Société

Le paradoxe Air Algérie

Critiquée et raillée à longueur d’année, mais aimée. Tel est le paradoxe d’Air Algérie. La compagnie aérienne algérienne demeure celle que préfèrent les voyageurs algériens, malgré tout. La preuve par la disponibilité des places pendant cette saison estivale. Au moment où les concurrents ont encore des billets à vendre, Air Algérie affiche complet. 

Les critiques habituelles sur Air Algérie portent essentiellement sur les retards des vols et la cherté des billets et accessoirement sur la qualité du service à bord, la disponibilité des places ou encore la gestion interne. Certains de ces griefs sont fondés, d’autres le sont moins. 

Les prix des billets Air Algérie jugés trop élevés

La compagnie algérienne est vilipendée particulièrement depuis la crise de covid-19 sur les tarifs qu’elle applique sur ses vols de et vers l’Algérie. Dans une démonstration faite en mars dernier, le député de la communauté algérienne établie à l’étranger, Abdelouahab Yagoubi, a démontré qu’Air Algérie appliquait des prix dix fois supérieurs au coût de revient moyen suivant la référence mondiale.

Il avait pris l’exemple d’un aller-retour Paris – Alger qui coûte plus de 700 euros alors que le coût de revient par passager sur la même distance se situe entre 70 et 80 € toutes charges comprises (kérosène, personnel navigant et au sol, charges aéroportuaires…). 

Le parlementaire avait suggéré au gouvernement comme solution de libérer le marché du transport aérien pour mettre fin au monopole d’Air Algérie et casser les prix. 

Ce « monopole » décrié depuis de nombreuses années n’est pas tout à fait vrai. Air Algérie assure, il est vrai, le gros du transport aérien de et vers l’Algérie ainsi que sur le réseau domestique, mais elle n’est pas seule sur le marché. De nombreuses autres compagnies aériennes opèrent en Algérie, dont certaines comptent parmi les plus grandes au monde.

Sur les destinations européennes, Air Algérie détient 50% du marché, le reste étant partagé par d’autres compagnies de grande et moyenne taille, et ce en vertu des règles de réciprocité. 

Une compagnie aérienne sous forte pression

Pour ceux qui pensent qu’il n’y a pas de comparaison à faire, sur tous les points, entre Air Algérie et Air France et les autres compagnies françaises desservant l’Algérie, ce n’est pas ce que disent les chiffres relatifs aux réservations pour cet été.

La compagnie algérienne est sous forte pression, submergée par la demande notamment sur les vols de et vers la France où réside une très forte communauté algérienne. Au point de renforcer sa flotte et de solliciter des autorités aéronautiques françaises l’autorisation de programmer des vols supplémentaires. 

Même critiquée, Air Algérie demeure la compagnie préférée des Algériens

A la mi-juin, le PDG de la compagnie a annoncé l’affrètement d’appareils supplémentaires. « Nous avons procédé à l’affrètement de trois gros-porteurs disposant de 269 sièges chacun et d’un monocouloir de 150 sièges. Sur la période d’affrètement prévue, cela représente une offre minimum de 471.000 sièges », a détaillé Hamza Benhamouda dans un entretien à TSA

Air Algérie a aussi sollicité les directions de l’aviation civile de plusieurs pays, dont la DGAC française, pour pouvoir programmer des vols supplémentaires cet été. 

Outre la France, la compagnie algérienne devrait aussi augmenter la fréquence de ses vols vers la Belgique (5 vols supplémentaires Alger-Bruxelles) et l’Allemagne (7 vols de plus Alger-Francfort). 

Fin mai, TSA avait comparé la disponibilité des places sur les vols d’Air Algérie et ceux des compagnies concurrentes de et vers l’Algérie cet été. Il a été constaté que, chez Air Algérie, “pour certaines dates, la majorité des vols affiche déjà complet”. 

Des prix plafonnés avec l’offre Osra-Famille

La compagnie algérienne avait lancé en avril l’offre Osra, proposant des prix plafonnés et avantageux pour les membres d’une même famille voyageant ensemble. Dans le cadre de cette offre, les places étaient disponibles uniquement pour les vols prévus en juin.

Pour la période de pic de juillet-août, il était quasiment impossible de trouver une place que ce soit pour l’offre Osrah ou pour les vols habituels n’offrant pas de réduction. Et ce ne sont pas que les destinations vers les villes françaises qui affichent complet. Cela est aussi valable pour les autres capitales européennes et même pour le Canada. 

En revanche, des places étaient disponibles pendant la même période sur les vols de certaines compagnies étrangères assurant la liaison entre l’Algérie et la France. C’est le cas de Transavia et Air France qui, à fin mai, avaient encore des places à vendre pour les mois de juillet et août. 

Air Algérie a bien fait les choses en termes de marketing avec notamment l’offre Osrah ou encore la franchise de soute accordée aux voyageurs (23 kilogrammes et un sac à main de 10 kilogrammes), mais il reste un fait que ces avantages n’expliquent pas : même les places n’entrant pas dans le cadre de l’offre Osrah ont été vendues plusieurs semaines à l’avance alors que les concurrents avaient encore des billets à proposer. 

Il y a bien quelque chose de particulier entre Air Algérie et ses clients, qui la critiquent à longueur d’année et qui la prennent d’assaut à l’arrivée de l’été. En somme, qui aime bien châtie bien. 

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