Moins d’un mois après son retour à la tête de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra a mis le cap sur l’Afrique avec l’objectif de replacer l’Algérie au cœur de la gestion des crises et des conflits sur le continent.
Il est attendu avant tout du diplomate chevronné de faire retrouver à la diplomatie algérienne tout le poids qui était le sien en Afrique.
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Moins d’un mois après son entrée en fonction, il a déjà visité quatre capitales africaines : Tunis, Addis-Abeba, Khartoum et le Caire.
La tournée africaine de Ramtane Lamamra s’inscrit dans le sillage du redéploiement de l’Algérie sur le continent.
Avec Lamamra, un autre souffle est attendu pour la diplomatie algérienne en Afrique. L’homme a derrière lui une longue carrière et de nombreuses médiations de règlement de conflits sur le continent. Il a été à deux reprises commissaire pour la paix de l’Union africaine.
La visite du chef de la diplomatie algérienne en Tunisie, où il s’est rendu au lendemain des événements politiques qu’a connus ce pays avec les décisions prises par le président Kaïs Saeïd de dissoudre le Parlement et de limoger le Premier ministre, a été imposée par l’actualité politique et la situation sanitaire, notamment dans le pays voisin qui a trouvé une aide médicale précieuse auprès de l’Algérie au plus fort de la pandémie de covid-19.
Mais il n’en reste pas moins qu’elle a aussi servi à aborder la question du barrage éthiopien de la renaissance, un dossier dans lequel la Tunisie s’est impliquée en soumettant, en sa qualité de membre non-permanent du Conseil de sécurité, un projet de résolution pour l’arrêt du remplissage du barrage.
Rattraper le retard en matière de coopération économique
La tournée de Lamamra dans les trois autres pays africains s’inscrit en effet en droite ligne de la volonté de l’Algérie de retrouver son rôle d’État influent et écouté sur la scène africaine.
Le règlement du conflit autour du barrage de la Renaissance entre l’Éthiopie d’un côté et l’Égypte et le Soudan de l’autre, est dans la ligne de mire de la diplomatie algérienne.
Le conflit menace d’une guerre ouverte entre les trois pays, tant chaque partie campe sur ses positions et toutes les tentatives de le régler pacifiquement ont jusque-là échoué. La crise s’est corsée depuis le 9 juillet après l’annonce par Addis-Abeba de l’achèvement du deuxième remplissage de l’ouvrage géant, une action qui menace les parts du Soudan et de l’Égypte des eaux du Nil.
« Fidèle à sa doctrine relative au règlement pacifique des différends et sa culture historique en matière de médiation, l’Algérie appuie la recherche d’une solution équitable et équilibrée à la question problématique de l’exploitation du barrage de la renaissance », a expliqué une source proche du dossier à TSA.
Jeudi 29 juillet, Lamamra a été reçu par la présidente éthiopienne, Sahle-Work Zewde, en sa qualité d’envoyé spécial du président de la République Abdelmadjid Tebboune. « Le remplissage du barrage de la Renaissance » a bien figuré au menu des discussions, a confirmé la présidente de l’Éthiopie sur Twitter.
Le ministre algérien s’est ensuite rendu au Soudan, puis en Égypte. Au Caire, il a confirmé ce samedi 31 juillet que l’Algérie compte jouer un rôle dans le règlement du litige.
« Nous voulons être une partie de la solution dans les grands dossiers qui concernent nos frères, quand les conditions sont favorables. Nous souhaitons que l’Éthiopie, l’Égypte et le Soudan puissent parvenir à des solutions satisfaisantes qui garantissent les droits de chaque partie », a déclaré Lamamra au cours d’une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien Sameh Shoukri.
« L’Algérie, a-t-il ajouté, considère que la relation entre les États du bassin du Nil, notamment l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie, passe par une période délicate et nous ne devons pas nous contenter d’une connaissance superficielle du dossier du barrage de la Renaissance ».
« Nous continuons à porter un intérêt au dossier parce qu’il est important pour les pays frères et amis et nous tenons à ce que la relation entre les États arabes et africains soit distinguée », a insisté Lamamra.
Contribuer à désamorcer la crise dans cette région de l’Afrique serait une façon retentissante pour l’Algérie de sonner son retour sur la scène continentale en tant qu’État pivot et influent. La dernière crise réglée par la médiation directe de l’Algérie en tant qu’État est le conflit armé entre l’Éthiopie et l’Érythrée en 1999-2000.
L’éclipse, du moins le manque d’agressivité de la diplomatie algérienne, a grandement profité au Maroc qui s’est déployé en force sur la scène africaine, notamment par le biais de la diplomatie économique.
C’est surtout sur ce terrain concret qu’est attendue la diplomatie algérienne : tisser des liens étroits, jeter les ponts d’une coopération économique véritable et encourager l’accès de la production et du capital algérien sur les marchés africains.