Début décembre, le Fonds monétaire international (FMI) exprimait son satisfécit des réformes engagées ou envisagées par l’Algérie.
Moins d’un mois après, la Banque mondiale trouve le rythme de ces réformes pas assez rapide et prévoit des conséquences néfastes pour la situation économique et sociale de l’Algérie.
Les indicateurs devraient s’améliorer dans l’immédiat mais risquent de se détériorer à moyen terme.
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La BM note dans son rapport de suivi de la situation économique intitulé « redresser l’économie algérienne après la pandémie », que l’Algérie bénéficie d’un « répit temporaire » qu’elle doit à la conjonction de deux facteurs : le recul de la pandémie et la hausse des prix du pétrole.
« L’envolée des recettes d’exportation d’hydrocarbures contribue à réduire nettement les besoins de financement extérieur, et permet de stabiliser à court terme les besoins croissants de financement domestique », écrivent les analystes de la Banque mondiale.
Grâce aussi à « la dépréciation continue du taux de change, à des politiques soutenues de compression des importations et à une amélioration des termes de l’échange », les réserves internationales de l’Algérie se stabilisent et le déficit du compte courant se réduit.
Même si le déficit budgétaire global demeure élevé, la Banque mondiale estime que la hausse des recettes des hydrocarbures « compense la baisse des recettes fiscales et finance l’augmentation des dépenses courantes, le rebond de l’investissement public, ainsi que le coût du soutien à la caisse nationale des retraites ».
La Banque mondiale souligne par ailleurs que la dette publique a « explosé » en 2021 « alors que le Trésor met en œuvre un programme massif de rachat de créances pour soutenir le secteur public ».
En juillet 2021, les autorités ont lancé un vaste programme de rachat de créances d’une valeur excédant les 15,3 milliards USD, rachetant les dettes des entreprises publiques en difficulté, selon la Banque mondiale.
« L’inflation détériore les conditions de vie »
En hors hydrocarbures, la reprise de l’économie s’est « essoufflée », et demeure « largement incomplète », tandis que les « risques inflationnistes se concrétisent ». « L’inflation s’est nettement accélérée en 2021 » et « détériore les conditions de vie ».
En octobre, l’indice des prix à la consommation avait augmenté de 9,2 % en glissement annuel, « un sommet depuis 2012 ». Cette poussée inflationniste est expliquée par « une récolte décevante, les efforts de rationalisation des subventions et la dépréciation de la monnaie ».
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La forte hausse de l’inflation alimentaire a affecté « disproportionnellement » le pouvoir d’achat du segment le plus vulnérable de la population, « compte tenu du poids majeur des produits alimentaires dans son panier de consommation ».
Le PIB de l’Algérie s’est contracté aux premier et deuxième trimestres 2021, à cause du recul de l’activité dans les secteurs de la construction et des services. Le PIB et le PIB hors-hydrocarbures étaient au premier trimestre de 3,1 % et 3,9 % inférieurs à leur niveau antérieur à la pandémie.
« En l’absence d’une mise en œuvre rapide de l’agenda de réforme, la reprise sera fragile et les soldes budgétaire et extérieur se détérioreront à moyen terme », met en garde la BM qui prévoit ainsi que la croissance du PIB réel atteindra 4,1 % en 2021, puis diminuera progressivement à moyen terme, « compte tenu de la nature progressive de la mise en œuvre de l’agenda de réformes structurelles annoncé pour relancer l’investissement et la croissance dans les segments hors hydrocarbures de l’économie ».
Les prévisions de la BM à court terme sont optimistes, mais annoncent une dégradation des principaux indicateurs à moyen terme.
Les déficits budgétaire et du compte courant devraient se détériorer graduellement, avec la diminution anticipée des recettes pétrolières, et l’inflation restera élevée, dégradant davantage le pouvoir d’achat des ménages.
« La dépendance intacte de l’Algérie à l’égard des revenus des hydrocarbures, l’apparition de nouveaux variants de la Covid-19 et le rythme des efforts de réforme annoncés restent les principales sources de risques pour les perspectives économiques », expliquent les auteurs du rapport qui notent aussi que, « en l’absence de mise en œuvre effective des réformes structurelles prévues, la vulnérabilité de l’économie algérienne s’aggravera.
Aussi, le solde du compte courant devrait s’améliorer nettement en 2021 et 2022 avec le pic des exportations d’hydrocarbures, mais il devrait se détériorer ensuite, de même que le déficit budgétaire global, qui devrait s’améliorer en 2021 « mais il devrait se dégrader lentement par la suite dans un contexte de diminution attendue des recettes pétrolières et de rebond des dépenses publiques ».
« Le pays reste toujours dépendant des recettes des hydrocarbures, et sa marge de manœuvre s’est réduite », résument la Banque mondiale.