Politique

Le cœur du bouteflikisme touché

Ils forment un élément central de ce qu’Ali Benflis, le premier depuis longtemps, a désigné sous le nom de forces “anticonstitutionnelles”. Ce sont les frères Kouninef, propriétaires du groupe Kou GC, qui ont été arrêtés par la gendarmerie dans le cadre d’une enquête aux vastes ramifications.

Sont visés notamment les chefs d’inculpation de non-respect des engagements contractuels avec l’État, trafic d’influence avec des fonctionnaires, détournement du foncier. La fratrie était déjà soumise à une Interdiction de sortie du territoire national (ISTN) décidée la veille de la démission de Bouteflika.

Bien plus qu’Ali Haddad qui apparaît de plus en plus dans le rôle de bouc-émissaire programmé, les frères Kouninef sont réellement des proches des Bouteflika. Rédha et Noah, les plus influents d’entre eux, sont des amis de Saïd. On leur prête le pouvoir de faire et de défaire des carrières de ministres et hauts fonctionnaires dans une de ses maisons sur les hauteurs d’Alger où se décide le sort de l’Algérie bien plus que sous les lambris des bâtiments institutionnels.

Hormis l’un d’entre eux qui s’exhibait ostensiblement sur page Facebook où il se montre vautré dans son yacht ou sur ses lieux de villégiature, les frères Kouninef sont plutôt discrets. Ils n’ont pas la notoriété d’un Ali Haddad, propulsé à la tête du FCE, d’un Issad Rebrab, actif sur le terrain médiatique.

Malgré leur influence, les frères Kouninef ont fait le choix de se tenir éloignés des lumières des médias. « A Alger, personne ne les connaît », explique un homme d’affaires. Sans faire de vagues, leurs affaires ont prospéré exponentiellement depuis l’arrivée de Bouteflika. Leur empire comprend le BTP, le génie civil pétrolier, les télécoms, la sécurité. Mais aussi l’agro-alimentaire où ils sont venus concurrencer le groupe Cevital. Issad Rebrab les rend d’ailleurs responsables de tous les blocages dont il a eu à souffrir ces dernières années.

Nés d’une mère de nationalité suisse qui leur a donc transmis la citoyenneté de son pays, c’est de leur père qu’ils ont hérité la proximité avec la famille Bouteflika.

Ahmed Kouninef, homme d’affaires, avait connu Abdelaziz Bouteflika dans les années 80 en Suisse. C’était la période où l’ancien ministre des Affaires étrangères connaissait ses déboires juridiques, condamné à reverser les reliquats des budgets des ambassades vers un compte spécial.

Ahmed Kouninef avait témoigné sa solidarité et, semble-t-il, avait aidé Abdelaziz Bouteflika à reconstituer en partie les sommes réclamées par la justice en vue de les rembourser. Revenu au pouvoir, qui plus est à sa tête, Bouteflika a montré qu’il était capable de rancune mais aussi de reconnaissance.

Son ami n’a rien demandé pour lui. Ahmed Kouninef lui a demandé de veiller sur sa progéniture. Bouteflika s’est montré fidèle. Jusqu’à partager le pouvoir avec eux. Il les emporte avec lui dans sa chute.

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