Toufik Torche est président de la Commission des finances et du budget à l’Assemblée populaire nationale (APN). Il répond à nos questions sur le projet de Loi de finances complémentaire pour 2018 qui sera débattu dans les prochains jours à l’APN. Entretien.
La commission a entamé aujourd’hui l’examen du projet de loi de finances complémentaire pour 2018. Quelle lecture faites-vous de ce texte ?
Le gouvernement a justifié l’élaboration de ce projet par deux arguments principaux. Le premier a trait à la protection de la production nationale, à travers l’instauration d’une taxe additionnelle sur les produits importés. Cette loi s’imposait également après la décision du gouvernement de prévoir une rallonge de 500 milliards de dinars en autorisations de programme destinées au financement notamment de projets sociaux et d’infrastructures.
Le président Bouteflika a annulé les taxes sur les documents biométriques. Comment avez-vous accueilli cette décision ?
Nous avons reçu cette décision avec beaucoup de satisfaction. C’est une mesure courageuse et juste. Le président a, en réalité, soulagé les députés d’un énorme fardeau. Imaginez un peu la situation de la majorité parlementaire si le président n’était pas intervenu. Nous appliquons le programme du gouvernement : refuser une disposition émanant de l’Exécutif aurait mis les élus dans l’embarras, l’accepter nous aurait placés dans une situation très inconfortable vis-à-vis du peuple.
Le projet de Loi de finances complémentaire 2018 propose l’instauration d’un droit additionnel provisoire de sauvegarde en matière de commerce extérieur. Cette mesure ne risque-t-elle pas de fragiliser davantage le pouvoir d’achat des Algériens ?
Non, en aucun cas. Cette taxe concerne uniquement les marchandises produites localement. C’est fait dans le souci de protéger la production nationale. Cette décision, à mon avis, va servir à libérer le marché du monopole. Il faut le dire, le système des licences instaure involontairement le monopole sur le marché. L’importation sera désormais libre après la promulgation de ce projet. Cela pourrait créer de la concurrence avec un impact positif sur les prix.
Le gouvernement a institué une TVA de 19% pour le montage automobile. Quel impact aura selon vous cette décision sur les prix des véhicules ?
Nous avons abordé aujourd’hui cette question avec le ministre du Commerce qui est très favorable à l’instauration de cette taxe. Soyons francs. Le marché de l’automobile en Algérie n’obéit à aucune règle. Les constructeurs imposent leurs lois.
Trouvez-vous normal la décision d’une marque montée localement de décréter une baisse allant jusqu’à 500.000 dinars pendant le Ramadan ? Je n’ai pas besoin de prouver que même avec cette baisse, le constructeur préserve une bonne marge de bénéfice. Il est tout à fait légitime qu’un investisseur engrange des bénéfices, mais la marge bénéficiaire doit être raisonnable et de surcroît contrôlée.
Le marché de l’automobile ne profite actuellement ni aux citoyens ni à l’État. Au sein de la commission, nous pensons qu’il faut réfléchir à d’autres formes d’exonération. À d’autres avantages au profit des constructeurs.