Des dizaines de chômeurs de la localité de Mécheria dans la wilaya de Nâama ont bloqué durant toute la journée de ce mardi 4 avril 2017 le chantier de la centrale électrique situé dans la zone de Touifza, non loin de la route reliant Nâama à Tlemcen.
À l’appel de la Cellule de la société civile pour les chômeurs, créée récemment, plus de 300 sans-emplois ont débarqué au niveau du site pour bloquer complètement les accès en scandant des slogans « Non à la hogra » et « Non à la marginalisation ». Les manifestants ont reçu le soutien des syndicats des entreprises présentes sur chantier.
« Nous protestons contre le refus des sociétés étrangères d’embaucher des jeunes chômeurs de la région alors que le premier ministre Abdelmalek Sellal a ordonné de donner priorité à la main d’œuvre locale dans les recrutements. La loi algérienne est violée par ces entreprises étrangères », explique Abdelkader Kebir, porte-parole des chômeurs.
Selon lui, le mouvement de protestation a commencé, il y a plus de deux mois, avec un sit-in devant l’antenne de Nâama de l’Agence nationale de l’emploi (ANEM). « Après ce mouvement, le wali de Nâama nous a promis de trouver au moins 200 postes dans ce chantier. Là, nous réclamons le départ de tous les travailleurs étrangers ou ceux qui ne sont pas de la région et qui ont été recrutés en plus du quotas fixés au début. Il y a eu trop de dépassements. L’entreprise tunisienne Ceri, par exemple, devait recruter 438 salariés parmi les locaux et 86 tunisiens. Or, on a constaté que Ceri a recruté à peine 100 locaux et ramené 135 tunisiens dont certains n’ont pas de permis de travail », a-t-il précisé.
Ceri est une entreprise spécialisée en montage industriel dans les secteurs de l’énergie et du BTP.
À El Méchria, elle sous traite pour Samsung C & T Corporation qui est le maître d’œuvre du projet. Cette filiale du groupe sud-coréen Samsung travaille avec d’autres entreprises comme Sarpi (Société algérienne de réalisation de projets industriels). Détenue à part égale par Sonatrach et l’Italien ABB, la Sarpi s’occupe des travaux mécaniques au niveau du chantier. Il lui est reproché également de ne pas recruter de la main d’œuvre locale. Il en est de même pour le Belge Fabricom spécialisé dans les installations électriques.
« Des travailleurs étrangers pour conduire des clarcks »
Selon les protestataires, les entreprises ont recruté des travailleurs des Philippines et d’Inde. « Ils les embauchent comme soudeurs, manœuvres ou cuisiniers alors qu’il y a des dizaines de travailleurs de ces profils à Mécheria. Ils ont même ramené des étrangers pour conduire des clarcks comme si nous ne savions pas conduire ces engins ! », dénonce un des animateurs du mouvement de protestation.
« Les entreprises se sont engagées à recruter jusqu’à 3000 salariés. Il n’en est rien, à peine 1000 à 1500 travaillent sur le chantier. Selon l’ANEM, ils ont à peine recruté 20 % d’Algériens, tous les autres travailleurs viennent de l’étranger. Des travailleurs dix fois mieux payés que les nationaux. Un simple manœuvre est payé en euros pour l’équivalent de 200.000 dinars alors que le travailleur algérien qui a la même compétence et le même poste est payé entre 40.000 et 60.000 dinars », précisé Abdelkader Kebir.
Le projet de la centrale électrique de Mécheria a été lancé le 30 septembre 2014 par Youssef Yousfi, alors ministre de l’Énergie. Et, il a été effectivement annoncé à l’époque que ce projet générera 3000 emplois temporaires durant la phase de réalisation et emploiera 354 personnes à titre permanent dès l’entrée en exploitation de la centrale électrique d’une capacité de 1663 mégawatts.
Théoriquement, le chantier doit s’achever en 2018. La centrale de Méchéria fait partie d’un plan d’urgence lancé par la Sonelgaz pour doter le pays d’une capacité supplémentaire de 8400 mégawatts pour répondre aux besoins croissants de consommation de l’électricité. Une consommation qui va doubler en 2030, selon le ministère de l’Énergie. Le plan porte sur la construction de six centrales au niveau national.