Emmanuel Macron n’est à la tête de la France que depuis une année et déjà, on assiste à un chamboulement de la politique étrangère de ce pays, avec un alignement de plus en plus marqué et assumé sur les points de vue de la diplomatie américaine.
Bien avant sa visite fortement médiatisée aux États-Unis, le jeune président français, sur bien des dossiers, avait fait siennes les positions américaines, participant notamment aux frappes contre le régime syrien. À Washington, il a fait un revirement à 180° concernant l’accord nucléaire conclu avec Téhéran, qu’il juge maintenant inapproprié et porteur de dangers après l’avoir défendu pendant plusieurs mois.
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Ce vendredi 27 avril, une résolution du conseil de sécurité de l’ONU sur la question du Sahara occidental est venue confirmer qu’entre les diplomaties de ces deux grands pays occidentaux, il y a bien plus qu’un rapprochement. Comportant des passages en faveur des thèses marocaines, le texte est perçu comme le signe de la fin de la neutralité de la diplomatie américaine dans ce dossier.
Un revirement que d’aucuns n’hésitent pas considérer comme autre retombée logique de la lune de miel « diplomatique » qui se confirme chaque jour un peu plus entre les USA et la France, premier soutien du Maroc dans ce conflit. Une lecture d’autant plus fondée qu’au moment même où le texte était rédigé de la main de Nikki Haley, la représentante US à l’ONU -peut-être sous la dictée des diplomates français-, Donald Trump et Emmanuel Macron multipliaient les shows et affichaient leur parfaite entente à l’occasion de la visite d’État de ce dernier à Washington, la première du genre pour un chef d’État étranger depuis l’élection de Trump.
Bien plus qu’un soutien politique, l’alignement du président d’un grand pays sur ses positions les plus controversées signifie beaucoup pour un Donald Trump jusque-là raillé et caricaturé à la moindre de ses annonces, en tout cas jamais trop pris au sérieux.
Un renvoi d’ascenseur n’était dès lors pas à exclure et ce changement soudain dans l’attitude américaine vis-à-vis du dossier sahraoui en est peut-être l’expression.
Le positionnement à l’égard de la politique étrangère américaine a toujours été un paramètre fondamental dans la définition de la diplomatie française, au moins depuis les années 50. Anti-atlantiste sous le général De Gaule, Jacques Chirac et même François Mitterrand, plutôt américanophile avec Nicolas Sakozy, mêlant anti-atlantisme et interventionnisme sous François Hollande, la France est peut-être en train de glisser sous le chapeau américain, pour reprendre une expression chère à l’un des plus brillants chefs de sa diplomatie, Rolland Dumas. Une mauvaise nouvelle pour le monde qui n’a rien vu venir.
Lors de la campagne pour son élection en 2017, Emmanuel Macron avait promis bien des changements, mais jamais une redéfinition totale de la politique étrangère française, encore moins son alignement sur les thèses d’un Trump qui commençait déjà à inquiéter par sa légèreté et ses menaces à tout-va, contre Bachar Al Assad, la Corée du Nord, l’Iran, les Palestiniens, le Venezuela, les Musulmans…
À Washington, l’élection du jeune trentenaire était même perçue, notamment dans le camp démocrate, comme une revanche après l’incroyable scénario du 16 novembre 2016, jour de la victoire de Donald Trump et les menaces qu’elle supposait pour la paix mondiale. Ironie de l’histoire, c’était Trump lui-même qui, pendant la campagne présidentielle en France, se félicitait sur Tweeter à chaque point gagné dans les sondages par Marine le Pen, l’adversaire de M. Macron au second tour.
Mesuré dans ses propositions concernant les questions de politique interne, comme celles de la place de l’Islam et de l’immigration, le candidat Macron l’était tout autant dans sa vision des équilibres géopolitiques mondiaux.
Que s’est-il donc passé entre temps pour que la France sacrifie soudainement une longue tradition de « méfiance » vis-à-vis de l’interventionnisme américain, pour que son président soit raillé sur les réseaux sociaux, photos de sa dernière visite à Washington à l’appui ?
Les mêmes réseaux diront peut-être bientôt d’Emmanuel Macron qu’il est pour Donald Trump ce que le Britannique Tony Blair fut pour Georges W. Bush et ce serait bien dommage pour l’image d’un jeune président qui a tout pour mériter mieux.
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