Après 14 longues années passées sous la tunique du Real Madrid, Karim Benzema a décidé, contre toute attente, de changer d’air en rejoignant le championnat saoudien.

Sous le ciel d’Arabie saoudite, le natif de Bron dans la banlieue lyonnaise, de parents originaires de Béjaia, en Kabylie, retrouvera dans la compétition son ancien coéquipier à la « Maison blanche », Cristiano Ronaldo.

À eux deux, ils ont écrit sans doute l’une des pages les plus glorieuses de l’histoire du club mythique de la capitale espagnole. Alors qu’il lui restait un an de contrat, Karim Benzema a réussi à prendre de court tout le monde, y compris son entraineur, Carlo Ancelloti.

Le Ballon d’or 2022 a décidé de larguer les amarres pour s’engager dans une nouvelle aventure footballistique dans un championnat pas spécialement très relevé, un « cimetière des stars », selon une formule consacrée, mais qui aspire à se faire une place au soleil grâce à la politique du « soft power » adoptée par le prince héritier Mohamed Ben Salmane.

À l’Ittihad de Djeddah qui lui a offert un « pont d’or » -les médias évoquent un contrat de trois ans pour plus de 600 millions d’euros sans compter d’autres avantages liés aux contrats publicitaires- le quintuple vainqueur de la Ligue des champions entend s’offrir un dernier challenge avant de raccrocher les crampons.

« Je pense que le moment est venu de relever un nouveau défi et de réaliser un nouveau projet. Chaque fois que j’ai visité l’Arabie saoudite, j’ai toujours ressenti une telle chaleur et un tel amour de la part des supporters et du peuple », a affirmé « El Nueve », peu après avoir paraphé son contrat.

Karim Benzema inspiré par Zinedine Zidane

Si l’offre mirobolante saoudienne a fini par vaincre ses réticences, il semble bien que KB9 ait été inspiré par la fameuse chanson de Charles Aznavour. « Il faut savoir quitter la table quand l’amour est desservi… »

Critiqué depuis quelques semaines par la presse espagnole en raison de ses performances, en proie à de fréquents pépins physiques et incapable de performer et peser sur les grands matchs, comme on l’a vu lors de la récente élimination en demi-finale de la Ligue des champions contre Manchester City, Karim Benzema se savait qu’il était en déclin.

Renouveler pour une année supplémentaire était un pari risqué pour lui, élevé au rang de légende et au sommet de sa gloire. Comme Zinedine Zidane, son mentor qui l’a longtemps couvé, originaire comme lui de la même région en Algérie, Karim Benzema ne voulait sans doute pas voir son étoile pâlir au crépuscule de sa carrière.

L’homme au caractère trempé, qu’il tient du sang des montagnards du pays de ses parents kabyles et qui se définit comme le « fils du peuple » a été avisé peut-être par les sorties de piste, peu glorieuses, d’autres stars, comme Cristiano Ronaldo, humilié et poussé à la porte par Manchester United, ou encore Lionel Messi sifflé par une partie du public du Parc des princes et hué lors des récentes célébrations parce qu’ils ne pouvaient plus répondre aux exigences de leurs supporters et nombreux fans.

À 35 ans, il se savait bien qu’il ne pouvait plus tenir le rang qui a construit sa légende et d’être en phase avec le haut niveau exigé par le Real Madrid et les compétitions européennes.

Karim Benzema a été sans doute inspiré par Zinedine Zidane qui a lui aussi mis fin à sa carrière de football à 34 ans après le Mondial de 2006 où il a atteint la finale avec l’équipe de France.

À la seule différence de Benzema qui est parti en Arabie saoudite parce que le contrat qui lui a été proposé par Ittihad ne se refuse pas, Zinedine Zidane a lui raccroché définitivement les crampons comme joueur, pour ensuite devenir un entraîneur cinq étoiles, en remportant trois fois d’affilée la Ligue des champions avec le Real Madrid. Mais à l’époque, il n’y avait pas de clubs capables de proposer des sommes astronomiques aux stars en fin de carrière.

Désormais moins exposé médiatiquement, Karim Benzema, libéré de la pression des arènes européennes, peut s’offrir de nouveaux tours de piste, même avec moins de flamboyance, mais sans que son aura en pâtisse.

Dans l’imaginaire des amoureux du football, il restera comme une légende du Real Madrid et où son nom est gravé dans l’histoire du football mondial comme le deuxième plus grand buteur du club.

« Tu es arrivé alors que tu n’étais qu’un enfant et aujourd’hui tu es devenu l’une de nos plus grandes légendes, l’un des meilleurs joueurs de tous les temps. Ta légende restera à jamais comme une belle histoire d’amour entre Benzema et le Real », a loué Florentino Perez, président du Real Madrid.

Avec le club madrilène, Benzema a tout gagné : Liga, Ligue des champions, Coupe du roi, Coupe du monde des clubs, Ballon d’or… L’attaquant franco-algérien n’a pas eu la même carrière en équipe de France pour des raisons extrasportives. Il avait été écarté des Bleus entre 2015 et 2021 à cause de l’affaire dite de la sextape, avant de revenir, de gagner la Ligue des nations, et de quitter l’équipe de France par la petite porte la veille du Mondial 2022 au Qatar.

Et comme toutes les légendes, c’est l’histoire d’un fils d’émigré algérien qui a gravi les échelons au prix de lourds sacrifices pour atteindre le firmament. Et la perpétuer en choisissant de se retirer au bon moment, en gardant son étoile rayonnante dans le ciel du gotha mondial.