« Si un homme a commis un délit ou un crime, il y a lieu de lui opposer les lois en vigueur. Quand la justice n’a pas été saisie, aucune forme de contrainte ne peut être infligée à un citoyen algérien qui doit bénéficier de tous les droits dont jouissent ses compatriotes ». Ces propos, Saïd Sadi les a tenus en 2005 à propos d’Ali Belhadj. Il les rappelle ce samedi 29 février dans un long texte posté sur sa page Facebook et consacré au débat en cours sur la place du courant islamiste dans le hirak populaire.
« C’est une chose de défendre les droits civiques d’un homme ; et il ne faut jamais hésiter à le faire. C’en est une autre de faire endosser à l’insurrection citoyenne son parcours, ses positions ou ses convictions, bref son bilan ou son projet. Et c’est bien ce qui est en train de se faire », nuance-t-il.
Évoquant plus directement la visite rendue le 22 février par Mustapha Bouchachi, Lakhdar Bouregaâ et Samir Benlarbi à l’ancien numéro 2 du FIS, Sadi parle de « mise en scène médiatique » et égratigne ceux qui, selon lui, se sont « autoproclamés » « figures du hirak ».
« La rencontre en elle-même ne pose pas problème. Mais le traitement confusionnel qui l’a suivie prête à équivoque ; et en politique, soulignons-le encore, la confusion est toujours la racine des pires dangers. On ne décide pas innocemment d’une visite groupée un jour anniversaire d’une révolution pour exprimer une solidarité. Plus grave, on n’impute pas à la révolution ses propres affinités politiques au motif qu’on s’est autoproclamé ‘figure du hirak’. Et à ce propos, la presse indépendante gagnerait à être plus mesurée dans l’attribution des titres et satisfécits », estime l’ancien président du RCD.
Pour lui, il y a « confusion » et « danger » sur la révolution. « Ces dernières semaines, on observe des initiatives et déclarations simultanées et concertées émanant du camp islamiste qui convergent sur des stratégies de diversion. Leur finalité est d’occulter le débat sur les fondamentaux démocratiques afin de dérouter le fleuve citoyen du 22 février et le vider de sa substance. Les islamistes savent que la conquête du pouvoir par la rue leur est désormais impossible. D’où l’idée de perturber l’unité du mouvement démocratique pour s’allier à un pouvoir aux abois qu’ils espèrent ensuite phagocyter à court ou moyen terme », met en garde Saïd Sadi.
Celui-ci met la dernière sortie du président du MSP, sans le citer, sur le compte de la même stratégie. « Ces segments, pourtant hétérogènes, ont tu leurs divergences pour cibler d’une même voix les ‘démocrates, laïcs, alliés de la France, francs-maçons…’. On pourrait rire d’entendre un rejeton d’un courant politique qui a qualifié d’aventure criminelle l’insurrection du premier novembre 1954 accuser de collusion avec la France les fils de la Soummam qui furent les premiers, les plus nombreux et les plus déterminés à prendre les armes contre la puissance coloniale. Sauf que la stratégie de confusion autorise toutes les perfidies, tous les mensonges, tous les coups bas. El ḥarbu xidaɛ », écrit-il, tout en s’interrogeant si l’islamisme politique ne va pas sauver le système pour la troisième fois (après 1963 et 1991).
Pour Sadi, « le problème algérien sera en voie de résolution quand ce qui demeure aujourd’hui une tentation intégriste deviendra un courant conservateur comme il en existe de par le monde ».