La visite de Macron révèle un grand intérêt pour l’Algérie en France

La visite d’Emmanuel Macron et de sa délégation composée de 90 personnalités françaises et d’origine algérienne en Algérie laisse entrevoir un regain d’intérêt pour le pays.

Le président français atterrit à Alger ce jeudi 25 août avec comme objectif principal de renforcer la coopération dans tous les domaines entre l’Algérie et la France. Ministres aux portefeuilles ministériels stratégiques comme l’Economie, l’Energie ou encore l’Intérieur. Grands groupes français, entrepreneurs de tous horizons. Intellectuels et artistes. Emmanuel Macron vient faire la cour à l’Algérie.

Après une crise majeure l’an dernier entre les deux pays, la séduction reprend. La France vient en ami mais surtout en tant que partenaire qui a des besoins dans de nombreux domaines : énergie, entrepreneuriat, créativité, soft power, coopération militaire.

Le voyage d’Emmanuel Macron est plus ou moins présenté comme une exploration spéciale de toute l’Algérie et des opportunités qu’elle pourrait partager. Une rencontre sous le signe de l’avenir, de la jeunesse et du renforcement des liens, assure l’Elysée.

L’Algérie propulsée en avant par le contexte international

Fini la crise de couple entre la France et l’Algérie ? Les deux pays qui ont organisé cette visite spéciale, en attendant d’en préparer une plus formelle et plus politique, semblent vouloir se rabibocher par d’autres biais : la coopération économique, territoriale et humaine.

L’Algérie revient en force après des années de fermeture au reste du monde durant la pandémie. Mais aussi en raison de grands mouvements politique et social, en raison d’événements historiques comme le départ d’Abdelaziz Bouteflika ou encore le déclenchement du Hirak en février 2019.

Il est temps de reprendre la route des relations internationales. La crise du gaz a littéralement propulsé l’Algérie sur le devant de la scène. Fournisseur majeur de cet hydrocarbure pour l’Europe, le pays a de nombreux atouts à présenter.

Il est devenu le principal fournisseur de l’Italie grâce à un accord multipliant l’exportation de gaz via le gazoduc Transmed. C’est le seul pays européen qui a signé un contrat renforcé avec l’Algérie. L’Union européenne entière appelle à se rapprocher de l’Algérie avant que la pénurie de gaz soit réelle.

La France ne va pas passer à côté de l’opportunité de négocier avec ce pays dont les liens sont si particuliers. “Il n’y aura pas dans le domaine économique d’annonces de grands contrats ou de grande négociation de ce type”, précise-t-on du côté de l’Elysée.

Mais “pour montrer notre intérêt, celui du Président de la République, il y aura dans la délégation la PDG d’Engie, Catherine Macgregor.” Pas d’accord prévu en amont, mais au moins rappeler à l’Algérie qu’elle détient une force intéressante.

Le gaz relance l’intérêt pour les autres potentialités de l’Algérie

Une aubaine pour l’Algérie qui a une marge de négociations pour développer d’autres projets. Comme attirer des investisseurs étrangers, promouvoir le pays comme une destination touristique, faire rayonner sa culture.

L’Algérie ne s’en cache pas. “L’Algérie s’attèle à attirer les investissements de pays frères et amis à l’image du Qatar, de la Turquie, de l’Arabie saoudite et de certains pays considérés comme alliés stratégiques à l’instar de l’Italie et autres”, expliquait il y a quelques semaines Abdelmadjid Tebboune.

Il faut donc d’abord se montrer ami de l’Algérie pour accéder à ses atouts. Dans le cadre de ce voyage présidentiel, la liste définitive des personnalités faisant partie de la délégation n’a pas encore été rendue publique en raison d’éventuels changements.

Mais on sait que les services présidentiels ont été très sollicités en France par des acteurs de différents secteurs qui s’intéressent à l’Algérie. Depuis deux ans, le pays est devenu si inaccessible que faire partie du voyage est devenu primordial.

« Depuis qu’Emmanuel Macron a officialisé sa visite en Algérie, les téléphones de l’Élysée ne cessent de sonner », écrit Anne-Bénédicte Hoffner dans un éditorial publié dans le journal La Croix lundi 22 août. Elle explique que de nombreuses personnes entre ministres et stars souhaitent se glisser dans l’avion de Macron pour se rendre en Algérie, et chacun a ses raisons.

Dans la délégation d’Emmanuel Macron, on compte “8 entreprises dans la catégorie PME ou ETI qui accompagneront le Président”, précise l’Elysée. Sans oublier des organismes tels que l’Agence Française de Développement (AFD) ou encore la Banque publique d’investissement.

Les entreprises présentes “sont différentes start-ups françaises qui, pour certaines, ont déjà des projets en Algérie ou en lien avec des entrepreneurs algériens. Elles sont dans différents secteurs. Évidemment, le secteur de la data avec Datategy, c’est un exemple (…) on a également une start-up Ionosys, c’est aussi dans le secteur des data et puis, un incubateur par exemple Creative Valley.”

La data qui représente un enjeu mondial majeur ne sera pas le seul secteur à être représenté. “Le secteur du voyage et du déplacement avec la plateforme Riwaya Travel. Il y a également une start-up dans le domaine de la santé qui est aussi un domaine important de nos coopérations avec la startup Kape Cod”, explique encore la présidence française.

Avant le déclenchement de la pandémie, la France était le premier partenaire commercial de l’Algérie. La France aimerait revenir sur le ralentissement observé entre 2020 et 2021.

L’apparence d’un pays ouvert et à l’écoute ?

En face, l’Algérie n’est pas insensible aux charmes de la France. Le pays accueille avec grand plaisir l’énorme délégation accompagnant le président français. Avec notamment une première, la venue du Grand-rabbin de France Haïm Korsia, venu se recueillir sur la terre de ses parents, juifs d’Algérie.

Le Grand-rabbin sera aussi convié à un dîner organisé par la présidence algérienne. Un geste important et très symbolique pour l’Algérie qui est d’ailleurs très critiquée pour cette invitation spéciale, par des leaders politiques algériens comme Abderrazak Makri, le chef du MSP.

Peut-on y avoir un changement de paradigme de la part des dirigeants algériens, souvent accusés d’antisémitisme, notamment dans la presse marocaine ? « La venue de Haïm Korsia est une réponse claire au discours ambiant qui tente de diaboliser l’Algérie et de la faire passer pour un pays antisémite. Avec cette visite, l’Algérie montre aussi son ouverture », explique un spécialiste des relations franco-algériennes.

L’Algérie veut-elle brosser le portrait d’un pays davantage ouvert ? Au-delà de cette visite spéciale, le pays semble vouloir qu’on parle de lui. Emmanuel Macron avait été invité à participer aux Jeux Méditerranéens qui se sont déroulés à Oran. Son agenda n’a pas pu le permettre, mais on sentait l’envie de montrer une Algérie ouverte aux étrangers, au monde qui l’entoure et capable d’accueillir un événement de grande envergure.

L’accueil réservé à des artistes internationaux comme DJ Snake, que ce soit pour le tournage de son clip Disco Maghreb ou lors de son retour à l’occasion des Jeux Méditerranéens, est aussi le moyen de dire : l’Algérie est un pays avec des atouts et il est fréquentable.

Durant la visite d’Emmanuel Macron, la jeunesse algérienne est placée au cœur des rencontres. Le programme organisé avec l’accord de l’Algérie et de la France veut donner la parole à ce public. De jeunes entrepreneurs et startuppers algériens vont discuter avec le président qui sera d’ailleurs accompagné de l’homme d’affaires et symbole même de la “start-up nation” française, Xavier Niel.

Les sportifs et artistes algériens sont aussi mis en avant. Même la culture algérienne, la musique raï est mise en avant dans le programme prévu pour Emmanuel Macron et sa délégation.

L’Algérie met en avant son image moderne et sa société qui avance dans l’air du temps. Elle doit tirer profit de sa forte attractivité en France pour attirer les touristes, améliorer son image à l’international et attirer les investisseurs français et étrangers en général.