Économie

Le pétrole à moins de 60 dollars : quel impact sur l’Algérie ?

Les cours du pétrole continuent à s’enfoncer sous l’effet du bouleversement mondial provoqué par les droits de douane imposés par le président américain Donald Trump.

Ce mercredi 9 avril, le baril de Brent de la mer du Nord, référence pour le Sahara Blend algérien, est descendu sous la barre des 60 dollars pour la première fois depuis février 2020. Dans le sillage des prix du pétrole, ceux du gaz ont aussi dévissé.

Pour l’Algérie, il s’agit d’un seuil au-dessous du prix de référence retenu dans l’élaboration de la loi de finances pour 2025, soit 60 dollars le baril.

Ce mercredi 9 avril, le baril de Brent de la mer du Nord (référence pour le pétrole algérien) a perdu 5,52 % de sa valeur, se vendant vers 11 h GMT pour livraison en juin, à 59,35 dollars, après être descendu encore plus bas dans la matinée à 58,47 dollars.

Le pétrole au plus bas depuis fin 2020

C’est le niveau le plus bas des cours du pétrole depuis fin 2020. Après avoir atteint des valeurs négatives en avril 2020 à cause des restrictions liées à la crise sanitaire de Covid-19, les cours du brut ont rebondi progressivement, franchissant en février 2021 la barre des 60 dollars le baril pour ne plus en redescendre depuis.

Le pétrole a perdu près de 20 % de sa valeur par rapport au niveau des prix du début de l’année et 32 % sur un an.

Les cours ont complètement dévissé depuis une semaine après l’annonce de l’imposition d’une surtaxation douanière sur les produits de 180 pays entrant aux USA.

Les prix du gaz, dont l’Algérie est un grand exportateur, sont aussi impactés par la décision du président américain. Le gaz européen était ce mercredi matin au plus bas depuis septembre dernier, à 33,44 euros le mégawattheure (MWh).

Le 2 avril, Donald Trump a annoncé des droits de douane supplémentaires d’un minimum de 10 % sur les produits en provenance de dizaines de pays.

Les produits chinois sont les plus touchés, avec des surtaxes cumulées de 104 %. Le taux appliqué aux produits algériens est de 34 %.

La Chine a répliqué en imposant aux produits américains des droits de douane de 84 %.

C’est cette guerre commerciale qui fait craindre aux marchés une forte récession de l’économie mondiale, et par conséquent, une faible demande sur l’énergie, d’où la dégringolade des cours.

Les prix du pétrole plongent sous 60 dollars

La Chine étant le premier importateur mondial de pétrole et les États-Unis le premier consommateur, les cours sont extrêmement sensibles à l’état des deux grandes économies mondiales.

Pour John Plassard, analyste chez le cabinet Mirabaud, cité par le site spécialisé « Le prix du baril », la chute vertigineuse des prix du pétrole reflète un certain scepticisme des marchés quant à une désescalade à court terme.

N’entrevoyant pas d’accalmie à court terme, l’institut d’analyse des marchés Citi Research a abaissé lundi 7 avril ses prévisions de prix du Brent sur 0-3 mois à 60 dollars le baril.

Citi a aussi mis en avant les craintes d’un affaiblissement de la demande mondiale de pétrole.

En plus de la guerre commerciale Chine-USA, les analystes pointent également du doigt la décision prise la semaine dernière par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (OPEP+) d’augmenter la production des pays membres plus rapidement que prévu.

La coïncidence des deux événements a créé, « un cocktail toxique qui alimente les craintes d’un marché pétrolier en surabondance », estime un analyste du cabinet SEB, Ole R. Hvalbye.

Si les prix continuent à baisser, c’est aussi la stratégie de Donald Trump de « forer à tout-va » qui risque d’être contrariée.

Tamas Varga, analyste de PVM Energy, explique en effet que la production américaine va freiner, « car elle ne sera plus rentable » en cas de prix trop bas.

Algérie : les hydrocarbures dominent les exportations

Si la tendance à la baisse se poursuit, et même aux prix actuels du pétrole et du gaz, les recettes d’exportation des hydrocarbures de l’Algérie devraient encore baisser cette année après avoir déjà reculé ces deux dernières années.

Les cours mondiaux du baril sont déterminants pour les niveaux des recettes de l’Algérie. Avec un prix moyen du baril à 104 dollars en 2022, l’Algérie avait engrangé 60 milliards de dollars.

En 2023, les recettes ont baissé à 50 milliards à cause d’un prix moyen mondial de 84 dollars le baril.

Cette fois, et contrairement à la baisse de 2020, l’Algérie a les moyens de résister. Elle dispose de réserves de plus de 70 milliards de dollars de réserve de change, en plus des nombreuses mesures prises par le gouvernement pour réduire les importations.

Si l’économie algérienne est plus résiliente, elle demeure dépendante des hydrocarbures pour ses recettes en devises.

Selon l’Office national des statistiques (ONS), les « hydrocarbures continuent de dominer les exportations algériennes, représentant 90 % du total en 2023, soit 49,3 milliards de dollars. Les exportations hors hydrocarbures, quant à elles, ont diminué de 18,2 % par rapport à 2022, s’élevant à 5,4 milliards de dollars. Les importations de biens passent de 39 milliards de dollars en 2022 à 42,7 milliards de dollars en 2023, soit une hausse de 9,3 %. »

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