Le Conseil des ministres, réuni jeudi 27 décembre 2018, a adopté le projet de loi relatif aux activités nucléaires civiles. Un texte qui était dans les tiroirs du gouvernement depuis quelques années déjà.
La loi, qui sera examinée par l’APN durant le printemps prochain, permettra, selon le communiqué du Conseil des ministres, de réglementer les activités liées à « l’utilisation des matières nucléaires et des sources de rayonnement ionisants, ainsi qu’à la gestion des déchets radioactifs ».
La loi définira les règles de sûreté nucléaire et de radioprotection. Une Autorité nationale de sûreté et de sécurité nucléaire sera installée. Elle travaillera avec le Commissariat à l’énergie atomique (COMENA) qui existe depuis décembre 1996.
Alger est signataire de la Convention sur la sûreté nucléaire de 1994 (entrée en vigueur en 1996). Cette convention, qui concerne notamment les réacteurs électronucléaires civils, impose aux États de mettre en place un cadre législatif et administratif pour gérer les questions liées à la sûreté atomique et de créer un organisme ayant toutes les prérogatives et ressources nécessaires pour accomplir cette mission. Le projet de loi adopté en Conseil des ministres prend en charge partiellement ces obligations. Il définit les sanctions pénales applicables « aux infractions à la législation sur les activités nucléaires pacifiques ».
Une énergie peu exploitée
En juin 2015, le Centre de formation et d’appui à la sécurité nucléaire a été installé en application d’un décret présidentiel datant de février 2012. Présidé par Mohamed Derdour, le conseil est composé de représentants de plusieurs ministères dont ceux de l’Energie, de la Défense nationale, des Transports et de la Santé. La même année a été créé l’Institut algérien de formation en génie nucléaire.
La loi sur les activités nucléaires civiles vient donc compléter une mise à niveau législative à propos d’une énergie peu exploitée en Algérie malgré l’existence de deux réacteurs à Birine-Ain Oussera (Djelfa) et Draria (Alger). Les périmètres de sécurité de ces deux centres ont été tardivement fixés par décret respectivement en 2013 et en 2009. L’impact sur l’environnement immédiat n’a pas encore été étudié.
Alger a ratifié le TNP en 1994
Construit avec l’aide de l’Argentine et ouvert en 1989, le réacteur à eau légère Nour de Draria, d’une puissance d’un mégawatt, est surtout destiné à la recherche. Opérationnel depuis 1993, le réacteur Salam de Birine-Ain Oussara (à 250 km au sud d’Alger) est d’une puissance supérieure. Elle est de 15 mégawatts. Il a été construit avec un appui technique de la Chine.
Ces deux installations sont régulièrement visitées par les experts de l’AIEA, Agence internationale de l’énergie atomique, compte-tenu des dispositions prévues dans le TNP (Traité de non-prolifération des armes nucléaires), ratifié par l’Algérie en 1994.
Alger a également signé en février 2018, le Protocole additionnel au TNP sur le contrôle des installations nucléaires. Cette signature est intervenue après de fortes pressions américaines. En septembre 2017, Alger a signé le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Alger est signataire aussi de la Convention sur la protection physique des matières nucléaires. L’Algérie défend le droit des Etats d’utiliser en toute souveraineté l’énergie atomique à des fins pacifiques. D’où son soutien à l’Iran, pays signataire du TNP, d’utiliser le nucléaire civil.
Gestion de déchets nucléaires
S’appuyant sur sa doctrine diplomatique portant sur la diversification des partenaires, l’Algérie est signataire de plusieurs accords de coopération nucléaire avec la Russie, la Chine, la France, l’Argentine, les Etats Unis, l’Egypte, l’Afrique du Sud et l’Inde. La Chine, à titre d’exemple, forme les cadres en matière de sûreté nucléaire et élabore des programmes dans le domaine de la recherche scientifique.
En 2007, l’Algérie et les Etats-Unis ont signé un accord nucléaire consacrant la coopération entre les laboratoires et instituts spécialisés des deux pays et une assistance technique pour des projets de recherche. Cela concerne, entre autres, la production de l’électricité, le dessalement de l’eau de mer et la gestion des déchets nucléaires.
L’ancien ministre de l’Energie, Chakib Khelil a déclaré, en 2007, que l’Algérie n’avait pas encore de déchets nucléaires à gérer, mais que le problème allait se poser dans l’avenir avec l’ouverture de « centrales nucléaires ». La construction de ces centrales ne semble pas être à l’ordre du jour pour des considérations pratiques, financières et politiques.
N’ayant pas encore de modèle énergétique précis, l’Algérie, qui dépend en grande partie des hydrocarbures, entend développer le nucléaire pour des projets relatifs à l’agriculture, à l’économie de l’eau, à l’électricité et à la santé (la lutte contre certaines maladies comme le cancer). Reste à définir une stratégie claire pour y parvenir surtout que la gestion de l’énergie nucléaire exige une haute technicité et une grande prudence sur les plans politique et sécuritaire.