Économie

L’Algérie déploie d’importants moyens pour la récolte du blé dans le Sahara

Face à la montée en puissance de la production du blé dans le Sud, l’Algérie débloque d’importants moyens logistiques pour la récolte dans le Sahara.

Après le convoi de 130 camions arrivé cette dernière semaine dans la wilaya d’Adrar, c’est un deuxième convoi de 160 camions qui est arrivé à El Menia. Objectif, assurer la logistique de la récolte du blé. Un type de production en zone aride qui dépend de la disponibilité en eau.

Un convoi de 160 camions

Filmé par les caméras de la Télévision algérienne, c’est un convoi d’une centaine de camions de l’Office Algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) qui s’est dirigé vers El Menia. Une wilaya aux surfaces céréalières en constante augmentation et aux importantes ressources en eau.

Une partie du convoi est constituée de camions bennes de marques Shacman et Mercedes destinés au transport des cargaisons de grains depuis les exploitations céréalières vers les points de collecte temporaires tandis que des engins de plus grande dimension doivent permettre leur transport depuis ces centres de collecte vers les silos en dur. Dans l’imposant convoi, quelques camions porte-chars transportent des moissonneuses batteuses Sampo fabriquées localement.

S’étendant sur plusieurs centaines de mètres, le convoi est passé à proximité des champs circulaires si caractéristiques de l’agriculture saharienne irriguée par les rampes-pivots. Des champs dont certains sont protégés du vent par des brise-vents ou de simples remblais de terre.

Présent à l’arrivée du convoi à El Menia, Boumédiène Omrani, le directeur des transports au sein de l’Office algérien des céréales (OAIC) a confié à Ennahar Tv l’attention portée par le ministère de l’Agriculture et du développement rural à la production de céréales au Sud.

Les zones de production et les points de collecte

Ces moyens logistiques sont indispensables à la collecte des céréales dans une région où les distances entre les principales zones de production et les centres de stockage permanent se comptent en centaines de kilomètres.

Il faut compter 157 km entre Hassi Fehal et El Menia, 270 km entre Hassi Gara et El Menia et enfin 267 km pour aller d’El Menia à Ghardaïa. Aussi, la Coopérative des Céréales et de Légumes Secs (CCLS) d’El Menia a mis en place un réseau de points de collecte sommaire, mais fonctionnel avec cabine saharienne faisant office de bureau, pont bascule et plate-forme de stockage temporaire en plein air.

Si il y a quelques années, les superficies en céréales à El Menia, dans le Sahara algérien, étaient de quelques milliers d’hectares, celles-ci n’ont cessé de croître. Entre 2022 et 2023, elles sont passées de plus de 10.000 hectares à 13.000 hectares avec, en 2021, des rendements de 65 quintaux pour le blé dur et de 80 quintaux pour le blé tendre qui, après un timide démarrage, trouve toute sa place chez les investisseurs.

Des niveaux de rendement bien différents de la moyenne de 17 quintaux au Nord de l’Algérie et qui implique à la récolte la manipulation et le transport d’une masse importante de grains.

Céréales dans le Sahara algérien : un véritable engouement des investisseurs

L’engouement des investisseurs pour la culture des céréales irriguée reste important, d’autant plus qu’aujourd’hui, une partie des pivots utilisés pourraient être construits localement. Le groupe public de l’industrie mécanique (AGM) devrait entamer en mai « la production du premier pivot d’irrigation développé en Algérie », selon le Directeur général de l’industrie mécanique au ministère, Fawzi Kabir, qui s’exprimait lors d’un récent entretien à la chaîne I de la Radio Algérienne.

En 2023, dans la wilaya d’El Menia, un reportage de la Télévision algérienne rendait compte de cet engouement. Ahmed Khedda témoignait être passé, en 2022, de 60 hectares à 90 hectares en 2023 et exploiter 3 pivots.

Mahmoud Hadjadj indiquait cultiver 60 hectares et avoir bénéficié d’un agrandissement lui permettant d’en cultiver 60 hectares de plus. Abdelkader Bensouissi, pour sa part, se félicitait d’être passé d’un rendement de 50 quintaux à 82 quintaux.

À la récolte de grains, s’ajoute la récolte de la paille et la location des chaumes, des produits très prisés par les éleveurs de bétail.

Cet engouement s’explique par les subventions accordées à la production de céréales et à l’extension du réseau électrique qui permet aujourd’hui le raccordement des exploitations. L’énergie électrique est essentielle à la culture du blé, non seulement pour actionner les roues des rampes pivots, mais surtout pour pomper l’eau, ce qui constitue la dépense la plus importante en énergie.

Une eau souterraine située auparavant à quelques mètres de profondeur lors de ses débuts, témoigne Mahmoud Hadjadj, mais que les pompes doivent aujourd’hui aller chercher à 60 mètres de profondeur, ce qui augmente d’autant le montant des factures d’électricité à régler à la Sonelgaz.

Aux côtés d’investisseurs traditionnels, des ingénieurs agronomes se lancent également dans l’aventure. C’est le cas de Zakaria Allem, dont les rendements sont à l’optimum. Des résultats obtenus grâce à un pilotage précis des apports d’engrais, mais aussi au choix des variétés les mieux adaptées suite aux essais réalisés par l’ITGC dans la région. Enfin, à cela, s’ajoute la qualité de l’eau puisée localement qui est très peu chargée en sels.

Des céréales et des fourrages

Aux céréales est venue s’ajouter la production de fourrages. Dans la région, Mahmoud Hadjadj a été le premier à se lancer dans le maïs ensilage récolté sous forme de balles enrubannées. Aujourd’hui, ce pionnier a été imité par de nombreux investisseurs. À El Menia, nombreux sont ceux qui réalisent deux récoltes durant l’année : celle des céréales puis celle du maïs grain ou du maïs fourrage.

Ce niveau de production double les besoins en eau dans une région où la demande climatique mesurée par l’évapo-transpiration annuelle (ETP) atteint des sommets avec jusqu’à 2.000 mm, comme c’est le cas à Adrar.

Le Programme d’Appui au Secteur de l’Agriculture (PASA) financé par l’Union européenne et les travaux d’universitaires locaux ont montré que dans le cas de la culture de la pomme de terre à El Oued, il est possible de réduire les quantités d’eau utilisées grâce à une irrigation localisée et l’utilisation de sondes mesurant en continu l’humidité du sol.

Des spécialistes insistent également sur l’importance d’utiliser des brise-vent pour réduire les turbulences du vent qui induisent une surconsommation en eau et sur la nécessité d’enrichir les sols sahariens à l’aide de paille afin d’améliorer leur rétention de l’eau et des engrais.

En janvier 2020, lors d’un Conseil des ministres, le président Abdelmadjid Tebboune a instruit la création d’un Institut de l’Agriculture saharienne au Sud ayant pour mission la formation et l’encadrement pour ce type d’agriculture.

Des moyens humains indispensables à l’utilisation rationnelle de l’eau et à la recherche d’une durabilité de l’agriculture saharienne.

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