Les 28 ministres des Finances de l’Union européenne se sont entendus sur une liste de pays « blacklistés », tous extérieurs à l’Union européenne, parmi lesquels la Corée du Sud, la Tunisie ou encore les Emirats Arabes Unis. Le Maroc, repêché de justesse figure cependant sur une “liste grise” selon des sources diplomatiques
C’est un tournant majeur dans la lutte contre les paradis fiscaux. Les 28 ministres des Finances de l’UE ont adopté mardi, lors d’une réunion à Bruxelles, une « liste noire » de 17 paradis fiscaux opérant hors de leurs frontières. « Nous avons adopté aujourd’hui au niveau de l’UE une liste d’Etats qui ne font pas le nécessaire pour lutter contre l’évasion fiscale. Cette liste, qui est une liste noire, comprend 17 États », a annoncé le ministre français de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, devant des journalistes, à l’issue de cette rencontre.
C’est une première pour l’Union après les scandales récents qui ont révélé différents systèmes d’évasion fiscale : LuxLeaks fin 2014, Panama Papers en avril 2016 et Paradise Papers en novembre 2017. Jusqu’au tout dernier moment, cette liste a fait l’objet de tractations entre les États membres. Car, conformément aux règles européennes sur les questions fiscales, les 28 devaient s’entendre à l’unanimité sur le nom des pays « blacklistés ».
LE MAROC FIGURE SUR UNE SECONDE « LISTE GRISE »
Une première liste « noire » comporte 17 pays. Selon une source diplomatique, les Etats qui figurent sur cette liste sont les suivants : Bahreïn, Barbade, Corée du Sud, Emirats Arabes Unis, Grenade, Guam, Îles Marshall, Macao, Mongolie, Namibie, les Palaos, Panama, Samoa, les Samoa américaines, Sainte Lucie, Trinidad-et-Tobago et Tunisie. Cette liste noire doit être régulièrement actualisée, selon plusieurs sources européennes.
Les ministres des Finances se sont également mis d’accord sur une seconde liste de pays qui se sont engagées à améliorer leurs pratiques. « Il y a 47 pays sur une liste grise » a précisé Bruno Le Maire. Selon une source diplomatique, le Maroc et le Cap Vert, qui avaient envoyé des engagements très récemment, y figurent. Parmi ceux qui ont décidé de se plier aux demandes de l’UE, les pays développés ont jusqu’à fin 2018 pour le faire et les pays en voie de développement jusqu’à fin 2019.
Quant aux éventuels paradis fiscaux des Caraïbes dévastés par des ouragans en septembre dernier, ils bénéficient d’un délai supplémentaire, jusqu’au printemps 2018, pour fournir des informations. Il s’agit entre autres d’Anguilla, Antigua et Barbuda, les Bahamas, la Dominique, les Iles Vierges britanniques, les Iles Vierges américaines et les Iles Turks-et-Caïcos.
TROIS CRITÈRES POUR ÉTABLIR LA LISTE
Épaulés par la Commission européenne, qui pousse depuis deux ans à l’établissement de cette liste, les 28 États membres ont passé au crible un total de 92 juridictions (États et territoires) susceptibles de poser problème à l’aune de trois critères :
La transparence fiscale : pratiquent-elles ou non l’échange automatique d’informations ?
L’équité fiscale : appliquent-elles ou non, par exemple, des mesures fiscales préférentielles dommageables ?
Mettent-elles en œuvre ou non les mesures de l’OCDE contre l’optimisation fiscale agressive ?
Mardi dernier, l’ONG Oxfam a publié sa propre liste, révélant que 35 pays au moins répondent aux critères sélectionnés par les Européens, dont « des paradis fiscaux notoires comme la Suisse et les Bermudes, mais aussi Jersey ou la Nouvelle-Calédonie ». Oxfam avait également pointé du doigt quatre pays européens : l’Irlande, le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas, qui devraient figurer sur cette même liste si les critères européens leur étaient appliqués.