Othmane Merah est ingénieur agronome et spécialiste en France des végétaux et de l’étude de leur physiologie. Ce chercheur franco-algérien figure sur le classement international de référence de la prestigieuse université américaine de Stanford 2024. Formé à Blida, il a contribué au succès de la moutarde de Dijon et au lancement d’une usine de transformation de la coriandre en France.
Le quotidien français La Dépêche qui est basé à Toulouse, considère ce classement comme une « reconnaissance des activités de recherche, des idées, des orientations » de Othmane Merah, et de son « aura au niveau mondial ».
En effet, c’est pour la quatrième année qu’Othmane Merah figure au prestigieux classement Stanford-Elsevier World’s Top 2 % Scientists. Un motif de satisfaction pour l’Institut Universitaire de Technologie (IUT) Paul Sabatier à Auch où il exerce la fonction d’enseignant en agronomie.
Ce classement, basé principalement sur la recherche, est établi chaque année par l’Université de Stanford aux États-Unis, précise Othmane Merah à la Dépêche du Midi.
Ce classement « met en lumière les chercheurs les plus productifs et les plus cités au monde, toutes disciplines confondues », a-t-il expliqué au même média. « Il se trouve que ce classement est logiquement dominé par les scientifiques en médecine, chimie, physique, astrophysique, mathématiques… Plusieurs prix Nobel y figurent », a-t-il ajouté.
Chaque année, ce classement, aussi appelé le Top 2 %, passe en revue le rayonnement international des chercheurs dans pas moins de 22 domaines et 176 sous-domaines. Pour 2024, le classement a été mis à jour en octobre avec une liste de plus de 210.000 chercheurs parmi plus de huit millions de scientifiques actifs dans le monde, soit 2 %.
Pas moins de quarante indicateurs sont pris en compte dont le nombre de publications, le nombre d’articles signés par le chercheur en tant qu’auteur ou coauteur, le nombre de fois où les articles du chercheur distingué sont cités dans les revues scientifiques.
Cet enseignant-chercheur a été classé dans la rubrique agronomie pour ses articles concernant la génétique des végétaux et notamment la physiologie des plantes poussant dans les conditions de stress.
L’exploit est d’autant plus remarquable que ce classement est dominé par les spécialités de médecine, de physique ou d’astrophysique. « Nous ne sommes que 500 agronomes à avoir été classés, je suis ravi de faire partie de ces gens », a confié Othmane Merah à la Dépêche du 6 novembre dernier.
Son article de 2001 sur la résistance à la sécheresse de variétés de blé dur publié par les prestigieuses éditions de l’université de Cambridge a été cité jusqu’à 184 fois dans des publications scientifiques. Aujourd’hui, Othmane Merah est membre du comité de rédaction de plusieurs revues scientifiques.
Averti par un concours de circonstances
Le plus étonnant est que c’est un concours de circonstances qui a permis à ce chercheur franco-algérien de découvrir qu’il figurait, déjà depuis trois ans, dans ce classement prestigieux. « J’ai découvert ça, il n’y a pas longtemps, parce qu’un collègue a publié un tweet disant qu’il était heureux de partager son classement », a-t-il expliqué.
Il se trouve que comme le relate Othmane Merah : « C’est quelqu’un que j’ai formé, alors je me suis demandé si moi aussi, j’y étais cette année. Et là, j’ai découvert que je faisais partie du classement depuis 2020. »
Il faut dire que ce chercheur est plus impliqué dans son travail de recherche et de projets de développement que de mentions honorifiques.
Contacté par TSA, il nous confie avoir obtenu son diplôme d’ingénieur agronome à l’université de Blida puis être allé se spécialiser en France.
Ses travaux de recherche ont contribué au succès de la célèbre moutarde de Dijon en participant à créer à Dijon des nouvelles variétés de moutarde à partir de celles provenant du Canada. Une moutarde aujourd’hui utilisée dans tous les établissements Mac Do de France.
Spécialisé dans le domaine des semences et de leur adaptation aux milieux difficiles, Othmane Merah fourmille de propositions pour l’Algérie. Ainsi propose-t-il d’associer aux cultures de blé ou de maïs des espèces de légumineuses locales dont les racines développent un mucilage qui permet d’emmagasiner de l’eau.
Les travaux actuels d’Othmane Merah visent à valoriser les légumineuses algériennes, déjà adaptées aux conditions stressantes, en association avec des graminées pour l’alimentation des bétails dans les zones steppiques. Il a déjà étudié les légumineuses natives d’Occitanie (sud de la France) avec un succès certain.
Une usine pour valoriser la coriandre
Ses travaux ont un impact socio-économique. Personne ne pensait à l’utilisation de la graine de coriandre, très utilisée également en Algérie.
La multidisciplinarité scientifique de cet acharné de la recherche lui a permis de convaincre deux grands groupes agricoles d’investir dans une filière de production et de transformation de la graine de coriandre. Cette graine sert à produire une huile végétale fine destinée à l’alimentation humaine, l’huile essentielle est destinée aux industries cosmétiques.
Le résidu (le tourteau, riche en protéines) est un aliment très apprécié par les animaux. Grâce à ces travaux, une usine de transformation (Sobiotech) a vu le jour dans la banlieue d’Auch avec la création de plusieurs emplois. Il est partisan de l’approche qui va de la « fourche à la fourchette ».
Othmane Merah confie à TSA que « ma vie est une histoire de rencontres, celle avec Eliane Deléens et Philippe Monneveux des sommités mondiales dans l’exploitation des ressources génétiques pour l’étude de la résistance à la sécheresse ».
Sa rencontre avec Andrée Bouniols, « une femme dans le milieu agronomique qui est une farouche défenseuse de la transversalité, une vraie encyclopédie vivante » et puis celle de Zephirin Mouloungui « un chimiste à la longue vue qui sera un mentor et un puits d’idée à la croisée des disciplines », relate Othmane Merah.
Othmane Merah : voici ce que peut apporter à l’Algérie
Il se dit reconnaissant à ces « perles » qui lui ont permis « d’être à la fois généticien (ressources génétiques), physiologiste (résistance des plantes aux stress) et chimistes des molécules bioactives des plantes (composition chimique fine des plantes) ».
Othmane Merah souhaite transmettre en Algérie son savoir-faire en matière de semences maraîchères.
Un domaine « stratégique pour ce secteur » agricole, d’autant plus, explique-t-il que « L’Algérie importe la quasi-totalité (96 %) des semences de l’étranger, imposant ainsi une dépendance pérenne de notre agriculture vis-à-vis des firmes étrangères ».
Avec des collègues, il a conçu le projet SemAl pour Semences Algérie et suggère la création d’une entreprise de développement et production de semences au niveau d’une ferme pilote. Un projet qui ambitionne également la formation de techniciens spécialisés et d’agréeurs encadrant la production locale de semences et leur distribution.
Convaincu de la justesse de ce projet, il parcourt les couloirs des services agricoles concernés et ne désespère pas de le voir aboutir. « On commence à connaître mon projet », confie-t-il à TSA.
Excellence dans son travail de recherche scientifique, volonté de transmettre son savoir-faire en Algérie, Othmane Merah fait partie de cette catégorie de chercheurs de la diaspora algérienne en France sur qui l’agriculture du pays peut compter.
« J’ai eu la chance de rencontrer des gens exceptionnels, je souhaite partager ce savoir, ces connaissances reçues, et créer des rencontres qui fassent rêver et participer la jeunesse algérienne » déclare-t-il.
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