Israël a franchi une nouvelle étape dans la guerre contre Gaza, en bombardant dans la nuit de dimanche à lundi Rafah, la ville frontalière de l’Égypte où s’entassent plus de 1,4 million de Palestiniens.
Selon le Hamas, plus de 100 personnes ont été tuées et de nombreuses autres blessées dans des bombardements qui ont visé 14 maisons et trois mosquées à Rafah.
La chaîne Al Arabiya a diffusé l’image terrifiante d’un enfant palestinien blessé et tremblant de peur après tout ce qu’il a vu autour de lui comme destructions. Cette image symbolise à elle seule les horreurs de cette guerre qu’Israël mène depuis plus de quatre mois contre Gaza.
L’armée israélienne a annoncé de son côté avoir libéré deux otages israéliens qui étaient détenus par les groupes palestiniens.
Malgré les mises en garde et l’opposition unanime de la communauté internationale, y compris les États-Unis, Benjamin Netanyahou et son gouvernement ont affiché ces derniers jours leur détermination à attaquer la ville qui abrite 1,3 million de réfugiés qui ont fui les autres localités de l’enclave palestinienne.
Avec ses 100 000 habitants habituels, Rafah compte désormais une population de 1,4 million de personnes, selon le bureau d’information gouvernemental à Gaza. Les réfugiés s’entassent dans la minuscule ville dans des conditions inhumaines.
En plus d’être « la dernière zone sûre de Gaza », pour reprendre les termes de la diplomatie égyptienne, la ville est surtout l’unique point de passage de l’aide humanitaire internationale pour la population gazaouie.
L’armée israélienne a appelé la population à quitter la ville de Rafah avant une offensive imminente. « Pour aller où ? Sur la planète Mars ? », s’est indigné sur la chaîne française LCI un ancien commandant terrestre de l’OTAN, le général Michel Yakovleff.
« Je pense que les Israéliens ne savent pas quoi faire de leur victoire. C’est un degré d’immoralité ahurissant », a-t-il fustigé. Avant le début de l’offensive terrestre, le 28 octobre, l’armée israélienne avait appelé les habitants du nord de Gaza à se déplacer vers le sud. Les villes où ils se sont rendus en masse n’ont pas été épargnées par la suite. Plus de 28 000 palestiniens ont été tués sous les bombes de l’armée israélienne en quatre mois.
L’éventualité d’une attaque d’envergure sur Rafah fait craindre le pire à la communauté internationale, un nombre encore plus élevé de victimes et une catastrophe humanitaire sans précédent.
Le monde met en garde contre une boucherie à Rafah, Israël fait la sourde oreille
Le président américain Joe Biden a critiqué jeudi 8 février les plans des responsables israéliens, rappelant que leur « riposte » dans la bande de Gaza « a été excessive ».
Lors d’un entretien ce dimanche 11 février avec le Premier ministre Benyamin Netanyahou, Biden a réitéré ses appréhensions et réaffirmé qu’ « une opération militaire à Rafah ne devrait pas avoir lieu sans un plan crédible pour assurer la sécurité et le soutien des plus d’un million de personnes qui y ont trouvé refuge ».
La France a aussi exprimé ce dimanche son opposition à une telle opération et à « tout déplacement forcé de populations, interdit par le droit international humanitaire ».
« Une offensive israélienne à grande échelle à Rafah créerait une situation humanitaire catastrophique d’une dimension nouvelle et injustifiable », a indiqué le Quai d’Orsay dans un communiqué, appelant à « la fin des combats ».
Samedi, c’est l’Arabie saoudite qui a mis en garde fermement contre une telle offensive et appelé à une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU.
Malgré les mises en garde, Benyamin Netanyahou reste droit dans ses bottes. Dans un entretien avec la chaîne américaine ABC, il a expliqué que renoncer à l’offensive sur Rafah équivaudrait à une « défaite » face au Hamas. « Nous ne pouvons pas laisser des bataillons du Hamas à Rafah », aurait-il signifié au président américain.
De son côté, le ministre israélien de la Défense Yoav Galant a indiqué que l’intensification de l’offensive rapprocherait l’armée israélienne d’un « accord réaliste » d’échange de prisonniers avec le Hamas.
De son côté, le mouvement palestinien a fait savoir via sa chaîne Al Aqsa que toute offensive contre Rafah signifierait la fin immédiate des négociations en cours pour une trêve et un échange de prisonniers.
Dans leurs déclarations, Netanyahou et Galant ont assuré qu’il y aura des « passages sûrs » pour les habitants et les réfugiés de Rafah, mais aucun d’entre eux n’a précisé la destination que ces populations devraient prendre.
À moins qu’il ne s’agisse de la mise à exécution du plan visant à les pousser vers le Sinaï égyptien qui a été évoqué au début de la guerre puis abandonné face au refus ferme du Caire. Ces derniers mois, plusieurs ministres israéliens, dont Bezalel Smotrich et Itamar Ben-Gvir, ont ouvertement appelé à déporter la population de Gaza en dehors de la Palestine.