Politique

Le pôle démocratique plaide pour le dialogue et dénonce les atteintes aux libertés

Les Forces de l’alternative démocratique, qui regroupe sept partis et la LADDH, se sont réunies, ce mercredi 26 juin au siège du RCD, à Alger.

Selon Hakim Belahcel, premier secrétaire du FFS, l’administration a refusé la tenue de cette rencontre qui devait avoir lieu dans une salle du complexe touristique d’Azur Plage, à l’ouest d’Alger.

« Nous avons déposé la demande dans les délais, le 23 juin 2019. Nous avons reçu le refus hier, à 17 h 40, de la wilaya d’Alger. Pour nous, c’est une attaque contre l’initiative du regroupement des forces démocratiques et contre les partis. Il n’y a aucune explication à ce refus d’autoriser une réunion publique », a-t-il expliqué.





 

Hakim Belahcel a qualifié d’unique la rencontre des sept partis de la mouvance démocratique « qui sont complètement mêlés au hirak ». « Un hirak qui aspire à un changement politique radical dans le pays et à imposer une alternative démocratique d’une manière pacifique. Cette rencontre est le fruit d’un long travail pour rapprocher les points de vue et dépasser les divergences qui, d’une manière ou d’une autre, ont contribué à rendre plus longue la stagnation politique dans le pays, laquelle a servi les intérêts du pouvoir réel en Algérie », a-t-il déclaré. Il a rappelé les efforts menés par le FFS « depuis des mois » pour rapprocher les forces politique.

« Les entreprises économiques et les institutions politiques sont paralysées »

Mohcine Belabbas, président du RCD, a regretté le refus des pouvoirs publics d’autoriser une rencontre de l’opposition. « Dans leurs discours, ils parlent de « l’État profond » qui serait en prison. En réalité, « l’État profond » ne se réduit pas à des personnes. Il s’agit d’actes. « L’État profond » contrôle toujours le pays. Ils commencent à infiltrer les partis. Dans certains plateaux télés, ils s’attaquent aux partis démocratiques », a-t-il constaté.



 

M. Belabbas est revenu sur la situation des médias et a critiqué l’attitude de la télévision publique et des chaînes de télévision privées par rapport aux événements politiques dans le pays. « Tous les partis et l’ensemble de la société civile doivent contribuer à trouver une solution à la crise. Depuis le 22 février 2019, il n’y a plus d’opposition dans le pays. Il y a des acteurs qui estiment qu’il faut aller vers une période de transition constituante, d’autres pensent qu’il faut un changement à l’intérieur du système », a-t-il noté.

Il existe, selon lui, des mécanismes à adopter lors d’une période de transition constituante. « Le peuple est sorti dans la rue dénoncer un système corrompu et instaurer les bases d’une nouvelle République. Il n’est pas possible d’y aller avec les instruments d’aujourd’hui, ceux mis en place par « l’État profond » qui gère tout. Ils ont pris l’habitude de changer des personnes, mais toutes étaient dirigées par cet « État profond » qui fonctionne en dehors de la loi. Nous devons dialoguer et dépasser nos divergences pour sortir de cette situation surtout qu’ils commencent à parler de l’organisation de l’élection présidentielle en octobre prochain. Sommes-nous prêts à aller aux élections de cette manière ? J’ai des doutes », a souligné Mohcine Belabbas.

Le président du RCD a rappelé la nécessité de réviser la loi électorale, d’installer une instance indépendante pour organiser les élections et d’avoir une véritable justice indépendante. « La vérité aujourd’hui est que l’Algérie est toujours dirigée par téléphone et par les ordres. Aujourd’hui, les entreprises économiques et les institutions politiques sont paralysées », a-t-il appuyé.

« La poursuite du combat pacifique pour l’instauration d’un État démocratique est une exigence historique »

Ali Laskri, président de l’Instance présidentielle du FFS, a, de son côté, déploré la fermeture des espaces. Il a plaidé pour « un pacte politique consensuel » qui pourrait être le fruit de « compromis » faits « dans l’intérêt du pays ».

Il a dénoncé « les atteintes permanentes » aux libertés individuelles et collectives, parlé de « la cohésion sociale disloquée » et critiqué « un système de gouvernance dépassé ». M. Laskri, qui a estimé que « la faillite du régime sur tous les plans », a prévenu contre les menaces qui pèsent sur l’unité nationale.

Pour lui, l’institution militaire n’a jamais accepté le primat du politique sur le militaire « jusqu’aujourd’hui ». « Le mouvement populaire veut le changement du système, pas le changement dans le système. Le FFS considère que la poursuite du combat pacifique pour l’instauration d’un État démocratique est une exigence historique », a soutenu Ali Laskri plaidant pour le dialogue, la tenue d’une conférence nationale souveraine et la dissolution du Parlement.

Il a demandé la libération de tous les détenus politiques et d’opinion et souhaité que des mesures d’apaisement soient prises avec « l’arrêt des harcèlements judiciaires contre les militants de partis et des droits de l’homme, des syndicalistes et des journalistes ».

« Faire peur à toutes les voix libres »

Djelloul Djoudi, membre dirigeant du Parti des Travailleurs, a affirmé que Louisa Hanoune est en prison pour « ses opinions politiques » (depuis le 9 mai 2019). « Cette détention a pour but de faire taire et faire peur à toutes les voix libres, et à travers elles, la Révolution. Depuis 18 semaines, le peuple algérien est mobilisé en un saut révolutionnaire pour exiger clairement le départ de tout le régime, ses symboles, ses institutions et ses pratiques. Des millions d’Algériens veulent une démocratie avec un contenu politique, économique, social et culturel. Ils veulent vivre en paix et effacer toutes les formes de la corruption. Pour rester, le régime n’a pas hésité à accentuer les pratiques de répression et les atteintes aux libertés fondamentales et au pluralisme. Il a doublé ses manœuvres et ses menaces pour torpiller la Révolution en dressant des embûches devant les aspirations de millions d’Algériens qui manifestent depuis quatre mois dans l’unité et la fraternité », a-t-il analysé.

M. Djoudi a dénoncé la récente mise sous mandat de dépôts de manifestants pour port de drapeau culturel amazigh, « l’ingérence de l’armée » dans la politique et « l’action de division » qui serait menée par le pouvoir. Il a appelé à libérer tous les détenus d’opinion et tous les manifestants interpellés lors des marches.

« Les Algériens n’accepteront pas de revenir à l’avant 22 février 2019 »

Fatiha Assoul, présidente de l’UCP (Union pour le changement et le progrès), a rappelé que son parti est favorable à « un changement radical » du régime actuel.

« Il y a un consensus sur la faillite politique et institutionnelle de ce régime. Les affaires de corruption traitées par la justice ne sont qu’un indice simple sur le niveau de détérioration des institutions et la décomposition du système de valeurs au sein de la société. Les Algériens, qui manifestent depuis plus de quatre mois, veulent rompre avec le pouvoir personnel et construire l’État des libertés. Le peuple algérien est décidé à poursuivre sa Révolution pour la liberté jusqu’à la concrétisation de ses objectifs. L’algérien a pu reconquérir sa citoyenneté qui signifie que chacun de nous doit être un acteur dans le champ politique. Les Algériens n’accepteront pas de revenir à l’avant 22 février 2019, c’est-à-dire subir la politique. Ils ont décidé d’être acteurs dans la vie politique. Nous devons aller vers un dialogue sérieux dans des assises nationales pour préparer une feuille de route pour sortir de la crise politique. Nous devons nous mette d’accord sur les délais de la période de transition avec assainissement politique et institutionnelle avant la tenue des élections », a-t-elle plaidé.




 

Pour Mahmoud Rechidi, responsable du PST (Parti socialiste des travailleurs), la crise actuelle est celle du régime. « C’est une crise ancienne, antérieure au 22 février. La question qui est posée est celle de la souveraineté populaire. Le peuple algérien est en train de dire que c’est lui qui décide et que le régime doit dégager. Les racines récentes de la crise sont dans les choix économiques et sociaux du régime. Les procès actuels intentés contre les anciens responsables et les hommes d’affaires sont, pour nous, un jugement de ces choix libéraux. Il n’y a qu’à voir la situation des jeunes chômeurs et ceux qui meurent en mer », a-t-il dit.

Il a appelé à « une remobilisation » du hirak, à la faveur du 5 juillet, pour mettre fin « à toutes les formes de répression », « libérer tous les détenus politiques » et « lever tous les obstacles qui portent atteinte aux libertés démocratiques ».

Ahmed Djedaï, ancien Premier secrétaire du FFS, qui a modéré le débat, a précisé que la rencontre des Forces de l’alternative démocratique a un seul objectif : instaurer un dialogue pour sortir de la crise politique. « Nous ne sommes pas les tuteurs du peuple algérien ni du hirak. En tant que pôle démocratique, nous avons des solutions et une vision pour sortir de l’impasse actuelle », a-t-il noté.

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