Ouled Slimane est un petit village situé au sud de la wilaya de M’sila. Début août, la chaîne de télévision privée Numidia News consacrait un reportage de près d’une heure à ce patelin perdu à l’intérieur du pays. Au fil des témoignages des habitants et de l’analyse d’une ex-directrice de l’action sociale (DAS) de cette wilaya, le média peint une tribu « primitive » qui n’est pas au fait des dernières évolutions politiques, sociales et économiques dans le pays.
« La tribu est composée de familles ayant des liens de parenté. (Le village) est raccordé au réseau électrique mais l’eau potable n’est pas disponible », précise d’emblée la voix off dans le reportage. La parole est donnée régulièrement à Nadjah Essalam Rassouli, ex-DAS qui est à la tête d’une association venant en aide aux habitants. « La population a été classée au début comme étant nomade », indique-t-elle.
Des femmes, des hommes et même des enfants s’expriment devant les caméras de la chaîne de télévision à visage découvert. Ils parlent de leur mode de vie, de leurs préoccupations et des privations. D’abord, la majorité des habitants ne sont pas enregistrés sur l’état civil, selon le média. Ils se marient « traditionnellement ». Les femmes ont pour unique mission d’assurer la reproduction. Les enfants ne sont pas scolarisés.
Selon le reportage, les enfants et même certains adultes ne sont pas circoncis. « Ils vivent en dehors de certains préceptes de l’islam », explique la même source. L’ex-DAS évoque des mariages consanguins et même de l’inceste. « Ils vivent à l’état bestial », affirme Mme Rassouli. La caméra dévoile des maisons délabrées où se côtoient parfois hommes et animaux. Pour la centenaire du village, Ben Bella est encore président du pays.
Mais le reportage fait scandale. Les habitants protestent. Quelques jours après sa diffusion, le wali se déplace sur les lieux pour rencontrer la population. Une caméra enregistre ses échanges. Avec le portrait du chef de l’État entre les mains, il demande d’emblée à l’un des habitants qui était le président du pays. L’individu donne une bonne réponse. Un autre brandit sa carte de vote. Le wali estime qu’il s’agit d’éléments qui prouvent que ces personnes sont bien inscrites à l’état civil.
Le wali s’interroge sur ceux qui souffrent de maladies psychiatriques et demandent aux responsables de mobiliser des spécialistes pour des consultations. Des instructions sont données au directeur de santé pour prendre en charge les habitants. « Ce que j’ai eu comme informations, c’est que ce sont des gens qui ne savent pas qu’on est en Algérie et qu’ils connaissent pas la religion », dit-il en précisant qu’il est venu avec des aides financières.
À tour de rôle, d’autres responsables dont l’actuel directeur de l’action social se relaient pour dénoncer le tort causé par le reportage aux habitants du village et pour insister sur les aides qu’ils reçoivent régulièrement de la part de l’État. Mais aucun n’arrive démentir la situation dramatique dans laquelle vivent les habitants de Ouled Slimane.