James Comey s’était forgé une image de grand patron policier flegmatique, évoluant au-dessus des turpitudes politiques. Depuis qu’il a été limogé par Donald Trump, l’ex-chef du FBI a plongé dans la mêlée des règlements de compte.
Traité vendredi de « raclure » par le président, M. Comey avait auparavant comparé le locataire de la Maison Blanche à un parrain de la mafia, dans ses mémoires à paraître qui ont fuité jeudi soir.
Ce livre aurait pu être le bilan factuel d’une riche carrière d’un fonctionnaire de haut vol, drapé dans son intégrité. C’est plutôt un brûlot, où beaucoup en prennent pour leur grade.
Décrivant l’obsession de M. Trump pour les détails scabreux le concernant, y compris des rumeurs sur des prostituées russes à Moscou, l’ancien patron du FBI descend dans l’arène fangeuse qu’est devenue la politique américaine depuis l’irruption du milliardaire.
Quel contraste avec la réputation de fidèle serviteur du droit que l’homme toujours élégant s’était bâtie en trois décennies !
Cet ex-procureur fédéral et ancien vice-ministre de la Justice avait été nommé par l’ex-président démocrate Barack Obama au poste de chef du FBI, et confirmé en 2013 par le Sénat pour un mandat de dix ans.
– Fragilisé par la présidentielle –
Le grand flic mesurant 2 mètres, longtemps encarté républicain avant de se dire indépendant, semblait inamovible, protégé par ses réseaux et tous les secrets collectés par ses services d’investigation.
Le natif de l’Etat de New York, tout comme Donald Trump, disposait notamment de solides relais dans la ville, après avoir tenu le poste clé de procureur fédéral de Manhattan.
Lui qui est rompu aux auditions devant les élus du Congrès à Washington, et a navigué dans les hauts cercles politico-judiciaires depuis la présidence de Bill Clinton, a survécu à plusieurs tempêtes.
La plus violente a été celle déclenchée par sa décision de clore puis de rouvrir en 2016 l’enquête sur les emails d’Hillary Clinton.
Pour ces deux actes ultra-controversés, James Comey a été accusé d’avoir favorisé l’ex-secrétaire d’Etat démocrate et ensuite d’avoir fait élire son rival républicain.
Il avait alors renforcé sa stature de franc-tireur, mais en était sorti fragilisé. Donald Trump lui avait toutefois demandé de rester en fonction, avant de changer d’avis.
Une discussion dans la tour Trump en janvier 2017 a scellé la cassure, sur fond d’investigations portant sur l’ingérence russe dans l’élection présidentielle.
Le chef policier a affirmé que le président lui avait demandé de lui prêter allégeance, sous un mode mafieux, et d’abandonner un volet de l’enquête portant sur Michael Flynn, son conseiller à la sécurité nationale.
Cet échange « m’a fait revenir au début de ma carrière, quand j’étais procureur face au Milieu », a écrit M. Comey dans ses mémoires.
M. Trump l’a limogé avec fracas le 9 mai 2017. « James Comey a organisé des fuites et est un menteur avéré », a tweeté vendredi le président.
On n’a pas fini d’entendre parler du jeune retraité de 57 ans, père de cinq enfants: il a prévu de s’exprimer ces prochains jours dans plusieurs interviews.