search-form-close
Le raï au centre d’une rivalité algéro-marocaine : « Même pas en rêve »

Le raï au centre d’une rivalité algéro-marocaine : « Même pas en rêve »

La musique raï est depuis quelques jours au centre d’une polémique sur les réseaux sociaux entre les Marocains et les Algériens. Une polémique qui a refait surface après l’annonce début mars par l’Algérie d’un projet de dépôt d’un dossier de classement de la musique Raï sur la liste du patrimoine culturel immatériel au niveau de l’Unesco.

Les Marocains tentent-ils de s’accaparer ce patrimoine algérien ? « Même pas en rêve », balaie Nasreddine Touil membre de l’association Art-culture et protection du patrimoine musical oranais (ACPPMO).

« Le raï ne peut pas être marocain. Le monde entier sait que le raï est algérien », poursuit Nasreddine Touil qui ajoute qu’il a été récemment contacté par des journalistes de la chaîne franco-allemande Arte sur le sujet de la musique raï. « Ils n’ont pas contacté un Marocain », remarque-t-il.

Ce sont bien les chanteurs algériens qui ont porté la chanson raï à l’universalité, à l’instar de Cheb Khaled et de Cheb Mami, qui l’ont fait connaître dans le monde entier. Et ce sont des chanteurs de raï algériens qui ont la cote au Maroc où ils se produisent devant des foules immenses.

Nassereddine Touil préfère ne pas se focaliser sur les velléités marocaines de s’accaparer cette musique, mais il veut plutôt se concentrer sur la manière de préserver ce patrimoine algérien.

Il s’agit aussi de promouvoir les instruments spécifiques à ce genre musical  dont l’Oranie est le berceau. « La saveur du rai c’est quoi ? C’est l’accordéon, c’est le violon et c’est aussi l’ûd. Mais pas le synthétiseur ou la boîte à rythme », argue ce spécialiste du raï.

Nassereddine Touil prévient contre les ravages du piratage sur le patrimoine du raï et des conséquences qui peuvent en découler. « Il faut des lois. L’ONDA (Office des droits d’auteurs) doit jouer un rôle » clame-t-il.

Nasreddine Touil indique que l’ACPPMO prépare l’organisation de journées dédiées à ce patrimoine avec la participation de chercheurs du Centre de recherche anthropologie sociale et culturelle (Crasc) d’Oran, qui se tiendront parallèlement au festival du raï.

Rivalité algéro-algérienne

« Un grand colloque international qui verra la participation de grands chercheurs. De cette façon, on documente la véritable histoire du raï », a-t-il insisté.

« Nous avons des journalistes, des écrivains et des chercheurs comme l’universitaire Hadj Meliani. Beaucoup de gens ont travaillé sur la musique raï. Avec leur concours, nous ferons en sorte de publier un livre sur la base duquel, demain, des journalistes étrangers pourront travailler », projette Nasreddine Touil.

L’occasion aussi de lancer un concours pour la promotion des jeunes talents. « Une compilation leur sera consacrée à la fin du festival », promet-il. Un projet d’école de musique du raï est également dans l’agenda de l’ACPPMO.

« Pourquoi existe-t-il des écoles de musique andalouse et pas d’écoles de raï ? », interroge Nasreddine Touil qui fait remarquer que la musique raï exige aussi la maîtrise de certains instruments tels l’accordéon, la trompette, le saxophone, etc.

Le raï est aussi l’objet d’une rivalité « inutile » algéro-algérienne, entre Oran et Sidi Bel Abbès, déplore Nasreddine Touil.

Ce passionné de cette musique populaire regrette que le festival annuel du raï ait été déplacé d’Oran à Bel Abbes, en 2008. Une année durant laquelle les Marocains ont lancé leur propre festival international de la musique raï.

« C’est louche », suspecte Nasreddine Touil qui regrette que cet événement ait été réduit à un simple spectacle. « Le festival de Sid Bel Abbès ce sont des soirées. À Oran, nous avions l’habitude d’organiser des journées d’études et des séminaires sur la chanson raï avec une forte présence de la presse, etc. À Sid Bel Abbès, c’est du spectacle », critique M. Touil qui fut commissaire du festival de la musique raï d’Oran du début des années 1990 jusqu’en 2005.

  • Les derniers articles

close