Économie

Jusqu’où ira l’inflation en Algérie ?

L’économie algérienne ne se porte pas bien et les derniers chiffres des principaux indicateurs dévoilésmardi 21 décembre par la Banque d’Algérie le confirment.

Une conjonction de facteurs endogènes et exogènes ont fait baisser le pouvoir d’achat à des niveaux inquiétants, au moment où le Fonds monétaire international (FMI) se félicite de l’efficience des politiques publiques mises en œuvre ou envisagées.

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Selon la Banque d’Algérie, le taux d’inflation s’est établi à 9.2% en moyenne en octobre, gagnant près de six points sur une année. Sans surprise, ce sont les produits alimentaires qui sont le plus touchés par la hausse (14,1% en octobre contre seulement 1,8% une année auparavant).

Cette situation n’est pas seulement la résultante de la pandémie de covid-19 et de la hausse généralisée des prix des principales matières premières sur les marchés mondiaux. Elle est aussi directement liée à la dépréciation continue du dinar, et à un degré moindre, aux restrictions sur les importations.

Selon le gouverneur de la Banque d’Algérie, la monnaie nationale a poursuivi sa baisse, perdant 6,21% de sa valeur sur une année face au dollar. Entre octobre 2020 et le même mois de 2021, le dollar américain est passé de 126,36 à 134,73 dinars algériens.

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Le dollar est la principale monnaie dans laquelle se règlent les importations algériennes, dominées par les produits alimentaires de base qui ont connu une hausse fulgurante sur les marchés internationaux.

L’indice de l’Organisation mondiale pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), qui comprend les céréales, le lait, les viandes et les sucres, a atteint en octobre dernier des niveaux jamais vus depuis dix ans, enregistrant une hausse de 30% sur une année.

En interne, outre la dépréciation du dinar, le gouvernement a poursuivi sa politique de restrictions sur les importations pour préserver les réserves de change.

Ces dernières se situaient à fin septembre dernier à un peu plus de 44,7 milliards de dollars, selon le gouverneur de la BA, contre 48.2 fin 2020. Une année auparavant, fin 2019, elles étaient à 62 milliards.

L’érosion  est moins marquée en 2020 grâce à la réduction de la facture des importations et à l’augmentation des exportations hors hydrocarbures et la hausse des prix de pétrole et de gaz, augmentés de plus de 66% entre les deux périodes.

Jusqu’où ira l’inflation ?

Le 13 décembre, le Premier ministre a annoncé que la balance des paiements a enregistré un excédent de plus d’un milliard de dollars pour la première fois depuis plusieurs années.

Le déficit tournait autour de 10 milliards de dollars ces dernières années, et l’excédent de l’exercice qui s’écoule est assurément une performance, même si le calcul ne prend pas en compte les importations de services, estimées à un peu plus de 5 milliards de dollars.

La performance s’est néanmoins faite au prix de mesures pénalisantes pour l’outil productif national, qui n’a plus le même accès à la pièce de rechange, aux véhicules neufs et à certains intrants, touchés par les interdictions ou les restrictions sur les importations.

Lors de la hausse vertigineuse des prix de la pomme de terre en octobre-novembre, des spécialistes ont cité, parmi les facteurs de la flambée, la réduction des importations des semences couplée aux faibles rendements des semences locales.

Outre l’effet direct de l’inflation, le pouvoir d’achat est aussi tiré vers le bas par la stagnation de l’investissement productif. Un alignement des obstacles qui empêchent l’économie de décoller alors que l’inflation explose et le dinar poursuit sa dégringolade.

Les chiffres dévoilés au plus haut niveau de l’Etat sont ahurissants.

Selon le Premier ministre, 2500 projets sont bloqués au niveau du Conseil national de l’investissement (CNI) pour une valeur totale d’au moins 90 milliards de dollars.

Le 4 décembre, le président de la République a pointé du doigt l’administration qui agit comme un frein devant l’investissement. Dimanche, le chef de l’Etat, visiblement peu satisfait de l’action économique du gouvernement, est revenu à la charge pour demander « l’application d’une politique économique efficace et la libération des initiatives des entraves et de la lourdeur des procédures. »

Un nouveau code de l’investissement est élaboré, mais ses dispositions n’agissent pas sur le principal verrou qui est le rôle de l’administration. L’ANDI (agence nationale de développement de l’investissement) et le CNI changeront de dénomination mais garderont toutes leurs missions.

Face à la détérioration du pouvoir d’achat, le gouvernement envisage un certain nombre de mesures, dont certaines pourraient être mises en œuvre dès le prochain exercice, dont l’abattement de l’IRG pour une frange de salariés, le relèvement du point indiciaire de la fonction publique et la mise en place d’une allocation chômage.

Des mesures censées améliorer le quotidien des franges les plus précaires mais dont les effets pourraient être annihilés par la poussée inflationniste qu’elles sont susceptible d’aggraver.

Autre mesure envisagée et qui risque de porter l’inflation à des niveaux record, le probable levé du système des subventions généralisées. D’où cette question plus que justifiée : jusqu’où ira l’inflation en Algérie ?

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