C’est un Issad Mabrouk hors de lui qui s’est adressé à la presse ce lundi 4 novembre lors du rassemblement des magistrats sur le parvis de la Cour suprême. Le président du SNM s’en est notamment pris à ceux qui font les éloges de « la faucille (el mendjel) ».
« Nous espérons que la société prenne conscience de ce qui se passe et se détourne des futilités. Quand une société fait les éloges d’une faucille rouillée, je ne sais pas quelle justice elle cherche. Le symbole de la justice c’est la balance et il en sera toujours ainsi, parce qu’elle pèse les preuves et les arguments pour trancher avec équité. Brandir de tels slogans c’est reproduire l’image de la momie qui a détruit l’Algérie », a-t-il déclaré.
« Certains disent que nous sommes actionnés par des courants, que nous sommes des relais de la bande (issaba), d’un éléphant, de chats ou je ne sais quoi. Nous sommes des êtres humains, nous appartenons à la société algérienne. Les juges ont toujours été aux premières lignes et leur sortie a été l’un des facteurs qui ont empêché le cinquième mandat », a ajouté M. Issad.
Le président du SNM a en outre confirmé que l’objet principal du mouvement c’est l’indépendance de la justice, expliquant que l’annulation des mutations n’est pas la revendication première des magistrats.
« C’est juste la goutte qui a fait déborder le vase. Nous avons dit que, depuis l’indépendance, la justice n’a jamais été indépendante comme il se doit. Nous espérons que cette étape sera le point de départ pour une justice indépendante en laquelle tout le monde aura confiance », a-t-il expliqué.
Des procureurs ont été installés par la police judiciaire
Isssad Mabrouk retient une série de griefs contre le ministre Belkacem Zeghmati et dira que des choses très graves se passent dans le secteur : « Nous avons appelé au départ du ministre de la Justice parce qu’il exerce ses fonctions de ministre avec la mentalité du procureur général arrogant, et j’assume ce que je dis. On ne dirige pas le ministère de la Justice comme on dirige le parquet général. L’Histoire retiendra que, durant son mandat, des procureurs de la République ont été installés par la police judiciaire. Des choses incroyables se passent et traduisent l’anarchie et l’absence de discernement. Or, c’est le manque de discernement qui a mis l’Algérie dans cet état ».
« Nous sommes de simples citoyens, nous avons des frères qui souffrent dans les couloirs de la justice, leurs dossiers sont retardés. Ce n’est pas nous qui avons bloqués le processus, mais l’arrogance et les mentalités figées. C’est l’absence de dialogue qui nous a menés à cette situation », ajoute le président du syndicat des juges qui ne manquera pas de justifier le recours à la grève.
« Oui, la loi interdit aux magistrats de faire grève. Le législateur qui a interdit la grève aux juges a supposé que toutes les conditions, professionnelles et sociales, ont été réunies pour faire en sorte qu’ils n’aient pas recours à une telle action. Mais en l’absence de telles conditions, la grève devient légale », explique-t-il.
Concernant l’intervention des unités antiémeute au sein de la Cour d’Oran, M. Issad a réclamé des sanctions à l’encontre des « commanditaires » et des « exécutants ».
« C’est un comportement inacceptable, quelles que soient les circonstances et les causes. Les pouvoirs publics doivent prendre les mesures nécessaires à l’encontre des commanditaires et des exécutants de cet acte. Ceux qui ont été humiliés sont nos collègues et nos frères et cela s’est fait au sein même de notre demeure. La violation de domicile, dans des circonstances normales, est un délit. L’humiliation d’un juge dans l’enceinte d’un tribunal constitue une humiliation pour l’État », a-t-il dénoncé.