Une fresque historique et dramatique, entièrement produite et réalisée en Algérie. C’est le pari d’Adila Bendimerad et de Damien Ounouri avec leur long-métrage « El Akhira. La dernière reine ».
Parler de l’histoire algérienne précoloniale est assez rare pour le souligner. Un acte concret pour rappeler que l’Algérie avait bien une histoire avant la conquête coloniale et son indépendance. La symbolique du film lui a permis une entrée sur le marché du cinéma européen prometteuse.
La Dernière reine raconte l’histoire de Zaphira
« El Akhira. La Dernière reine » raconte l’histoire de Zaphira, une reine dont l’existence réelle n’a jamais été complètement confirmée. Celle que l’on surnomme la dernière reine, aurait été l’épouse du roi Salim Toumi au cours du XVIe siècle. Elle aurait vécu une histoire personnelle tragique la menant au suicide afin d’éviter un mariage forcé avec le meurtrier de son époux, le fameux Barberousse.
L’intrigue de ce long-métrage se déroule à Alger en 1516. Le pirate Aroudj Barberousse interprété par l’acteur franco-algérien Dali Benssalah, libère la ville des Espagnols qui étouffent le pays en contrôlant la capitale et en imposant durement les Algérois.
Il s’allie alors au roi Salim Toumi, qui règne à cette époque sur Alger. Mais Barberousse décide de trahir le roi en orchestrant son assassinat. Salim Toumi laisse derrière lui son fils et sa femme, la reine Zaphira, que Barberousse convoite et souhaite épouser.
Mais Zaphira (interprétée par Adila Bendimerad) refuse de se soumettre à la volonté de l’assassin de son époux. Elle va alors tout faire pour s’opposer à lui et se battre pour que son fils devienne l’héritier du royaume.
L’histoire de Zaphira, qui est passionnante à l’écran, est un épisode trouble de l’histoire algérienne. Elle est à mi-chemin entre l’histoire vérifiée et réelle et la légende.
Toutefois, le mythe de cette femme dans le passé de l’Algérie, comme son rôle dans cette fresque historique proposée par Adila Bendimerad et Damien Ounouri, offre une image de la femme algérienne fascinante. Combatives, conscientes et intelligentes, les femmes (les autres rôles féminins que celui de Zaphira y compris) sont ici au cœur de l’intrigue.
Un espoir de voir renaître le cinéma algérien ?
La production d’un film comme « La Dernière reine » offre un nouveau souffle au cinéma algérien qui souffre depuis plusieurs années d’un manque de visibilité et surtout de soutien dans la production.
Si le film d’Adila Bendimerad et de Damien Ounouri est une œuvre algérienne, ce n’est pas en Algérie qu’elle trouvera son public. Le film ne détient pas encore de visa d’exploitation dans son pays d’origine et ne sera donc pas projeté dans la poignée de salles de cinéma algériennes.
Non, c’est à l’étranger que le film fera certainement ses preuves. C’est le cas en France, où « El Akhira. La Dernière reine » est sortie dans les salles le 19 avril. Le film semble déjà être très attendu. Il est bien accueilli par la critique. Ce n’est pas courant pour un film algérien en France.
Un comble pour un film 100% algérien ? Son arrivée sur le marché du cinéma révèle, en effet, un problème dans la promotion du 7e art en Algérie. Ce film est d’ailleurs l’un des rares longs-métrages qui a pu bénéficier du soutien du Fonds national pour le développement de l’Art, de la Technique et de l’Industrie cinématographique et de la Promotion des Arts et des Lettres (FDATIC) avant sa suppression dans le cadre de la loi de finances 2021.
En tout cas, en France, « La Dernière reine » est plus que désirée. Toute l’équipe du film a pu présenter fièrement l’œuvre à la célèbre Mostra de Venise, lors des Journées des Auteurs.
Le film a également pu rencontrer différents publics en France. Tout d’abord lors de la 18ème édition du Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient en mars 2023. Le film algérien a fait l’ouverture de ce festival du cinéma arabe qui a lieu chaque année en Seine-Saint-Denis et rencontre beaucoup de succès.
C’est le premier long-métrage algérien qui s’offre une place aussi remarquée dans les festivals et les salles françaises depuis Papicha, de Mounia Meddour ou encore Les Bienheureux, de Sofia Djama.
La Dernière reine : la presse française est dithyrambique
Pour l’heure, on ne connaît pas le nombre d’entrées qu’a fait la Dernière reine pour ses premiers jours d’exploitation en France. Mais la critique française s’est déjà penchée sur l’œuvre historique proposée par Adila Bendimerad et Damien Ounouri.
Le Monde souligne le caractère exceptionnel du film qui « constitue en soi un petit événement, un symbole ». Le quotidien français estime qu’il s’agit d’un film qui « ravive le plaisir quasi enfantin que procurent les grandes histoires romanesques. »
Le Monde trouve la place des femmes dans ce film remarquable. « Le film expose face aux hommes quelques belles et courageuses figures féminines dont le mérite se mesure à l’aune du champ restreint qui leur est assigné », estime le journal.
Pour Libération, « cette première fiction cosignée par la comédienne Adila Bendimerad, qui figure également au générique et déchire tout dans le rôle de la reine, et du cinéaste Damien Ounouri penche plutôt vers le péplum hollywoodien, malgré son cadre algérois au XVIe siècle ».
Les quelques critiques négatives se tournent sur des détails de réalisation tels que certains anachronismes ou dialogues grandiloquents. Mais ces petits défauts ne semblent pas décevoir pour autant la presse française qui reçoit le film algérien avec enthousiasme.
La diaspora algérienne heureuse de rencontrer son histoire
Mais l’excitation la plus importante est, sans doute, celle de la diaspora algérienne en France. Peu représentée dans le cinéma français, la communauté algérienne a beaucoup d’attentes de la part de la production algérienne.
Avoir accès à l’histoire de leurs ancêtres par le biais du 7e art est un privilège pour cette audience à la double culture. Notamment au moment où les mouvements de décolonisation culturelle grandissent chez les jeunes générations de franco-algériens.
L’enjeu est encore plus conséquent pour les Algériens de France qui doivent constamment gérer la relation historique entre les deux pays. Le besoin de pouvoir raconter le passé de leur pays ou de celui de leurs parents les aident à s’approprier davantage leur culture algérienne.
Sur les réseaux sociaux, beaucoup d’entre eux partagent déjà leur enthousiasme pour le film « La Dernière reine ».
Jeux d'acteurs époustouflants, décors &costumes splendides, intrigue captivante. #LaDerniereReine est une réussite. Un bon rappel pour ceux qui pensent que l'histoire de l'Algerie commence en 1962. Dès 1516, des hommes & des femmes se battaient pour cette terre. #Alger #Algerie pic.twitter.com/77c5TP6HHu
— Nadia Henni-Moulaï ✍️ (@nadiamedias) April 20, 2023
#Debrief Si vous n’êtes pas encore allé voir « La Dernière reine » Allez y vite !! Vous loupez un truc de fou. Un film poétique, intense, poignant, époustouflant. J’ai eu des frissons du début à la fin. Les références historiques, les costumes, les décors, le scénario… pic.twitter.com/fqygWgSHsF
— 𝐒𝐩𝐥𝐞𝐞𝐧𝐞𝐫 ⵣ (@Cave_Canem_69) April 19, 2023
La Dernière Reine est une fresque historique, romanesque, éblouissante et engagée mêlant divinement l’histoire à la légende. Sans oublier de nous emmener avec eux dans ces terres magnifiques d’Alger en 1516. pic.twitter.com/aFj07Rvetn
— DMC – Ici ça parle ciné (@duxmoviecritics) April 19, 2023
Les Algériens de France ne sont pas les seuls à apprécier la proposition d’Adila Bendimerad et Damien Ounouri. Le film semble séduire un public varié.
La plateforme AlloCiné qui est devenue la référence de la recommandation cinématographique affiche déjà de nombreux commentaires sur le film algérien.
Les spectateurs donnent en moyenne une note très prometteuse de 4,2 sur 5. Les commentaires sont donnés par des spectateurs qui semblent venir de toutes origines.
Globalement, les internautes soulignent une intrigue passionnante, un jeu d’acteur époustouflant et surtout la découverte d’une Algérie différente et sublime.