Le genêt de Faure, plante endémique de la région de Sidi Khaled dans la wilaya de Tiaret, a été officiellement déclaré disparu en 2017, suite à un long travail de recherche.
L’étude dirigée par le Dr Mohamed Djamel Miara, Mohammed Ait Hammou tous deux de l’Université de Tiaret et Jah Skipper de l’University of Reading au Royaume Uni a été menée entre 2012 et 2017 et a consisté en une recherche minutieuse de la plante dans la région où elle est endémique.
Une plante sans défenses
« Nous avons mené une étude scientifique qui a couvert une zone de 20 kilomètres carrés que nous avons divisés en petites zones avec un maillage d’un kilomètre carré de côté mais nous n’avons pas trouvé la plante », explique à TSA le Dr Miara, spécialiste en botanique, taxonomie et écologie végétale.
L’Adenocarpus faurei Maire, nom scientifique du genêt de Faure est une plante cousine du genêt commun en Algérie mais dont il est différent par son absence d’épines. « C’est une plante qui n’a pas de défenses comme des épines, c’est une plante inerme et c’est en partie ce qui a causé sa disparition », détaille le maître de conférences à l’Université de Tiaret.
La plante disparue n’a été observée de façon scientifique qu’une seule fois en 1926, année de sa description mais « elle a dû continuer d’exister au moins jusqu’à l’indépendance », souligne le chercheur pour qui les causes de la disparition de la plante sont principalement « le pâturage intensif et l’extension de l’urbanisme vers cette zone qui était auparavant une forêt ».
Selon le biologiste, « la région a été complètement modifiée, des habitations ont été construites, ce n’est plus une forêt comme à l’époque de l’observation de la plante ».
Les changements climatiques ne sont pas à mettre en cause selon l’auteur de l’étude car « c’est une disparition à petite échelle, les variations climatiques ne sont pas un facteur direct de la disparition de ces plantes, c’est surtout l’action anthropique (humaine) qui est impliquée ».
« L’ignorance des habitants et des autorités est à mettre en cause aussi car il suffisait de demander à des spécialistes s’il y avait des régions à protéger, ça n’a pas été fait », regrette le Dr Miara.
Les herbiers derniers témoins de l’existence du genêt de Faure
La plante a complètement disparu, l’étude qui a duré cinq ans n’a permis de retrouver le moindre spécimen et les seuls échantillons de la plante qui existent encore sont ceux qui ont été conservés dans des herbiers, notamment en France, dans l’herbier de Montpellier qui contient un spécimen avec des graines, explique le Dr Miara.
« J’ai demandé à des généticiens s’il serait possible de réintroduire la plante et ils m’ont répondu que c’est impossible car la durée de vie d’une graine n’est pas aussi longue », regrette le botaniste pour qui il n’y a plus aucun espoir de revoir le genêt de Faure ailleurs que dans des herbiers.
Des études comme celle qu’ont menées le Dr Miara et ses collègues sont rares en Afrique du Nord, une erreur pour le chercheur. « C’est la première étude de ce genre et il doit y avoir beaucoup d’autres plantes endémiques disparues ou sont menacées de disparition sans qu’on le sache car il n’y a pas d’études menées à ce sujet », déplore le botaniste.
La difficulté à mener de telles études et les nombreuses années de travail qu’elles nécessitent sont probablement ce qui empêche l’étude de la situation des plantes endémiques algériennes, selon le Dr Miara qui explique que « pour qualifier ou donner un statut de disparition à une plante il faut une étude comme celle que nous avons menée et elles se font sur du long terme car il y a des critères scientifiques à respecter. Il faut chercher une plante pendant au moins cinq ans sans la trouver avant de la déclarer éteinte ».
D’autres plantes rares et endémiques menacées de disparition
À l’Ouest de l’Algérie, région explorée par le Dr Miara, de nombreuses plantes endémiques restent introuvables. « J’ai cherché certaines plantes à Oran, Tlemcen, Sidi Bel Abbès et Tiaret sans les trouver », affirme-t-il, ajoutant que « le bilan des plantes disparues peut être très lourd ».
Parmi les plantes endémiques de l’Ouest du pays et qui ont disparu ou risquent de disparaître, il y a la Bellevalia pomelii Maire, petite plante bulbeuse endémique du plateau des Gamhras sur le mont Murdjajou à Oran aménagé depuis quelque temps en zone militaire. La plante a été observée par le Dr Miara une seule fois en 2009 et depuis « elle n’a jamais été revue dans cette station unique où elle a été signalée ».
Orobanche ducelieri Maire, petite plante signalée dans la région de Saida a été recherchée par l’équipe du Dr Miara en vain, tout comme Atractylis caerulea Batt, signalée au sud du plateau de Sersou à Tiaret et qui n’a jamais été revue depuis sa description.
Ces plantes très rares ne poussent pas ailleurs que dans leurs régions où elles sont endémiques et c’est ce caractère qui en fait des plantes fragiles, selon le Dr Miara, car « si elles disparaissent de leur zone, elles ne seront pas retrouvées ailleurs ».
Même si le bilan dressé par le Dr Miara est lourd pour les plantes endémiques algériennes, l’espoir reste permis selon lui car des plantes endémiques et rares, dont certaines semblaient éteintes ont été retrouvées lors de certaines de ses recherches. Otocarpus virgatus, petite plante aux feuilles oblongues et aux fleurs jaunes a, par exemple, été redécouverte par l’équipe du Dr Miara à Frenda, au sud de Tiaret.