Les révélations faites par Walid Nekkiche devant le tribunal de Dar el Beida (Alger), lundi 1er février, ont jeté l’émoi dans toute la société algérienne. Le jeune étudiant, contre lequel la perpétuité avait été requise par le procureur, a révélé avoir été victime en garde à vue, lorsqu’il a été arrêté en novembre 2019, de sévices physiques et sexuels.
Les réactions de la société civile et des organisations de défense des droits de l’homme se poursuivent et les appels se multiplient pour l’ouverture d’une enquête pour faire la lumière sur cette grave affaire, punir les coupables et éviter que de tels faits ne se reproduisent.
Dans une déclaration commune, le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) et la Coordination nationale des universitaires algériens pour le changement (CNUAC), s’engagent à tout faire « pour que la vérité éclate, que tous les dépassements soient identifiés et que les responsables et les acteurs de ces actes ignobles rendent des comptes devant la Justice ».
« La mémoire historique est toujours vivante pou r nous rappeler le sacrifice de nos Chouhadas morts sous la torture de l’État colonial. Nous interpellons l’opinion publique, la conscience nationale, ainsi que toutes celles et ceux qui aspirent à une Algérie émancipée de la hogra et de l’arbitraire de réagir, de s’indigner, de dénoncer tous les responsables de ces actes barbares (…) L’affaire Nekiche ne doit surtout pas s’arrêter là, juste avec sa sortie de prison. Un comité contre la torture doit être constitué afin que jamais plus…. », ajoutent les deux organisations qui s’interrogent si c’est cela « le sort désormais réservé à la jeunesse algérienne ».
Walid Nekkiche, 25 ans et étudiant en sciences de la mer, a été arrêté en novembre 2019 à Alger lors d’une des marches organisées chaque mardi par les étudiants depuis février de la même année, dans le cadre du Hirak. Accusé de complot contre l’État et autres accusations graves, son dossier a été transféré en criminelle.
Jugé le 1er février par le tribunal criminel d’Alger après 14 mois de détention, il a écopé de six mois de prison ferme et libéré. C’est surtout la perpétuité requise par le procureur et les révélations du jeune étudiant qui ont choqué l’opinion. Le CNLD et la CNUAC, soulignent que ce « n’est que le énième cas des comportements inadmissibles des services de sécurité et de la justice ».
Dénonçant « la torture » et « la normalisation de la violence qui tendent à prendre des proportions alarmantes », les deux collectifs rendent hommage à l’étudiant qui a eu le courage de briser le silence. « Ce cri d’alarme marque un tournant pour la justice algérienne mise au banc des accusés. Nous ne pouvons que saluer le courage et la dignité de ce jeune étudiant, il est pratiquement le seul détenu à avoir brisé l’omerta en déposant plainte contre ses tortionnaires qui sévissent en toute impunité ». Le CNLD et la CNUAC regrettent en outre que la plainte pour tortures déposée en juillet 2020 par l’avocate de Walid Nekkiche soit restée sans suite.