Asphyxié par la crise économique et les sanctions financières imposées par les Etats-Unis, le Venezuela a annoncé jeudi une restructuration de sa dette extérieure, estimée à 155 milliards de dollars, afin d’éviter le défaut de paiement.
« Je décrète un refinancement et une restructuration de la dette extérieure et de tous les remboursements du Venezuela », a annoncé jeudi soir le président Nicolas Maduro dans une intervention à la télévision, assurant que son pays ne se laisserait pas « asphyxier » par « l’empire américain ou un autre ».
La situation financière de ce pays pétrolier est d’autant plus compliquée que le président américain Donald Trump a imposé en août des sanctions financières contre Caracas, interdisant l’achat de nouvelles obligations émises par le gouvernement du Venezuela et la compagnie pétrolière nationale PDVSA.
« Les sanctions américaines contre le Venezuela se sont clairement manifestées cette nuit. La décision de M. Maduro de restructurer sa dette extérieure après un dernier paiement va créer de profonds doutes auprès des créanciers », a affirmé Jason Marczak, de l’institut américain Atlantic Council.
M. Maduro a confirmé, en effet, que le groupe pétrolier d’Etat PDVSA allait bien s’acquitter vendredi de 1,1 milliard de dollars d’obligations à échéance 2017, après avoir remboursé il y a une semaine 841,88 millions de dollars d’amortissement d’obligations à échéance 2020.
Ce remboursement avait ainsi éloigné momentanément le spectre d’un défaut de paiement qui rôde depuis plusieurs années, mais le Venezuela doit encore payer d’importantes sommes d’ici fin 2017. L’agence Bloomberg a chiffré à 79% en 2018 et 99% au cours des cinq prochaines années les possibilité d’un défaut vénézuélien.
L’agence de notation SP Global Ratings a placé les obligations de PDVSA sous surveillance négative, s’inquiétant des sanctions imposées en août par les Etats-Unis.
Au total, entre dette souveraine et créances de PDVSA, le pays a dû rembourser 1,63 milliard de dollars en octobre. L’échéance pour novembre s’élève à 1,89 milliard et à 242,5 millions en décembre, selon le cabinet Aristimuño Herrera & Asociados.
Et ses réserves sont au plus bas depuis vingt ans, à 10,09 milliards.
Le président Maduro se vante pourtant d’être bon payeur et d’avoir remboursé 60 milliards à ses créanciers internationaux depuis 2015, malgré la « guerre économique » menée selon lui par Washington et la droite vénézuélienne.
– Multiplier les annonces –
C’est justement pour riposter à cette « guerre » que le président vénézuélien a multiplié les annonces en direct à la télévision.
Il a d’abord rehaussé le salaire mensuel minimum pour la cinquième fois de l’année. Avec cette augmentation de 30%, ce dernier passe à 177.507 bolivars, soit 53 dollars au taux officiel -dans des bureaux de change où les billets verts sont quasiment introuvables-, et 4,3 dollars au marché noir, considéré comme le taux de référence.
A cela s’ajoute un bon alimentaire de 279.000 bolivars (qui augmente de 48%), faisant passer le « revenu intégral de base » à 456.507 bolivars (136 dollars au taux officiel et 11 au marché noir).
Cette hausse vise, selon Nicolas Maduro, à « renforcer davantage la protection des travailleurs » au milieu de la crise économique.
Le Venezuela, où l’Etat exerce depuis 2003 un strict contrôle des devises étrangères, connaît la plus forte inflation de la planète: attendue à 652,7% cette année, elle devrait atteindre 2.349,3% en 2018, d’après le Fonds monétaire international (FMI).
Mercredi à la télévision, le dirigeant vénézuélien a également présenté le nouveau billet national de 100.000 bolivars, qui constituera la coupure la plus grosse.
Signe de la dégradation du paysage économique, il y a un an le plus gros billet était de 100 bolivars, soit 1.000 fois moins. Certains internautes soulignaient sur Twitter que seul le chiffre « 100 » apparaissait en gros, la mention « cent mille » étant écrite en petites lettres. « Ils n’ont même pas pris la peine d’imprimer tous les zéros », raillait l’un d’eux.
Dernière arme sortie mercredi par M. Maduro, le développement de la monnaie électronique, vue comme « la solution de fond » pour vaincre les « mafias » qui, selon lui, sortent les billets vénézuéliens du pays pour spéculer avec le bolivar, entraînant sa dévaluation et la pénurie de liquidités.