quand ils attendent l’aval de l’administration et encore moins les raisons qui ont fait que de tels projets n’ont pas vu le jour au moment où la promotion de l’investissement est érigée au rang de priorité nationale, dans une conjoncture économique et sociale difficile. On ne sait pas aussi quelle est la part de l’investissement étranger dans les projets concernés.
Le CNI est créé en vertu de l’ordonnance n° 01-03 du 20 août 2001 relative au développement de l’investissement. Il est placé sous l’autorité et la présidence du chef du gouvernement (le poste de Premier ministre a été créé en 2008). L’article de la loi 16-09 du 20 août 2016 relative à la promotion de l’investissement stipule que « l’octroi des avantages aux investissements dont le montant est égal ou supérieur à cinq milliards de dinars (5.000.000.000 DA) est soumis à l’accord préalable du Conseil national de l’investissement ».
Le CNI sera remplacé par un comité intersectoriel
Pour des raisons que M. Benabderrahmane n’a pas évoquées non plus, le CNI ne s’est pas réuni depuis novembre 2019, de même que le Conseil des participations de l’Etat (CPE) qui s’occupe des capitaux publics marchands de l’Etat.
Pourquoi ni Abdelaziz Djerad (Premier ministre entre janvier 2020 et juillet 2021) ni son successeur Aymane Benabderrahmane n’ont réuni le conseil alors qu’un tel nombre de projet est en attente ?
Le Premier ministre n’a pas dit s’il le fera, mais il est très probable que le CNI ne se réunira plus car il n’aura plus d’existence lorsque sera promulguée la nouvelle loi sur l’investissement.
Dans l’exposé des motifs de l’avant-projet, il est indiqué que « la nouvelle loi prévoit la création d’un Comité intersectoriel de l’investissement » qui « reprendra notamment les missions du Conseil national de l’investissement prévues au titre des dispositions précédentes relatives au développement et à la promotion de l’investissement ».
« Ce comité sera chargé, notamment, d’évaluer la politique de l’Etat dans le domaine de l’investissement et d’émettre des avis notamment sur l’éligibilité des investissements structurants et les projets de partenariat stratégique aux avantages prévus par la présente loi, qui seront soumis pour approbation par le conseil interministériel », est-il encore précisé.
Quant à l’objectif de création du CII en remplacement du CNI, c’est la « simplification de la prise en charge des investissements structurants et les projets de partenariat stratégique permettant un traitement rapide et efficace ».