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La polémique sur le roman « Houaria » d’Inaâm Bayoudh enfle en Algérie

La polémique sur le roman « Houaria » d’Inaâm Bayoudh enfle en Algérie

Source : capture d'écran Facebook
Inaâm Bayoudh.

Jamais sans doute un roman n’a suscité pareille controverse en Algérie. La polémique autour de « Houaria », de l’écrivaine et traductrice Inaâm Bayoudh, ne s’estompe pas près de deux semaines après son déclenchement. L’affaire a pris une telle ampleur que même les politiques commencent à s’en mêler.

Pour résumer, « Houaria » est un roman signé de la romancière et traductrice algérienne Inaâm Bayoudh, qui raconte le dur quotidien d’une frange de la population de la ville d’Oran durant la décennie de terrorisme en Algérie, pendant les années 1990.

Le roman Houaria divise les Algériens

Démunie, Houaria, le personnage principal, a dû se prostituer pour subvenir aux besoins de sa famille. La romancière a reproduit certains dialogues crus dans l’arabe algérien parlé à Oran. L’œuvre a été publiée en octobre 2023.

Ce n’est ni le roman lui-même, ni sa thématique ou encore la vulgarité de certains des passages qui ont fait réagir le courant conservateur du pays. Le roman a été primé le 9 juillet du prestigieux grand prix Assia Djebar et la polémique s’est déclenchée pour ne plus s’estomper.

La première conséquence est la décision de l’éditeur qui a édité « Houaria », la maison d’édition MIM, de cesser ses activités.

Inaâm Bayoudh est critiquée avec virulence sur les réseaux sociaux, et même par certains intellectuels proches du courant islamiste et conservateur.

Des appels sont aussi lancés pour retirer l’organisation du prix Assia Djebar à l’ANEP (Agence nationale d’édition et de publicité) ou carrément à supprimer le prix.

Assia Djebar, décédée en 2015, n’est pas elle-même épargnée par les mêmes voix qui lui reprochent d’avoir été francophone et membre de l’Académie française.

Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) est l’un des partis politiques algériens à réagir.

Réuni, vendredi 19 juillet, pour évoquer le sujet de l’heure qui est l’élection présidentielle du 7 septembre pour laquelle le président du parti est candidat, le bureau exécutif national du MSP n’a pas manqué d’apporter son grain de sel dans la polémique « Houaria ».

Algérie : le roman « Houaria » objet d’une polémique qui ne s’estompe pas.

Dans un communiqué qui a sanctionné la réunion, il a appelé « à prendre des mesures fermes contre certaines élites qui menacent les éléments constitutifs de l’identité nationale et visent à promouvoir l’usage d’un langage vulgaire dans des œuvres viles qui ne méritent pas d’être primées ».

Le député d’Oran Al Sid Cheikh Wahid a saisi pour sa part le Premier ministre, l’appelant à « ouvrir une enquête » et à prendre les mesures appropriées afin de retirer le roman de la vente.

Le député du mouvement El Bina, Younes Hariz a, lui aussi, interpellé Nadir Larbaoui pour prendre des sanctions contre tout responsable impliqué dans cette affaire. Le député FLN d’Oran Kada Hami en a fait de même.

Bien que ses détracteurs soient nombreux, « Houaria » a aussi ses défenseurs. Dès les premières heures de la polémique, des écrivains et intellectuels ont lancé une pétition pour apporter leur soutien à Inaâm Bayoudh, qui est aussi une universitaire de renom et directrice d’un prestigieux institut de traduction de la Ligue arabe basé à Alger.

Ces derniers jours, des écrivains à succès, francophones et arabophones, se sont joints à l’élan de solidarité avec la romancière.

Parmi eux, l’écrivain Waciny Laredj qui a déclenché une polémique dans la polémique. Dans sa défense de sa collègue et de son roman, Waciny a qualifié les détracteurs de « Houaria » de « janissaires ». Depuis, il reçoit presque autant d’attaques sur les réseaux sociaux que Inaâm Bayoudh.

Dans leurs commentaires, certains internautes accusent les pourfendeurs de « Houaria » de n’avoir pas lu le roman, du reste non diffusé à large échelle.

L’histoire véridique du procès de l’homme qui a tenté d’assassiner le prix Nobel égyptien Naguib Mahfouz en 1994 est rappelée. L’homme a indiqué au juge qu’il avait poignardé le romancier à cause de son roman « Les enfants de notre quartier », avouant toutefois qu’il ne l’a pas lu. Pendant ce temps, la première concernée, Inaâm Bayoudh, se mure dans le silence.

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