Les relations interarabes ne tiennent parfois qu’à très peu de choses. Il a suffi d’une déclaration d’un ministre libanais, faite avant son entrée en fonction, pour qu’une crise s’ouvre entre les monarchies du Golfe et le Liban.
Le 5 août, George Kordahi a critiqué l’intervention au Yémen de la coalition menée par l’Arabie Saoudite et qualifié les rebelles Houthis de résistants qui défendent leur pays contre une agression extérieure.
Kordahi a été nommé le 10 septembre ministre de l’information dans le gouvernement libanais mais l’Arabie Saoudite et ses voisins du Golfe ne lui pardonnent pas d’avoir tenu de tels propos et c’est tout le Liban, déjà confronté à une crise économique aigue, qui se retrouve dans leur collimateur.
Vendredi, l’Arabie Saoudite a rappelé son ambassadeur à Beyrouth et donné 48 heures pour l’ambassadeur du Liban à Ryad pour quitter le territoire.
Ce samedi, le Bahreïn et le Koweït lui ont emboîté le pas, rappelant leur représentant à Beyrouth et ordonnant le départ sous 48 heures de l’ambassadeur et du chargé d’affaires libanais respectivement à Manama et Koweït.
Les raisons de la colère des monarchies du Golfe
Le gouvernement libanais s’est pourtant excusé et le Premier ministre Najib Mikati s’est désolidarisé publiquement des propos de son ministre, tenus avant sa nomination.
Le Koweït explique sa décision par « l’échec » du gouvernement libanais à « répondre aux propos inacceptables et répréhensibles tenus contre l’Arabie saoudite et le reste des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ».
Il accuse aussi le Liban de n’avoir pas pu prendre les mesures nécessaires pour empêcher la contrebande de drogue vers le Koweït et le reste des pays du Golfe.
Le Koweït a décidé le rappel pour consultations de son ambassadeur au Liban et le départ du chargé d’affaires libanais dans les 48 heures, a annoncé le ministère des Affaires étrangères.
Le Liban traverse une période très délicate, marquée par une crise économique aggravée par les effets de la crise sanitaire et de l’explosion au port de Beyrouth en août 2020. Sa situation risque de se compliquer avec cette crise avec les riches monarchies arabes sur l’aide desquelles tablait le gouvernement pour amortir les effets de la crise et redresser la barre.
En novembre 2017, le premier ministre libanais de l’époque, Saad Al-Hariri, avait annoncé sa démission à partir de l’Arabie Saoudite où il se trouvait en visite officielle. Certains observateurs avaient soupçonné les autorités saoudiennes de l’avoir retenu et contraint à annoncer sa démission pour confondre le Hezbollah, ennemi chiite des monarchies sunnites du Golfe.
Al-Hariri ne quittera le royaume qu’après l’intervention de certains dirigeants des grandes puissances.
La même année, c’est avec un membre du CCG, le Qatar, que les pays du Golfe et l’Egypte se sont gravement fâché à cause des positions du petit émirat vis-à-vis de l’Iran et du mouvement des Frères musulman. L’embargo imposé au petit émirat gazier ne sera levé qu’en janvier 2021.