Société

Jeune tué en Kabylie : la leçon de dignité du père de la victime

L’onde de choc de ce qui s’est passé mardi 11 août à Larbaa Nath Irathen, dans la wilaya de Tizi-Ouzou, a atteint toute l’Algérie. Un jeune soupçonné d’être l’un des auteurs des incendies, qui ravagent la région depuis lundi, a été lynché à mort par la foule sur la place publique. Son cadavre a été brûlé.

Un tel crime abominable ne peut laisser indifférent. D’autant plus qu’il s’est avéré que le malheureux non seulement n’était pas un pyromane, mais il était présent sur les lieux dans le sillage de l’immense et formidable élan de solidarité exprimé par toute l’Algérie envers la Kabylie.

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Djamel Bensmaïl, qui a fini en flammes sur la place du centre-ville, était venu de Miliana porter secours aux populations encerclées par les flammes. Le destin ne pouvait pas être plus cruel. Pour la victime, mais aussi pour toute la Kabylie qui, sans doute, ne méritait pas ça après la dure épreuve du feu qu’elle subit encore.

C’est que des voix malintentionnées, les mêmes qui attisent au grand jour depuis deux ans le feu de la division et de la discrimination, ont sauté sur l’occasion pour s’attaquer à une région meurtrie et la désigner de nouveau comme la source de tous les maux du pays.

Mais la réponse leur est venue de là où les semeurs de haine ne l’attendaient pas. Du père de la victime qui n’a pas encore essuyé ses larmes. Même tordu par la douleur de la perte de son fils et des images de sa mise à mort qu’il a dû voir sur les réseaux sociaux, l’homme n’a pas perdu sa lucidité.

Dignement, il a réclamé le corps de son fils pour pouvoir faire le deuil et que justice soit faite. Il a aussi, et surtout, appelé à la raison et à ne pas faire de la mort de son fils un prétexte pour attiser le feu de la discorde. « Les kabyles sont nos frères. Nous ne cherchons pas la discorde. Nous devons nous unir », dit-il.

Ce jeudi, il s’est déplacé à Larbaâ Nath Irathen où il a été accueilli par des habitants de la région qui lui ont présenté leurs condoléances et leurs excuses pour un acte commis par des barbares.

 Un homme sage et lucide

Le bonhomme n’a peut-être pas lu Gustave Le Bon et sa « Psychologie des foules », mais il semble avoir compris que ce qui s’est passé aurait pu se produire dans n’importe quel autre point de la terre. Djamel Bensmaïl n’a pas été tué parce qu’il n’est pas de la région et encore moins parce qu’il est venu aider. Il est mort parce qu’il a été pris pour un pyromane, dans des circonstances qu’il faudra déterminer, et qu’il a été désigné comme tel à une foule en furie et surchauffée, au propre et au figuré.

Son exécution, alors qu’il est présumé innocent, reste condamnable et inacceptable, la profanation de son cadavre encore plus. Son père a été sage et lucide et ses propos ont été qualifiés sur les réseaux sociaux de pluie qui vient éteindre les feux de la discorde.

La métaphore est d’une infinie justesse. Les Algériens, en Kabylie et ailleurs, ont apprécié. La haine ne mènera nulle part, sauf à concrétiser les objectifs de ceux qui l’entretiennent et l’attisent pour des objectifs diaboliques.

D’autres réactions tout aussi sages ont été entendues du côté de Miliana, émanant de simples citoyens et du mouvement associatif. Des jeunes bénévoles des quatre coins du pays ont aussi partagé des vidéos pour dire que rien n’a changé et qu’ils poursuivront leur route vers Tizi-Ouzou pour la secourir et panser ses blessures.

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