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L’amendement du Code pénal suscite des critiques et des inquiétudes

L’amendement du Code pénal suscite des critiques et des inquiétudes

Les amendements apportés au Code pénal, adoptés jeudi par les deux Chambres du Parlement, suscitent des réserves, voire inquiétudes, chez des avocats et des défenseurs des droits de l’Homme interrogés par TSA.

Pour l’avocat Me Noureddine Ahmine, la conjoncture actuelle marquée par l’épidémie du coronavirus ne prête pas à une telle démarche. « Ces amendements sont faits dans l’objectif de museler la société. Ils visent aussi le besoin de la population de poursuivre le hirak. Les concepteurs anticipent le fait qu’après le dé-confinement la population reprenne ses manifestations », explique-t-il.

L’avocat se dit frappé par la rapidité avec laquelle ce projet de loi a été adopté. « Dans une pandémie de cette ampleur, il n’y a aucune nécessité à cela, sans parler du contenu. Est-ce que cette loi est vraiment applicable, est-elle dans l’intérêt de la société et de l’État algériens ? Non seulement, la conjoncture ne s’y prête pas mais ce genre de loi doit faire l’objet d’un débat au sein de la société. Les lois sont conçues pour protéger les libertés. Elles doivent être en conformité avec la Constitution notamment son article 157 qui stipule que le pouvoir judiciaire protège la société et les libertés », poursuit l’avocat.

Me Ahmine s’inquiète également du phénomène « d’élasticité » de certains concepts juridiques qu’il estime « contraires à l’esprit des lois pénales ». Ils risquent « de devenir un instrument de répression de la société et de musellement des libertés. Pour amender un texte, il faut démontrer l’insuffisance des textes actuels, Or cela n’a pas été démontré », conclut-il.

L’avocat et militant des droits de l’Homme Me Mostefa Bouchachi estime, lui aussi, que le moment n’est « pas propice » pour promulguer cette loi dans « un contexte qui suppose que l’Algérie protège les citoyens contre cette épidémie ».

Aussi, Me Bouchachi considère qu’amender le Code pénal « exige d’associer l’ensemble des hommes de loi ». « La célérité dans l’adoption de cette loi par le Conseil des ministres et par un parlement illégitime au sein duquel il y avait un nombre restreint de parlementaires, je pense qu’il n’est pas normal qu’un système politique donne une telle image au monde. Que dans les conditions sanitaires actuelles, il procède à l’amendement du Code pénal, dès lors que ce n’est pas une priorité », détaille l’avocat.

« Ces amendements peuvent être un moyen juridique pour accentuer les poursuites contre les activistes pour atteinte à l’unité nationale et à l’ordre public », s’inquiète Me Bouchachi. L’avocat relève toutefois quelques points positifs dans le nouveau texte à l’instar de la criminalisation de « l’atteinte à l’intégrité des examens et concours » et le chapitre qui criminalise « le faux pour l’obtention des subventions et des aides publiques ».

L’avocat et président de la Ligue des droits de l’Homme (LADDH), Me Nourredine Benissad, qui se réserve de commenter le contenu du Code pénal amendé dont il n’a pas eu une connaissance préalable, estime toutefois que le processus d’adoption de l’amendement du Code pénal se caractérise par « une certaine opacité ».

Il souligne néanmoins que l’Algérie est tenue de se conformer aux conventions et traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme. « L’Algérie a ratifié pratiquement toutes les conventions internationales sur la question des droits de l’Homme, notamment les lois qui se rapportent à la liberté d’expression et de la presse. Cela signifie que la loi internationale devient supérieure à la loi interne. En principe, toutes les lois adoptées y compris donc celle-là doivent être en conformité avec l’esprit et la lettre des conventions internationales. Quand on ratifie les conventions internationales, on a des engagements internationaux qu’on doit respecter », souligne Me Benissad.

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