Un autre mois commence et la situation politique n’a presque pas évolué depuis le 2 avril, date de la démission du président Bouteflika.
Quatre mois après, l’Algérie ne s’est pas encore dotée d’un président de la République élu et rien n’indique qu’elle le fera « dans les plus brefs délais », comme le souhaite le pouvoir.
Les choses se sont même compliquées davantage cette semaine, au moment où la mise en place d’un panel de dialogue avait suscité un réel espoir de voir le pays prendre enfin le chemin du règlement de la crise par la discussion et la concertation.
Jeudi dernier, le chef de l’Etat par intérim s’engageait solennellement devant les six personnalités nationales qui ont accepté de mener une mission de médiation, de prendre en charge les mesures d’apaisement réclamées comme préalable à tout dialogue. Mardi, le chef d’état-major de l’ANP tient un discours différent et laisse entendre qu’il rejette les conditions, qualifiant les préalables de « diktat ».
Or, ces conditions sont aussi celles des membres de la commission dirigée par Karim Younès. La première conséquence à laquelle il faudra s’attendre après ce “recadrage”, c’est le retrait d’au moins une partie des membres du panel.
Karim Younès avait brandi dès vendredi dernier la menace de l’autodissolution du panel si les préalables ne sont pas satisfaits et, ce mercredi 31 juillet, il a promis de prendre une décision finale ce jeudi.
L’économiste Smaïl Lalmas a jeté l’éponge quelques heures seulement après le discours de Gaïd Salah et il n’est pas exclu que d’autres membres lui emboîtent le pas.
Le processus de dialogue et de l’organisation de l’élection présidentielle n’a jamais été aussi proche d’un retour à la case départ. On a cru le plus dur passé lorsqu’une partie de l’opposition, de la société civile et même des manifestants a fait une énorme concession en acceptant l’idée d’aller vers les urnes sans passer par une période de transition, mais les conditions dans lesquelles le pouvoir veut organiser le scrutin posent un sérieux problème.
Si les membres du panel mettent à exécution leur menace ce jeudi, les regards seront braqués dès le lendemain, vingt-quatrième vendredi de mobilisation populaire, vers la rue où se jouera l’issue de la crise dans les semaines ou les mois à venir.
Le pouvoir, qui a dû reporter par deux fois la présidentielle, le 18 avril puis le 4 juillet, sait qu’il ne lui sera pas possible d’imposer quoi que ce soit avec un hirak qui ne faiblit pas et les animateurs de ce dernier sont conscients de l’importance de maintenir la mobilisation pour forcer la main aux tenants de la décision qui, jusque-là, n’ont montré que peu de disposition à aller vers le changement.
Le mois qui commence s’apparente à une dernière épreuve pour le hirak, mais il s’annonce décisif pour les deux camps. Le mouvement populaire, entamé en février et qui a résisté aux manœuvres de division, à la répression, aux effets du jeûne pendant le ramadhan et à la canicule de juillet, n’a plus que quatre semaines à tenir.
Les observateurs s’accordent à dire que si la mobilisation ne baisse pas sensiblement durant ce mois d’août, il sera difficile de la voir reculer en septembre avec la rentrée sociale, le retour de meilleures conditions climatiques et l’absence de perspective de sortie de crise.
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