Les engrais agricoles coutent plus cher en Algérie, avec l’entrée en vigueur vendredi 1er octobre de la mesure de révision et d’ajustement des prix de référence des engrais de 20%.
Le ministre de l’Agriculture, Abdelhamid Hemdani, a annoncé le 27 septembre, le relèvement du prix de référence des engrais (sur la base duquel est déterminé le taux de subventionnement par l’Etat) le portant à 8 000 DA le quintal contre 3 700 DA auparavant, suite à la hausse sensible des prix de ces intrants agricoles sur le marché mondial où le quintal est cédé à 14 000 DA.
« Cette mesure pourrait impacter significativement les grandes cultures en occurrence les céréales, les fourrages (par conséquent la viande rouge), la pomme de terre et la culture du canola, récemment introduite afin de réduire quelque peu la facture en devises de l’importation des graisses végétales », prévient l’expert en agronomie Mouloud Arkoub.
« Il est important de savoir que pour toutes ces cultures, l’efficience de l’azote, le phosphore et le potassium est substantielle lorsque l’eau n’est pas un facteur limitant », ajoute-t-il.
Selon cet expert, le principe qui est certainement retenu à travers cette mesure consiste à viser une meilleure productivité agricole « garante d’une stabilité de l’approvisionnement à des prix stables » et à l’abri de l’inflation.
« Maintenant, comment stabiliser un marché dont les prix s’envolent dangereusement? C’est précisément là le rôle régulateur de l’État », pointe-t-il.
Par ailleurs, des contraintes « structurelles » menacent de rendre sans effet une telle mesure sur les prix des produits agricoles. Sans levée de ces entraves « la subvention des intrants seule ne sera à mon avis qu’une solution de replâtrage d’urgence, dont l’effet souhaité sera dérisoire », prévient Mouloud Arkoub.
L’une des principales contraintes tient en premier lieu à la dépendance de l’Algérie vis-à-vis des marchés mondiaux des matières premières.
« L’agriculture algérienne est totalement dépendante de l’extérieur. En occurrence en termes d’intrants, semences, pesticides, pièces de rechange et la grande majorité des engrais, les solubles, les tertiaires… On ne fournit à l’agriculture que les bras, le mazout, et le sol, même pas la matière grise qui demeure en jachère. Dans ce cas, le moindre soubresaut sur le marché mondial nous atteint de plein fouet», relève M. Arkoub.
Pour lui, si les prix des produits agricoles subissent généralement l’effet yo-yo, « il est incontestable que l’année 2021 a vu les prix atteindre des seuils insupportables pour les ménages algériens » sans montrer des signes « d’un fléchissement raisonnable ».
Les rendements élevés seuls à même de moduler les prix
L’autre contrainte et non des moindres, souligne M. Arkoub, est celle de la faiblesse de la productivité des terres agricoles et « l’inefficience des facteurs de production due à une carence flagrante de technicité, malgré de gros efforts de formation en agronomie ».
Comment dans cas peut-on agir sur les prix ? « Les rendements élevés aux standards internationaux sont les seuls capables de moduler les prix à des niveaux acceptables », soutient l’agronome.
« Comme le prix s’établit quotidiennement dans les marchés de gros, le mécanisme transactionnel doit être établi puis régulé scrupuleusement lui aussi par une structure de suivi qui reste à créer », préconise-t-il.
L’expert pointe des pratiques qui sont loin d’être loyales qui portent un lourd préjudice au porte-monnaie des ménages algériens.
« Chaque jour, on assiste sur nos marchés de gros à une forme de “délit d’initié” dans les transactions sommaires faisant profiter naturellement les seuls mandataires, propriétaires comme on dit de carreaux, au détriment du consommateur », dénonce M. Arkoub, soulignant la nécessité que les transactions se plient à une « contrainte chronologique et temporaire », à l’image des marchés de gros mondiaux « qui ouvrent et ferment à des heures réglementaires strictes ».