Société

LE VRAI DU FAUX – Les Algériens pourront-ils se soigner gratuitement en France ?

Non, les Algériens ne pourront pas se soigner gratuitement en France contrairement à ce qui a été dit, du fait d’une mauvaise interprétation du protocole annexe à la convention des soins ratifié le 17 novembre par un décret présidentiel à Alger.

En France, cette mauvaise interprétation du texte a alarmé les milieux d’extrême droite. “Il faut s’attendre à un afflux de malades algériens qui viendront encore compliquer la tâche des hôpitaux français, déjà surchargés et en sous-effectif chronique”, s’alarme par exemple Nice-Provence.info, un site d’extrême droite.

Les précisions de l’ambassade de France

En réalité, le protocole “ne signifie nullement que les soins en France sont dorénavant gratuits pour les Algériens”, a rectifié mercredi 5 décembre le Consulat général de France à Alger sur son site internet. La représentation précise : “Les patients algériens qui ne bénéficient pas d’une autorisation préalable de la Cnas doivent payer la totalité des frais occasionnés”. Autrement dit, sans le sésame de la fameuse prise en charge de la Cnas, on ne peut pas prétendre à ces soins. Il n’y a donc rien de nouveau.

Ce dimanche, l’ambassade de France à Alger a apporté des précisions supplémentaires. Signé en avril 2016 par la France et l’Algérie, le protocole qui a été ratifié par le président Bouteflika le 17 novembre dernier « ne signifie nullement que les soins en France sont dorénavant gratuits pour les Algériens », affirme l’ambassade de France.

« Ce protocole établit un cadre administratif unifié et fiable pour l’organisation et la prise en charge par la Cnas algérienne des soins prodigués en France à des Algériens et ne concerne que les soins qui ne peuvent pas être dispensés en Algérie », indique la même source, précisant que « ces soins doivent faire l’objet d’une demande préalable d’autorisation de prise en charge par la Cnas algérienne ».

Cette dernière « procède à une évaluation financière préalable (devis) des soins programmés par les patients algériens dans des établissements français » et « délivre ensuite une “attestation de droits aux soins programmés” », explique l’ambassade, ajoutant que « les patients algériens peuvent ensuite bénéficier de l’accès aux prestations en nature de l’assurance maladie française » que « les bénéficiaires de cette prise en charge se voient délivrer rapidement des “visas pour soins” ».

Selon l’ambassade de France à Alger, ce protocole « doit permettre de réduire le nombre de patients algériens qui vont se faire soigner en France dans le cadre de démarches purement personnelles. Ces démarches individuelles génèrent une dette “privée” qui avoisine 25 millions d’euros et des problèmes de recouvrement ».

« Les patients algériens qui ne bénéficient pas d’une autorisation préalable de la Cnas doivent payer la totalité des frais occasionnés », rappelle par ailleurs l’ambassade.

Un différend sur les montants

En fait, le protocole répond à une demande de la Sécurité sociale française auprès de laquelle son homologue algérienne est débitrice. Sauf que le montant réclamé n’est pas reconnu dans sa totalité par la partie algérienne. Les hôpitaux français réclament le paiement de soins administrés à des patients algériens qui se sont présentés spontanément dans leur service, sans le bénéfice de la très précieuse prise en charge que la Cnas délivre de manière très parcimonieuse à quelques malades privilégiés. A eux seuls, ces malades ont engendré une dette “privée” de 25 millions d’euros et “des problèmes de recouvrement”.

En réalité, même dans le cas de la prise en charge par la Cnas, le règlement des factures ne semble pas suivre toujours. La Cnas algérienne n’accepte de payer que sur la base du devis initial présenté par l’hôpital. Or, parfois des complications apparaissent lors de l’hospitalisation, nécessitant des soins ou des analyses qui n’étaient pas prévus initialement, ce qui engendre des coûts supplémentaires que les hôpitaux français facturent mais que le Cnas conteste presque systématiquement.

Cette situation a conduit les députés français à voter il y a un an un texte prévoyant le paiement à l’avance pour les assurés ainsi pris en charge.

Le protocole “tend à sécuriser les circuits administratifs et financiers” entre les deux systèmes de santé et réduire le nombre d’Algériens qui vont se soigner “dans le cadre de démarches personnelles” sans régler leur facture. En clair, c’est un texte qui a pour vocation de régler la question de la dette, en fermant l’accès des hôpitaux aux patients algériens qui ne peuvent pas payer directement ou par le biais d’une prise en charge.

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