C’est une interrogation qui s’ajoute à celles, nombreuses, qui entourent les relations entre l’Algérie et l’Espagne depuis trois mois.
L’information ne sort pas du néant. Elle est déduite d’une note d’une limpide clarté émise par un démembrement de l’État algérien.
Le 8 juin dernier, l’Algérie a annoncé officiellement la suspension du traité d’amitié signé avec l’Espagne en 2002. La décision a été prise en réaction à l’insistance du gouvernement espagnol à défendre sa nouvelle position sur la question du Sahara occidental.
Le 18 mars, le gouvernement de Pedro Sanchez a annoncé son appui au plan d’autonomie marocain, ce qui constitue un revirement historique sur le dossier de l’ancienne puissance occupante du territoire.
La suspension du traité d’amitié a été accompagnée de mesures d’ordre économique, comme le choix de l’Italie pour l’intensification de la coopération énergétique, alors que l’Espagne sollicitait elle aussi l’augmentation du flux de gaz algérien dans le contexte des retombées de la guerre en Ukraine.
De toutes les mesures annoncées, la plus douloureuse pour l’économie espagnole est celle portant le gel du commerce extérieur avec ce pays.
C’est du moins ainsi qu’a été interprétée une note de l’Association des banques et établissements financiers (ABEF), enjoignant aux banques de suspendre les domiciliations pour les transactions avec l’Espagne.
La note n’a jamais été annoncée officiellement, mais le gouvernement espagnol a saisi l’Union européenne devant laquelle il a dénoncé un manquement d’Alger à ses engagements contenus dans l’accord d’association de 2002. Bruxelles a pris la défense de l’Espagne.
« L’UE est prête à s’opposer à tout type de mesures coercitives appliquées à un État membre de l’Union européenne », ont indiqué le plus haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, et le vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis, dans une déclaration commune.
L’Algérie a répondu par le biais de sa représentation à Bruxelles qui a notamment indiqué que « la prétendue mesure d’arrêt par le gouvernement des transactions courantes avec un partenaire européen (…) n’existe en fait que dans l’esprit de ceux qui la revendiquent et de ceux qui se sont empressés de la stigmatiser ».
« Malentendu »
En Espagne, le gouvernement est pris à partie pour avoir mis en péril les relations de l’Espagne avec un partenaire important. Des craintes ont aussi été exprimées quant à la poursuite des approvisionnements en gaz Algérien. D’aucuns se sont demandé en tout cas qu’elle sera la prochaine étape dans l’escalade.
C’est dans ce contexte que la direction du tourisme de la wilaya de Bouira a adressé une note aux agences de tourisme leur enjoignant de cesser « immédiatement » toute relation de travail avec l’Espagne. L’auteur de la note a indiqué explicitement que cette décision a été prise suite à la suspension du traité d’amitié.
« Conformément à la décision des plus hautes autorités de l’État de suspendre le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération avec l’Espagne, il vous est demandé de suspendre dans l’immédiat toute relation de travail avec ce pays », lit-on dans la note.
L’information a été largement répercutée par les médias espagnols pendant toute la journée de ce lundi 20 juin.
Néanmoins, ceux qui en ont déduit que l’Algérie est passée à une autre étape dans ses représailles économiques en suspendant ses relations avec l’Espagne, sont apparemment allés vite en besogne.
La direction du tourisme de Bouira s’est en effet rétractée, évoquant un « malentendu ». « Il ne faut pas prendre en compte cette note. C’est un malentendu. Nous l’avons bien publiée, mais elle a été retirée. Une erreur s’est produite. Nous ne demandons rien aux agences de voyage. La note a été annulée », a indiqué le responsable de la direction du tourisme de Bouira au site spécialisé Visa-voyages Algérie.
Le démenti est aussi clair que la note elle-même. Le responsable n’explique toutefois pas la nature du « malentendu » qui a fait qu’une direction locale adresse une directive lourde de conséquences pour les relations entre deux Etats, en pleine crise de surcroît.