Figure très connue de la communauté algérienne en France, Abdallah Zekri dirige l’Observatoire national de lutte contre l’islamophobie. Il fait partie d’une délégation de six personnes qui sera reçue lundi à l’Élysée pour exprimer son indignation à la suite du soutien apporté par Emmanuel Macron aux dernières décisions du président Bouteflika.
Vous avez demandé à être reçus par Emmanuel Macron suite à sa réaction positive à la décision du président Bouteflika de rester en poste sans mandat. Cela vous a choqué ?
Les termes utilisés, à savoir “féliciter le président algérien”, c’est l’encourager à persévérer dans sa position qui n’est pas celle du peuple algérien. Celui-ci souhaite un changement profond qui passe au moins par le respect de la Constitution par Monsieur Bouteflika.
Nous sommes conscients du travail qu’il a accompli après la décennie noire pour avoir ramené la paix et la sécurité en Algérie, mais le peuple algérien, tout en reconnaissant son engagement pour le pays, veut aujourd’hui une plus grande place pour les jeunes, plus de liberté et de démocratie et une amélioration de ses conditions de vie, en adéquation avec les richesses du pays.
Considérez-vous cette réaction comme une ingérence de la France dans les affaires algériennes ?
Évidemment lorsqu’un peuple se soulève contre ses gouvernants et qu’un État étranger, particulièrement la France, ex-puissance coloniale, félicite ces derniers, cela peut être interprété comme une ingérence dans les affaires de l’Algérie.
Ce qui nous choque et nous étonne c’est le double langage de politique de la France. Au Venezuela, elle a une position favorable peuple vénézuélien. En Algérie, c’est une attitude tout à fait contraire. Elle s’est empressée de bénir une décision prise à contresens de la volonté populaire.
Qu’est-ce que vous attendez en ce moment de la classe politique française, pourvoir et opposition ?
Nous attendons de cette classe politique qu’elle soutienne le peuple algérien pour la liberté de manifester, de choisir son mode de vie et ses dirigeants et de se battre pour la liberté et la démocratie.
Elle doit informer l’opinion publique française de la réalité de ce qu’il se passe en Algérie et de ne pas faire paniquer les Français avec des déclarations irresponsables, à savoir “un éventuel exode des Algériens vers la France” qui est en réalité un fantasme nourri très souvent par certains hommes politiques racistes ou extrémistes, surtout à l’approche des futures élections européennes. Ces hommes, dont le fonds de commerce est l’immigration, ne changeront jamais leur discours.
Je vous assure que si le processus de changement qui s’est enclenché fait de l’Algérie un pays stable, et que les Algériens jouissent d’une liberté totale, et si le pays prospère, on verra l’inverse se produire, c’est-à-dire un retour des Algériens de France vers leur pays. Et j’irai plus loin, on verra des Français de plus en plus nombreux vouloir se rendre en Algérie.